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Certification Haute valeur environnementale
Le vrai/faux de la HVE : toutes les questions qui se posent sur la certification

Dix ans après sa création, près de 20 000 exploitations agricoles sont certifiées Haute valeur environnementale (HVE), un chiffre qui a plus que doublé en un an. Cette progression soutenue par le gouvernement essuie de nombreuses critiques de la part des acteurs de l’agriculture bio, notamment. Tour de piste des principales questions soulevées par la démarche et réponses avec des experts intervenant à une conférence organisée le 18 novembre.

Champ de lin
Au 1er juillet dernier, on comptait 19 216 exploitations agricoles certifiées HVE (niveau 3), contre 8 218 un an plus tôt, selon les chiffres du ministère de l’Agriculture.
© Xavier Remongin / agriculture.gouv.fr

La certification Haute valeur environnementale (HVE), créée il y a dix ans, fait beaucoup parler d’elle, s’attirant notamment les foudres des agriculteurs bios. Mais que représente-elle aujourd’hui en chiffres clés ? Quelles sont ses perspectives ? Les critiques qu’elle subit sont-elles justifiées ? Une conférence organisée ce 18 novembre par FarmLEAP avec Isagri et la Banque Populaire Occitane a permis de repositionner les enjeux et à des experts de débattre sur quelques idées reçues sur la HVE.

Pour rappel la HVE est une certification environnementale, conçue selon trois niveaux de progression, ouverte à toutes les filières et construite autour de quatre thématiques : la protection de la biodiversité, la réduction des produits phytosanitaires, la gestion de la fertilisation et la gestion de la ressource en eau.

Au 1er juillet dernier, on comptait 19 216 exploitations agricoles certifiées HVE (niveau 3), contre 8 218 un an plus tôt, selon les chiffres du ministère de l’Agriculture. Une progression due notamment à la certification en grandes cultures (près de 2000 exploitations sont certifiées aujourd’hui) et dans les exploitations ayant une activité d’élevage (1183 exploitations certifiées).  Le gouvernement s’est fixé comme objectif d’atteindre 50 000 exploitations certifiées en 2030. Pour l’heure, les exploitations certifiées HVE couvrent moins de 862 000 hectares de la surface agricole utile (SAU) française, soit un peu plus de 3,1% (contre 9,5% pour les exploitations certifiées en agriculture biologique).

Une fois ces chiffres posés, les experts intervenant ce 18 novembre ont tenté de démêler le vrai du faux sur les polémiques qui entourent la HVE.

 

Vrai/faux, une certification facile à obtenir ?

La HVE, dont le niveau 3 permettra d’accéder plus facilement aux appels d’offre de la restauration collective dès 2022, et qui rentrera dans les éco-régimes de la nouvelle Pac (jusqu’à 25% des subventions du premier pilier) selon le PSN français, s’obtient sans effort à la différence de la certification Agriculture biologique.

Vrai et faux

Selon une étude menée par la Chambre d’agriculture d’Aquitaine en 2019 auprès de 151 exploitations, 66 pouvaient accéder à la HVE sans changer de pratiques, rapporte Alessandra Kirsch, directrice des études au sein du Think Tank Agriculture Stratégies (ex-Momagri). En grandes cultures seule 1 sur 22 pouvait prétendre à la HVE sans effort, précise-t-elle. Jean-Yves Colomb, président de la coopérative Oxyane, souligne pour sa part qu’aujourd’hui 180 exploitations (sur 22 000 ha) parmi ses adhérents sont engagées dans la HVE dans le cadre d’une filière blé panifiable HVE construite avec Intermarché. Sur un échantillon de 16 exploitations engagées dans la démarche, une étude de la coopérative a montré une baisse de 25% en moyenne de l’IFT (indicateur de fréquence de traitements phytosanitaires) dont 10 à 15% sur les herbicides.
 

Vrai/faux, la voie B, une voie de trop ?

Pour accéder au niveau 3 de la HVE, deux options sont aujourd’hui possibles. L’exploitant agricole qui choisit l’option A doit valider quatre indicateurs composites sur quatre thématiques (biodiversité, stratégie phytosanitaire, gestion de la fertilisation, gestion de l’irrigation) pour être certifié. Celui qui choisit l’option B doit respecter deux indicateurs : présenter au moins 10% de sa SAU en infrastructures agroécologiques ou plus de 50% de sa SAU en prairies permanentes de plus de cinq ans et justifier d’un poids d’intrants inférieur ou égal à 30% de son chiffre d’affaires. Au 1er juillet 2021, 86% des exploitations agricoles certifiées étaient entrées dans la HVE par la voie A. Pour les détracteurs de la HVE, dont Benoît Biteau, agriculteur et député vert européen, la voie B devrait être supprimée dans le cadre du travail de rénovation du référentiel de la HVE car trop facile.

Vrai et faux

« Pour la viticulture, dans certains vignobles à forte valeur ajoutée, la Champagne notamment, cette voie B a effectivement permis de lancer la HVE », reconnaît Ghislain Leprince, consultant et spécialiste de la HVE, qui promeut la voie A, « la voie technique » permettant, selon lui, de mieux se comparer et de mieux mesurer les progrès. Alessandra Kirsch estime pour sa part que ces deux options ajoutent de la complexité de compréhension par le consommateur. Elle affirme également que l’option B mériterait d’être adaptée en fonction des productions. Elle pourrait être « musclée » pour la viticulture avec un poids d’intrants par rapport au chiffre d’affaires, plus faible que 30%. « Pour d’autres filières cette option B n’est pas si facile. Au sein de l’étude réalisée en Nouvelle-Aquitaine, seules 7 exploitations pouvaient prétendre à la certification HVE sans effort en passant par la voie B », souligne par exemple l’experte.

Vrai/faux, un référentiel trop ancien ?

Intervenant via un message vidéo lors de la conférence, Laurent Haye, agriculteur bio en Bretagne, spécialisé dans le sarrasin exprime ce que beaucoup d’agriculteurs bios pensent sur la HVE : « je reste assez réservé, pour moi ce n’est pas une vraie certification, mais une appellation environnementale, à la différence de l’agriculture bio et de ses contrôles approfondis. J’ai peur qu’elle vise une certification de grande envergure au rabais », déclare-t-il. Alors que certains agriculteurs bio ont peur d’une concurrence déloyale en provenance de la HVE, le référentiel HVE mérite-t-il aujourd’hui d’être renforcé ?

Vrai

Le référentiel a dix ans et ne répond plus aux attentes de la société civile qui ont encore augmenté, sur la thématique de la biodiversité notamment. Le ministère de l’Agriculture, à l’origine de la certification HVE, l’a annoncé lui-même le référentiel HVE va être rénové et c’est la nouvelle mouture qui s’appliquera pour l’accès à l’éco-régime dès 2023. La commission nationale de la certification environnementale (CNCE) travaille déjà sur le sujet. Une première mouture devrait sortir au premier trimestre 2022, selon Ghislain Leprince qui promet « un effet d’annonce ». Il révèle juste que le critère IFT en arboriculture sera intégré au nouveau référentiel. Parmi les pistes à l’étude : la prise en compte d’un critère bas carbone ou encore des critères de bien-être animal, rapporte Alessandra Kirsch. Mais gare à ne pas mettre la barre trop haute, préviennent les différents experts.

Vrai/faux, la HVE est très peu connue du grand public ?

Le gouvernement appelle les agriculteurs à s’engager dans cette troisième voie, entre l’agriculture conventionnelle et le bio. Mais la HVE reste encore très peu connue du grand public.

Vrai

Les professionnels attendent un vaste plan de communication financé par l’Etat… en vain ! Hervé Lapie, secrétaire général adjoint de la FNSEA, regarde avec envie le programme irlandais Origin Green fortement soutenu par l’Etat. Le ministère de la Transition écologique mène actuellement une étude de l’évaluation de la HVE et le responsable syndical espère qu’elle fera ressortir le besoin d’un programme de communication. Mais attention à « ne pas faire un gloubi-boulga en ajoutant des critères de bien-être animal par exemple », prévient-il, « le message doit être simple pour le consommateur ».

Vrai/faux, la HVE aussi valorisée que le bio ?

Reste une problématique majeure, alors que s’engager dans la HVE représente un risque pour les agriculteurs en période de transition, quelle valorisation peuvent-ils en espérer ? Une valorisation proche de l’agriculture bio ?

Faux

Gilbert Domergue, président de la coopérative laitière Cant’Avey’Lot engagée dans la HVE, estime surtout que la certification assure la « pérennité des contrats », avec des partenaires distributeurs comme Franprix, et ouvre les portes de la restauration collective. « L’économie d’intrants va aussi nous aider à passer le cap (dans une période de flambée des coûts de production, ndlr) » poursuit-il. « La HVE est une certification intelligente, c’est une démarche de progrès qui ne doit pas être opposée à la bio, elle ne donne pas accès au même prix », juge de son côté Alessandra Kirsch. « Egalim 2 devrait permettre de mieux valoriser la HVE, reste à connaître le coût de production en HVE », complète Ghislain Leprince. Sandrine Doppler, experte en transition alimentaire, estime pour sa part qu’une meilleure rémunération des agriculteurs certifiés HVE passera par l’intégration des industries agroalimentaires dans la démarche.

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