« Le quad a été pour moi une solution économique à l'installation »
Dans le Var, Guillaume Guiroux s’est lancé dans la viticulture sans tracteur, un choix économique et agronomique. Aujourd’hui encore il utilise son quad pour la grande majorité des travaux.
Dans le Var, Guillaume Guiroux s’est lancé dans la viticulture sans tracteur, un choix économique et agronomique. Aujourd’hui encore il utilise son quad pour la grande majorité des travaux.
À force de travailler pour les autres, Guillaume Guiroux a eu envie de se lancer lui aussi dans la culture de la vigne. Alors gérant, avec sa femme, d’une entreprise spécialisée dans la prestation de labour à cheval en Provence, il a saisi en 2017 l’opportunité d’exploiter six hectares du côté de Carcès, dans le Var. La question du matériel s’est rapidement posée pour les nouveaux fermiers, qui ne possédaient que le nécessaire pour travailler les sols en traction animale. « Nous n’avions pas forcément les moyens d’acheter un tracteur, et nous voulions éviter le tassement des sols », explique Guillaume Guiroux.
Puisque le projet était de travailler le cavaillon au cheval et de laisser l’enherbement naturel sur l’interrang, le quad est apparu comme l’alternative idéale. Le viticulteur a opté pour un Polaris Sportsman 570, qu’il a acheté neuf pour 8000 euros. « Je cherchais un quatre roues motrices reconnu et largement diffusé, pas trop large, détaille-t-il. Prendre plus gros ne servait à rien, le 1000 cm3 a trop de gaz. Et un plus petit aurait été à la peine. »
Seulement 20000 euros de matériel pour se lancer dans la vigne
Trouver le quad a été facile. D’office, Guillaume Guiroux a fait réaliser quelques modifications pour répondre aux sollicitations utilitaires. Il a notamment fait changer les amortisseurs arrière (pour supporter plus de poids), renforcer les courroies et galets de variateur et installer un bouton pour activer manuellement le refroidissement du moteur. « Ces engins ne sont pas faits pour rouler à 5 km/h en tirant des charges lourdes », admet-il. Dénicher du matériel viticole adapté fut une autre paire de manches. Pour le pulvérisateur, premier outil nécessaire, le viticulteur s’est équipé d’un jet porté autonome chez l’italien Carrarospray. Un investissement de 6000 euros.
Puis il a trouvé un broyeur à fléaux pour 7000 euros chez Gruau, petite entreprise française spécialiste des espaces verts. Pour l’épandage d’engrais, il s’est équipé d’un matériel simple, animé par le mouvement des roues, glané chez Brard et Sarran pour 400 euros. Cerise sur le gâteau, le viticulteur a même dégoté une vieille poudreuse adaptée à la traction animale, dont le mécanisme est lui aussi entraîné par ses roues. Il l’a bricolée pour l’atteler à son quad. Il ne lui reste que l’écimage, qu’il réalise à la cisaille, une à deux fois par an. Quelque 20000 euros lui auront donc suffi pour démarrer son activité viticole.
Le tracteur devient indispensable pour travailler l’interrang
Après quelques saisons, Guillaume Guiroux a observé les limites d’un itinéraire complet au quad. « La turbine du pulvé est petite, reconnaît-il. Il y a moins de ventilation, donc le produit pénètre moins bien dans la végétation. En été, je dois passer dans tous les rangs. » De même, il ne met pas plus de 250 litres dans sa cuve, qui en fait 400 de capacité, sinon le quad peine dans les coteaux. Sans compter qu’il est obligé de travailler avec une combinaison et un masque. D’autre part l’enherbement sur tous les rangs s’est montré trop concurrentiel, ce qui a fini par impacter les rendements. Il a donc dû se résoudre à un peu de travail du sol interrang, et au passage d’un tracteur.
« Le réaliser au cheval est impensable en vigne large, cela représente beaucoup trop de travail. Il existe bien des griffons pour quad, mais ces véhicules ont beaucoup moins d’adhérence qu’un tracteur. Ils patinent et n’ont pas assez de puissance », regrette le viticulteur. Heureusement, il est relativement facile de se faire prêter un tracteur pour travailler les sols. « Davantage que pour aller traiter à l’annonce d’une dégradation de la météo ! », ironise Guillaume Guiroux. La dernière impasse technique fut au moment de tester le semis d’engrais verts. « Nous n’avons rien trouvé pour le quad, témoigne-t-il. J’ai bien essayé avec mon épandeur, mais ça broie les graines. »
S’il a craqué en 2022 et investi dans un vieux Massey Fergusson 152, ce n’est pourtant pas à cause des contraintes à la vigne, mais plutôt de celles liées aux prés. Car il entretient également six hectares de prairie pour ses chevaux de trait. « Et à tondre au quad, c’est long… », soupire-t-il. S’il était satisfait de son broyeur Gruau, le viticulteur apprécie maintenant d’avoir un attelage trois points qui lui permet de lever l’outil en cas de pierre dans les vignes, ce qui n’est pas le cas derrière un quad.
Malgré l’achat du tracteur, le quad reste son principal outil
N’allez pas croire pour autant qu’il regrette sa stratégie initiale. « De fait je n’ai aucun prêt en cours à la banque, se réjouit-il. Même en commençant avec un vieux tracteur, rien que le pulvé m’aurait coûté plus cher. » Le viticulteur trouve également une réelle différence sur le respect du sol et les phénomènes de tassement. « Avec la charrue dans les mains, on est aux premières loges pour observer cela. Quand nous passions au cheval chez nos clients, on se rendait compte qu’elle rentrait dans du béton au niveau de la bande de roulement. Ici, avec un quad de 400 kg et des pneus basse pression, même en passant après 30 mm de pluie on n’a pas de problème », assure-t-il. D’ailleurs, il entend bien continuer sur la même stratégie, et garder le quad comme outil principal. Il faut dire que Guillaume Guiroux apprécie son côté pratique pour tout un tas d’autres travaux. Pour faire le tour des clôtures contre les sangliers mais aussi pour arroser les complants, entretenir le palissage, remplacer les piquets…
« Tout ce qui requiert de la manutention dans les rangs de vigne. J’attelle ma remorque et je mets tout le matériel dedans », explique-t-il. Son quad est devenu indispensable également pour les vendanges, qu’il réalise à la main. Jusqu’en 2021 l’équipe remplissait les caisses directement dans la parcelle. Il les chargeait sur une remorque plateau en passant dans les rangs. Maintenant qu’il a un tracteur et une benne, il n’utilise le quad que pour transporter les seaux. « Ainsi je ne rentre pas dans les rangées avec un tracteur et trois tonnes de raisin, détaille-t-il. J’arrive à installer une vingtaine de seaux pleins sur les porte-bagages du quad. Je fais donc des rotations pour aller les vider dans la benne en bord de parcelle. » Un système qui lui convient d’autant plus qu’il économise, de la sorte, les bras d’un porteur.
Un choix qui n’est pas réalisable dans toutes les régions
Les pieds sur terre, Guillaume Guiroux est conscient que le quad n’est pas une solution universelle, et estime qu’il ne faut pas le comparer à un tracteur. « Ça coûte moins cher, mais c’est complètement différent. Dans mon cas ça a suffi parce que je travaille les sols au cheval, par passion. Mais pour un viticulteur qui s’installe et qui doit, quoi qu’il en soit, acheter un tracteur pour travailler les sols, autant traiter avec. De même, c'est possible ici en Provence car je peux vivre avec six hectares, mais sur une exploitation en Languedoc où il faut cultiver seul une vingtaine d’hectares pour dégager un revenu, ça n’est pas la même chose… », conclut-il avec sagesse.
repères
Domaine Grasseou
Surface 6 hectares, dont 1,5 encore à planter
Dénomination AOP côtes-de-provence
Encépagement grenache, tibouren, syrah, cinsaut, cabernet-sauvignon, rolle
Types de sols argileux en côteaux
Largeurs interrang 2,50 mètres
Production annuelle environ 150 hl
Circuit de commercialisation vente en vendange fraîche
Découvrez les autres articles de notre dossier quad :
Quad, le petit véhicule qui monte en viticulture
« En viticulture, le quad est complémentaire du tracteur »
« J’ai pu passer dans les vignes détrempées sans abîmer les sols »
« Le quad a été pour moi une solution économique à l'installation »
Un porte-outil pour quad, pour en faire plus dans les vignes
Trente-neuf quads adaptés à la vigne
zoom sur
Sportsman 570 de Polaris
Cylindrée 567 cm3
Nombre de roues motrices 4
Largeur hors tout 1,212 m
Garde au sol minimale 296 mm
Poids à vide 337 kg
Capacité du réservoir d’essence 17 litres
Capacité de traction 830 kg
Prix au 27/09/2022 à partir de 9590 euros TTC