Capteurs, OAD... Mieux détecter les ravageurs pour mieux traiter la vigne
Alors que les solutions de couverture phytosanitaire ne cessent de s’éroder, la fréquence des maladies suit la courbe inverse. Les outils pour mieux les détecter et plus tôt deviennent de précieux alliés pour éviter les échecs de protection.
Alors que les solutions de couverture phytosanitaire ne cessent de s’éroder, la fréquence des maladies suit la courbe inverse. Les outils pour mieux les détecter et plus tôt deviennent de précieux alliés pour éviter les échecs de protection.

En 2018, le mildiou causait des dommages dans le Sud-Est d’une rare intensité. Certains anciens disaient ne jamais avoir connu ça. Et encore, ça n’était rien à côté de 2023 et 2024 ! Aurait-on la mémoire trop courte ? Dans le dernier numéro de la Grappe d’Autan, gazette technique du bassin Sud-Ouest, Audrey Petit, ingénieure IFV, s’interroge sur la tendance des millésimes à mildiou. « Cet enchaînement est-il le fruit d’un malencontreux hasard météorologique ou allons-nous vers une fréquence accrue de millésimes favorables au mildiou ? », pose-t-elle. Si les conclusions sont à prendre avec des pincettes, car elles ne reposent que sur les vingt dernières années (ce qui est court à l’échelle du climat), les tendances observées suggèrent un risque accru de conditions favorables au mildiou. Dans le Sud-Ouest, l’augmentation de la pluviométrie n’est pas une vue de l’esprit : les cumuls de septembre à août (période de modélisation du mildiou) sont de plus en plus importants, que ce soit à Gaillac, Cahors, Fronton ou dans l’Aveyron.
Cet accroissement est dû aussi bien au plus grand nombre de jours de pluie qu’à l’importance des épisodes pluvieux. Entre 2006 et 2024, en moyenne, les vignobles de Cahors, du Gers et de l’Aveyron ont pratiquement vu le nombre de pluies importantes (plus de 15 mm) durant la période mai à juillet doubler. La température, elle, dépasse les normales. Sur les cinq derniers millésimes, tous ont été excédentaires en chaleur.
Quand on ajoute à cela le retrait constant de solutions phytosanitaires, on comprend qu’il faut rester sur ses gardes. Heureusement, le contexte technologique change lui aussi. Depuis le Covid, il n’a jamais été aussi simple de réaliser une analyse PCR. Des acteurs comme Bayer, pour alimenter son modèle Movida, ou le Syndicat général des vignerons de la Champagne réalisent des prélèvements de feuilles dans le vignoble pour chercher l’ADN d’oïdium avant que les symptômes ne soient visibles. Ce type de détection passe aujourd’hui par les laboratoires et reste complexe à mettre en place. Mais d’autres acteurs travaillent d’ores et déjà sur des kits à bandelette, à l’instar des tests Covid, afin que le vigneron puisse employer ces méthodes en autonomie sur son exploitation.
L’analyse d’images est opérationnelle mais pas encore à maturité
De même, le numérique et l’agriculture de précision pourraient connaître un nouveau souffle grâce à l’avènement de l’intelligence artificielle (IA). « La première vague d’IA basée sur l’imagerie montre des résultats bluffants en termes de reconnaissance et de détection des maladies, assure Bruno Tisseyre, enseignant-chercheur à l’Institut Agro de Montpellier et titulaire de la chaire AgroTIC. Les premiers acteurs arrivent sur le marché, mais il faut s’attendre à en voir d’autres avec des modèles économiques variés. »
Il n’empêche. Aussi performantes soient-elles, ces solutions ne servent qu’à donner l’alerte et aider le vigneron à traiter au mieux en fonction des conditions de l’année. Elles ne remplaceront en aucun cas l’esprit critique d’un viticulteur ou d’un technicien. Ni les produits phytosanitaires, et devront donc être accompagnées d’une palette de substances pour la protection de la vigne, que l’on espère voir s’élargir aussi.
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