Le Polyter, nouvel or bleu ?
L’agronome Philippe Ouaki Di Giorno a développé un hydrorétenteur en cellulose. Utilisé en vigne, il permet de s’affranchir d’arrosage et d’améliorer la reprise des plants et complants.
L’agronome Philippe Ouaki Di Giorno a développé un hydrorétenteur en cellulose. Utilisé en vigne, il permet de s’affranchir d’arrosage et d’améliorer la reprise des plants et complants.
Il est des révolutions qui sont silencieuses. Depuis 20 ans, sans faire de vague, Philippe Ouaki Di Giorno et son invention, le Polyter, sont en train de bouleverser les codes de l’agronomie. Le principe est pourtant simple. Il s’agit d’utiliser un hydrorétenteur (semblable à ceux présents dans les couches bébé) pour améliorer l’hydratation des plantes. Car la plupart de l’eau de pluie qui s’infiltre dans la terre n’est pas stockée, mais rejoint les nappes. « Il y a 80 % de pertes sur un sol argilo-humique et jusqu’à 96 % en contexte sableux » informe l’inventeur. Le Polyter est un produit organique, constitué de cellulose réticulée, de polyacrylate de potassium et d’engrais. Il ressemble à de simples granulés translucides, et pourtant, il est capable de retenir 165 à 300 fois son poids en eau. « Trois grammes peuvent conserver un demi-litre d’eau, sous forme de gel » assure Philippe Ouaki Di Giorno. Concrètement, le Polyter s’emploie en l’intégrant à la terre, soit à la plantation soit par carottage. Selon l’agronome, il s’associe aux racines de la plante, à l’image de nodosités, stocke l’eau et devient une véritable interface. « Ainsi la plante n’absorbe que ce dont elle a réellement besoin, témoigne-t-il. Ce n’est pas un simple relargage, qui pourrait entraîner des phénomènes d’asphyxie. »
Augmentation de la masse racinaire et chute de la mortalité
En vigne, il conseille un apport de dix grammes par pied. Apportés à la plantation, ils permettent de mettre les pieds de vigne dans le meilleur contexte possible. Ils auront ainsi un développement racinaire plus important dans les premières années, assurant une croissance plus rapide, mais aussi une meilleure implantation. Ils seront donc plus forts à l’avenir. « En 2016, j’ai suivi un château bordelais qui a planté une dizaine d’hectares de la sorte. Il a eu 100 % de réussite, sans arroser, alors que l’année était très sèche, relève Philippe Ouaki Di Giorno. De même, sur une parcelle de deux ans, nous avons obtenu une taille des plants au niveau du collet ainsi qu’une production équivalente à une vigne de quatre ans. » L’intérêt est encore plus flagrant sur les complants, qui arrivent ainsi à faire leur place et à rattraper le retard malgré la rude concurrence. Autre effet induit par le produit : il permet de décompacter le sol, que ce soit par ses propriétés mécanique ou par le retour de la vie lombricienne. Le Polyter est ensuite dégradé naturellement par les micro-organismes du sol, en cinq ans en moyenne. « J’ai fait de nombreuses analyses de terres et de substrats, rassure l’inventeur, on ne retrouve aucune trace. De même, il n’y a pas de migration dans la plante. » Utilisé à 20-30 cm de profondeur, il ne profite pas aux adventices. Et cerise sur le gâteau, il est compatible avec une plantation à la machine. Au prix de 24 euros le kilo (soit 24 centimes le plant), le Polyter se révèle rapidement rentable rapporté à la baisse de mortalité des jeunes plants et au temps économisé à l’arrosage…
Plusieurs distributeurs proposent le produit depuis cette année, notamment Inovitis à Bordeaux et Soufflet Vigne en vallées de la Loire et du Rhône. Il est également possible de commander en prenant contact avec le fabricant à l’adresse polyter5@gmail.comUn produit plein d’avenir face au réchauffement climatique
Nous avons réalisé des essais sur les complants lors de la campagne 2016. Sur l’une des modalités, nous avons mis dix grammes de Polyter au fond du trou lors de la complantation. Et sur ces plants nous avons observé un allongement significatif des rameaux, de l’ordre de 20 % par rapport au témoin. Nous n’avons pas pu vérifier la baisse de la mortalité, mais ce qui est sûr, c’est que nous n’avons pas eu besoin d’arroser les petits plants, ce qui représente un gain de temps considérable. Cette année nous allons mettre en place des essais sur une plantation nouvelle pour voir l’intérêt du Polyter sur un plantier. Pour la campagne 2017, une trentaine de vignerons se sont déjà fournis auprès de la société PODG. Je le conseille, pour moi c’est un produit plein d’avenir, surtout dans notre région où le contexte de changement climatique se fait particulièrement sentir.
Sébastien Labails, responsable innovation au vignoble des vignerons de Buzet, à Buzet-sur-Baïse dans le Lot-et-Garonne