Le congrès 2023 de la Cnaoc remet le rendement butoir et la moyenne olympique sur le tapis
Organisé cette année dans le Beaujolais, le congrès de la Cnaoc a consacré une table ronde aux « Vignerons, vignes et vins d’AOC face au changement climatique », le 27 avril. Parmi les multiples facettes du sujet, ont été abordés le rendement butoir et la moyenne olympique.
Organisé cette année dans le Beaujolais, le congrès de la Cnaoc a consacré une table ronde aux « Vignerons, vignes et vins d’AOC face au changement climatique », le 27 avril. Parmi les multiples facettes du sujet, ont été abordés le rendement butoir et la moyenne olympique.
« Je souhaite vraiment que l’on reprenne le débat très rapidement sur les rendements butoir », a lancé Jérôme Bauer, président de la Cnaoc, en évoquant le thème de l’adaptation au changement climatique par la gestion des rendements et des réserves.
La possibilité de pérenniser le dispositif de dépassement du rendement butoir négocié pour 2022 suite au gel de 2021 avait été évoquée lors de sa mise en place. Mais depuis, le dossier n’a pas été rouvert alors que « tout s’est bien passé », a regretté Jérôme Bauer. « On est prêts à porter la démonstration de la qualité à travers différents contrôles », a-t-il ajouté.
Estimant que le texte rédigé l’an dernier est « bien fait », le président de la Cnaoc attend donc des pouvoirs publics qu’ils aident les AOC à faire entrer dans la loi la possibilité de déclencher ce dispositif en cas de besoin. « C'est encadré, il doit faire suite à une année où il y a un aléa climatique ou une baisse des réserves », a-t-il rassuré.
Le dépassement du rendement butoir, outil de régulation des effets du changement climatique
Appelé à témoigner sur l’usage du dispositif, Thiébault Huber, président de la Confédération des appellations et vignerons de Bourgogne, a jugé que c’était « le genre de mesure très utile » face aux conséquences du changement climatique. Il s’est même voulu plus provocateur en lançant « qu'à la limite, on pourrait enlever le rendement butoir », les rendements étant déjà pilotés avec le VCI et la réserve interprofessionnelle, selon lui. Il a souligné que le dispositif avait permis de mettre en réserve au total 13 000 hectolitres chez 900 vignerons, la Bourgogne en comptant autour de 4 500.
Maxime Toubart, président du syndicat général des vignerons de Champagne, a lui aussi invoqué la pertinence de cet outil face aux rendements erratiques induits par les aléas climatiques. En Champagne, ce dépassement a été activé par 5 500 viticulteurs sur les 20 000 que compte l’appellation.
Repartir à la charge sur la moyenne olympique
L’avenir des moyennes olympique ou triennale pour les aides à l’assurance récolte était un autre thème inscrit au dense programme de la table ronde. Laurène Chmitelin, responsable projets stratégiques agricoles Pacifica, a rappelé l’origine de ces références qui freinent aujourd’hui bien des vignerons à s’assurer. Il s’agît de l’accord de Marrakech de l’OMC qui date de 1994.
Cet accord visait à limiter les soutiens à l’agriculture entrainant des distorsions de concurrence. Il classe les mesures de soutien selon un degré de tolérance. Pour pouvoir subventionner l’assurance récolte tout en restant dans les "mesures autorisées", l’Union européenne s’astreint à la moyenne olympique ou triennale.
« Une distorsion de concurrence manifeste que nous avons apprise tardivement »
Mais d’autres pays, notamment les Etats-Unis, assument de mettre leur programme d’assurance récolte dans la case des mesures « à discipliner ». « Une distorsion de concurrence manifeste que nous avons apprise tardivement », a soulevé Jérôme Bauer. Eric Chadourne, président de l’interprofession des vins de Bergerac et Duras, a exprimé le sentiment d’avoir été floué. « C’était clair qu’on ne pouvait pas bouger à cause de l’OMC. Mais on est un certain nombre à être inassurables à cause de cette moyenne olympique. C’est gravissime pour la filière », a-t-il fulminé.
Participant au congrès de la Cnaoc, les députées européennes Anne Sander et Irène Tolleret ont évoqué la possibilité de revenir au combat sur ce sujet. Sans cacher que la France était isolée sur ce souhait lors des négociations sur la nouvelle PAC. « Il va falloir se mobiliser fort et que l’on trouve des soutiens », a projeté Anne Sander.
Laurène Chmitelin a appelé à avoir une vraie réflexion sur la moyenne de référence, celle-ci ne pouvant pas refléter une baisse structurelle de rendement, l’assurance couvrant par définition un risque aléatoire.
Partager et encourager les expériences et initiatives
La table ronde a également donné la parole à différents intervenant exposant des outils et initiatives d’adaptation ou d’atténuation du changement climatique entrepris sur le terrain.
En conclusion, Christian Paly, président du Comité vins et eaux de vie AOC et Carole Ly, directrice de l’Inao ont présenté le dispositif d’évaluation des innovations (DEI) proposé par l’Inao. Un questionnaire élaboré avec l’IFV va être envoyé prochainement « pour savoir ce qui se réfléchit dans les ODG en matière de changement climatique » a aussi signalé Carole Ly. Soucieux de manifester un esprit de dialogue, l’institut va organiser neuf réunions régionales sur les changements de pratiques face aux évolutions climatiques, pour qu’il y ait des échanges entre ODG et inter filières.