Faut-il relancer les essais OGM en vigne ?
Le sujet des OGM est on ne peut plus clivant en France. Mais François Hollande l'a remis sur le tapis il y a quelques mois, exhortant les chercheurs à poursuivre leurs essais. Faut-il pour autant les relancer sur vigne ? Si certains viticulteurs et scientifiques y sont favorables, la question ne semble pas d'actualité dans les centres de recherche.
Le sujet des OGM est on ne peut plus clivant en France. Mais François Hollande l'a remis sur le tapis il y a quelques mois, exhortant les chercheurs à poursuivre leurs essais. Faut-il pour autant les relancer sur vigne ? Si certains viticulteurs et scientifiques y sont favorables, la question ne semble pas d'actualité dans les centres de recherche.
Alors que François Hollande appelle la France à poursuivre ses recherches sur les OGM (organismes génétiquement modifiés), ne serait-il pas pertinent de reprendre les essais sur vigne et de tester des cépages transgéniques ? Car soyons clairs : l'objectif de ces essais n'était pas de trouver une variété transgénique pour la commercialiser, mais bel et bien d'avoir du recul sur les risques potentiels pour l'homme et l'environnement. Comment, sans recherche, pourra-t-on accumuler et transmettre des connaissances scientifiques pour les générations à venir ? « Il en va de notre responsabilité », martèle même Olivier Le Gall, directeur général délégué à l'organisation, aux moyens et à l'évaluation scientifique de l'Inra. Car à l'heure actuelle, nombre d'interrogations sur les organismes transgéniques viticoles restent en suspens. Comment fonctionnent les résistances ainsi obtenues ? Sur quelle plage de température ou quel laps de temps sont-elles efficaces ? Comment interagissent le porte-greffe et le greffon au niveau génétique ? Y a-t-il communication ? Des transferts de gènes s'opèrent-ils vers la microflore du sol ? Comment obtenir une diversité variétale ? Autant de questions actuellement sans réponse.
Même les essais les plus sécurisés sont sans perspective de relance
Malgré cela, et la poursuite de certains travaux en laboratoire, la reprise d'expérimentations en plein champs ne semble guère d'actualité. Le sujet cristallise trop de tensions en France. Au point que même les essais les plus sécurisés (voir encadré) sont « sans aucune perspective de relance », nous informe-t-on du côté de l'Inra de Colmar. « L'opposition sociétale étant ce qu'elle est, nous n'avons pas de raison de nous relancer dans des travaux voués à l'échec », poursuit Frédérique Pelsy, la présidente du centre.
Pourtant, des petites voix commencent à s'élever dans le vignoble. Les OGM ne seraient-ils pas une voie, sinon à employer, du moins à tester pour, à long terme, diminuer le recours aux produits phytosanitaires, permettre l'adaptation au changement climatique ou encore améliorer la viabilité des exploitations ? Ce n'est rien moins que la question qui a semblé sous-jacente lors du dernier congrès de la Cnaoc (Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vin à Appellations d'Origine Contrôlées). La table ronde était consacrée à la vaste thématique du « Changement climatique, nécessaire réduction des intrants : quelle adaptation pour les AOC ? ». S'il y a surtout été question des cépages résistants, de la nécessaire adaptation de la réglementation européenne sur le sujet et de l'importance, pour les AOC, d'être capables d'innover ; la question des OGM était en embuscade. « Des Italiens veulent faire reconnaître des variétés résistantes ayant juste un fond de vinifera comme étant des vinifera, pointait en effet Laurent Audeguin, de l'IFV. Ce genre de reconnaissance serait la porte ouverte aux OGM, qui seraient beaucoup plus proches génétiquement d'un vinifera que ces cépages résistants. » De là à vouloir relancer les essais sur les OGM, il n'y a qu'un pas que ni la Cnaoc, ni l'IFV ne franchissent. Pour le président de la confédération, Bernard Farges, « il est impossible à l'heure actuelle d'aller sur ce terrain des OGM. C'est un sujet trop polémique et anxiogène ; la société n'est pas mûre. » Même son de cloche à l'IFV, même si l'institut estime « dommage que des pays avancent dans les connaissances et que nous ne puissions rien faire pour cause de problèmes sociétaux. »
Un OGM résistant à la maladie de Pierce en test aux États-Unis
Et en effet, si nos essais en sont au point mort, il n'en va pas de même à l'étranger. « Une variété OGM, résistante à l'herbicide 2,4 D, Improved Chancellor, est déjà cultivée aux États-Unis », indique Frédérique Pelsy. Une autre, résistante à la maladie de Pierce, infection bactérienne véhiculée par la Xylella fastidiosa et qui fait des ravages outre-Atlantique, serait en test sous serre et au champ.
Même s'il est plus difficile d'obtenir des informations, nos autres concurrents, l'Afrique du Sud, le Chili, la Chine ou encore l'Australie plancheraient également sur l'obtention de variétés OGM. Selon une enquête italienne datant de 2008, certains pays viseraient l'amélioration des qualités agronomiques (tolérance au froid, résistance aux champignons, virus ou bactéries), tandis que d'autres rechercheraient plutôt des améliorations qualitatives. Une fois de plus, la France se plante donc des bâtons dans les roues quand ses concurrents avancent. Avec le risque, à long terme, de se faire imposer des cépages transgéniques étrangers. Est-ce vraiment stratégique ?
Des résistances plus ou moins compliquées
Jusqu'à présent, la France n'a travaillé que sur la résistance au court-noué. Et ce, notamment parce que « d'un point de vue technique, la résistance aux virus est plus facile à obtenir que celle à des champignons ou encore à des bactéries », souligne Olivier Le Gall. En effet, dans ces deux derniers cas, la résistance se situe souvent sur plusieurs gènes, contrairement à celle des virus, qui ne concerne qu'un gène, parfois même très court.