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En avant la diversification !

Des jus de raisin tranquilles ou gazéifiés, des cocktails à base de vin ou encore des confitures… Marion Babinot, viticultrice charentaise, ne cesse de se diversifier pour augmenter sa marge. Bienvenue à l’Alambiquée !

Malgré son jeune âge, ou peut-être grâce à lui, Marion Babinot, fourmille d’idées. Il n’y a qu’à franchir le seuil de la boutique de cette viticultrice charentaise pour s’en rendre compte. Pas moins de 18 produits différents cohabitent sur ses étals. Des cognacs se mêlent aux jus de raisin, des confitures et gelées de vin jouxtent des pineaux, des jus gazéifiés surplombent des vins tranquilles et avoisinent des cocktails à base de vin. Sans compter quelques étagères de safran, qui rendent hommage à l’ex-spécialité de la région. C’est sûr, Marion Babinot a de l’énergie et de la créativité à revendre !

Tout a commencé en 2010, quatre ans après que la vigneronne ait rejoint son père sur l’exploitation familiale. La jeune femme, titulaire d’un BTS viti-oeno et d’un BTS commerce des vins et spiritueux, s’est lancée dans une première diversification du cognac, avec comme leitmotiv de faire « des vins plaisirs et non des vins pour grands œnologues ». Elle embouteille 600 cols de sauvignon gris en vin de pays charentais. C’est un succès. Tout est écoulé en 7-8 mois. À partir de ce moment, elle réitère l’expérience chaque année. En octobre 2010, elle lance un jus de raisin blanc gazéifié : le Concilia’Bulle. « Sur les marchés, beaucoup de gens me demandaient des produits sans alcool, que ce soit pour eux, ou pour leurs enfants, relate-t-elle. J’ai donc voulu répondre à cette demande, avec le Concilia’Bulle, un genre de Champomy artisanal, à base de raisin et non de pomme. » Elle opte pour de la gazéification, et non pour un pétillant, afin que le taux d’alcool soit de 0 % vol. Le produit marche bien, même si, la première année, elle a quelques invendus. « Le temps que le marché se fasse », estime-t-elle. À présent, elle en écoule 1 200 bouteilles par an. Et produit son pendant en rouge, à base d’arinarnoa.

Un contrat avec Martell qui apporte sécurité et trésorerie

Quelques mois plus tard, en juin 2012, sa route professionnelle prend un nouveau virage. Marion Babinot s’installe à son compte sur l’Alambiquée de Roumillac. Elle reprend alors 11 hectares, dont 10 consacrés à la production de cognac. « J’ai un contrat avec Martell et ça se passe très bien, se satisfait-elle. Cela m’apporte à la fois de la sécurité et de la trésorerie. » Elle ne compte donc pas cesser ce partenariat. Mais pas question, pour autant, de stopper sa stratégie de diversification. « On ne vit pas avec dix hectares de cognac, assure la jeune femme. Les produits autres font la plus-value et la différence face aux concurrents. » Sur l’hectare restant donc, place à la diversité ! Le merlot et l’arinarnoa, le sauvignon gris, le chenin et le colombard se partagent les quelques ares. De quoi permettre à la vigneronne d’élaborer tous ses produits « alternatifs », au rythme d’une innovation annuelle. « Il faut du nouveau tous les ans, sinon, les gens se lassent, argue-t-elle. Les produits autres ont un côté ludique. » À chaque fois, tout part d’une idée ; d’un coup de cœur. Et de fait. En 2012, elle lance la Drol’S (qui signifie jeune fille en charentais) à la rose, un apéritif à base de vin. « Un soir, en rentrant d’un marché où nous n’avions rien vendu avec une copine, nous avons fait des essais en mélangeant vin et sirops », se remémore-t-elle. Il n’en fallait pas plus pour donner vie à la Drol’S. « C’est un cocktail contenant du vin de pays charentais à base de sauvignon gris (celui de l’année passée qui n’a pas été écoulé), un sirop de sucre, et de l’eau de rose », dévoile-t-elle. Une fois la recette mise au point et les coûts de production maîtrisés, elle passe aux démarches administratives. « On ne réalise pas, comme ça, toutes les implications du lancement d’un nouveau produit, indique Marion Babinot. Mais les Drol’S n’étant pas uniquement à base de vin, je ne savais pas exactement sous quelle dénomination les vendre. » Elle prend alors rendez-vous avec les Douanes, qui demandent à analyser ses produits avant que le verdict ne tombe. C’est sous la terminologie de cocktails que ces produits devront être vendus. Elle se penche ensuite sur le packaging, et choisit avec soin flacon et étiquette. « Je voulais une bouteille qui soit différente de celle du vin pour éviter toute confusion, détaille-t-elle. Quant à l’étiquette, je l’ai dessinée un soir, sur un bout de table. Mais je n’avais pas réalisé que la découpe impliquerait une pose à la main. » Une « erreur » à laquelle elle souhaite remédier cette année, en troquant le visuel actuel pour un rectangulaire ou un carré. Une fois de plus, le produit marche, et près de 600 bouteilles s’envolent dans l’année. « C’est un produit original, un produit coup de cœur », résume-t-elle.

La Drol’S fraise lui emboîte le pas en 2013, mais ce produit rencontre moins de succès. « Avant de lancer les Drol’S, nous avons testé plein d’arômes, explique la vigneronne. Celui à la fraise des bois était le produit que nous préférions. Mais dans les faits, les gens butent sur le goût de fraise. J’en ai fait 1 000 bouteilles, que j’ai du mal à vendre. » Puis c’est au tour de la Drol’S mandarine de voir le jour, en 2014. Ce cocktail, réalisé avec de l’ugni blanc pour renforcer le côté acidulé de l’agrume, rencontre lui aussi son public : « il plaît beaucoup mais est moins original que la rose », note-t-elle. Elle en réalise 600 à 800 bouteilles tous les deux ans.

Marion Babinot ayant plusieurs cordes à son arc, elle se lance aussi dans les confitures (dénommées « préparations à base de fruits ») « avec des fruits de saison » et dans les gelées ou nappages à base de vin, pineau ou encore cognac. En parallèle, elle complète son offre en vin (avec de l’arinarnoa en rouge et du merlot en rosé) et diversifie ses contenants, avec une offre de jus de raisin gazéifié en bouteilles de 33 cl « pour répondre à la demande de restaurateurs », ou encore des BIB de 3 ou 5 litres.

Les marchés de producteurs ont dopé les ventes directes

Marion Babinot accompagne sa stratégie de diversification d’une démarche commerciale appuyée. Lors de ses débuts, elle a fait des marchés un week-end sur deux et contacté des magasins de producteurs, des épiceries fines, des cavistes, etc. La « renommée » arrivant, des associations ou organismes para-viticoles se sont mis à se fournir chez elle. Mais le véritable coup de fouet est venu grâce aux marchés de producteurs, en juillet 2016. Tous les quinze jours, une dizaine de producteurs viennent s’installer dans la cour jouxtant la boutique. Ce qui draine de nombreux clients, habitués ou touristes. « J’ai multiplié mon chiffre d’affaires par sept, cet été », se réjouit-elle.

Le travail de la vigneronne commence donc à payer. Sur un chiffre d’affaires 2016 de 100 000 euros environ, 26 000 euros proviennent des produits autres que le cognac. Et cela ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin. Marion Babinot a encore plein de fers au feu : « l’autre jour, mes parents ont goûté quelque chose au restaurant qui leur a bien plu. On est donc partis sur cette piste, en l’adaptant, bien entendu… ». Le relooking des étiquettes est également au programme…

Sur un chiffre d’affaires 2016 de 100 000 euros environ, 26 000 euros proviennent des produits autres que le cognac.
repères

L’Alambiquée de Roumillac

IGP vin de pays charentais et AOC cognac

SURFACE 11 hectares

ENCÉPAGEMENT ugni blanc, arinarnoa, merlot, sauvignon gris, colombard et chenin

GAMME DE PRODUITS 3 vins tranquilles (sauvignon gris, arinarnoa, merlot), 3 apéritifs Drol’S (rose, fraise et mandarine), 3 jus de raisin : un tranquille et deux gazéifiés (rouge et blanc), des confitures, gelées de vins et nappages et du safran

PRIX DES PRODUITS environ 5 euros/bouteille pour les vins, 4 €/col pour les jus gazéifiés, 3 €/col pour les jus tranquilles, 6-7 €/col pour les Drol’S et 5 à 7 € pour les confitures/gelées

NOMBRE DE SALARIÉS un (elle-même) à temps plein et un peu de main-d’œuvre ponctuellement

CIRCUITS DE DISTRIBUTION négoce pour le cognac. Pour le reste, 50 % revendeurs et magasins de producteurs, 40 % boutique, 10 % marchés

CHIFFRES D’AFFAIRES 2016 environ 100 000 euros, dont 26 000 en vente directe (hors négoce)

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