Des pistes pour protéger les plantiers de vigne du gel
Les manchons de protection ou la paille peuvent, dans certains cas, limiter les effets néfastes du gel sur les plants de vigne.
Les manchons de protection ou la paille peuvent, dans certains cas, limiter les effets néfastes du gel sur les plants de vigne.
Protéger ses plantiers du gel n’est pas la première chose qui vient à l’esprit. Il faut dire qu’on n’en attend pas de récolte. Un tel stress est pourtant préjudiciable, parfois mortel, pour les petits plants, et les remplacer coûte cher. Certains tentent donc de les protéger. C’est le cas de Raphaël Gillouin, viticulteur coopérateur dans le Diois. Fin mars 2020, un épisode de gel est annoncé alors que les bourgeons sortent du coton. Son père et lui ne peuvent se résoudre à rester les bras croisés, et décident de pailler un jeune plantier de 48 ares : comme ils sont également céréaliers et éleveurs, ils ont sous la main des balles de paille et un défibreur. « On a bidouillé un peu la machine et nous avons épandu seize balles rondes, sois 220 kilos de paille. Cela correspond à l’épaisseur pour couvrir un plant taillé à trois yeux », raconte le vigneron, qui avoue que cela prend du temps. Malgré un peu de dispersion due au vent, le paillage était en place dans la nuit du 25 mars, où la température est descendue entre -5 °C et -6 °C.
« Nous avons 10 % environ des plants qui ont gelé. Mais c’est difficile de dire que cela fait 90 % d’efficacité en l’absence de témoin, avoue le viticulteur. Je ne sais pas si je renouvellerai si l’occasion se présente, en tout cas je pense que ce n’est pas vraiment viable, surtout s’il faut se procurer la paille et le matériel. » Inutile de dire, pour Raphaël Gillouin, que l’opération sera valorisée par le paillage du rang : le vent a fini de disséminer la paille et les adventices sont passées à travers. « Pire, ça a semé des grains de blé, qui ont ensuite germé un peu partout sur la parcelle », prévient-il.
Les manchons ralentissent le refroidissement nocturne
Une autre possibilité est d’utiliser des manchons de protection. La préservation contre le gel est d’ailleurs un des premiers arguments mis en avant par la société Sodisac, qui réalise des manchons biodégradables. « L’écoulement de l’air froid vers le plant est freiné, mais surtout ces protections ralentissent le refroidissement radiatif nocturne, explique Benjamin Bois, agroclimatologue de l’université de Bourgogne. Les plants dans les manchons sont donc moins exposés au gel. » Geoffroy Nony, viticulteur en Charente, a pu expérimenter ces effets et confirme les dires du chercheur.
Dans son secteur très gélif, il a observé une réelle protection contre le gel. « De plus le manchon protège les bourgeons des premiers rayons du soleil, fatals après une gelée », complète-t-il. Le viticulteur trouve par ailleurs que le carton est plus isolant que le plastique. « Mais ces poches écologiques ne sont pas adaptées à tous les types de sols. Sur mes terres argileuses et humides le carton pompe l’humidité et la maintient autour de la plante », regrette-t-il.
C’est l’une des raisons pour laquelle David Amblevert, pépiniériste viticole en Gironde, aurait tendance à déconseiller le manchon pour se protéger du gel. « Avec cette humidité qui stagne autour du plant et qui ne peut pas s’échapper, j’ai pu observer des situations où le gel a été accentué, et le résultat bien pire que si l’on n’avait rien mis », assure-t-il. Pour le pépiniériste, la meilleure façon de protéger les jeunes plants reste le buttage. « Autrefois la majorité des viticulteurs chaussaient et déchaussaient les vignes, cela protégeait le bourrelet de greffe. Mais aujourd’hui c’est compliqué à mettre en place, seuls quelques domaines peuvent se le permettre », estime David Amblevert. Il observe toutefois que les plantiers tout juste installés dans l’hiver gèlent rarement au printemps, peut être grâce à un débourrement plus tardif. Ce sont plutôt ceux qui viennent d’être taillés à deux yeux qui sont sensibles.
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