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Les logiciels de traçabilité, de véritables outils de pilotage pour l'exploitation viti-vinicole

Avec les logiciels actuels, la traçabilité peut se transformer d’une simple formalité administrative à un outil de développement et d’amélioration pour son entreprise.

Ordinateur, tablette, smartphone… les logiciels combinent souvent plusieurs modes d'accès. © Stock.adobe.com/fr
Ordinateur, tablette, smartphone… les logiciels combinent souvent plusieurs modes d'accès.
© Stock.adobe.com/fr

La notion de traçabilité a été rendue obligatoire dans la filière vin dès 2004 au niveau communautaire. D’un point de vue réglementaire, le viticulteur coopérateur est tenu de noter ses traitements phytosanitaires et de mettre face aux parcelles traitées les bons d’apport à la coop. La cave coopérative ou le vinificateur a l’obligation de savoir d’où vient le raisin, et d’enregistrer les produits et matières sèches utilisés lors du process. Quant au vigneron indépendant il doit pouvoir en cas de problème sanitaire remonter du numéro de lot indiqué obligatoirement sur ses étiquettes à la parcelle. Tout en tenant un registre des intrants, précisant leurs numéros de lots et dates limites d’usages le cas échéant. « Ces formalités administratives sont souvent vécues comme des contraintes sans intérêt pour le vigneron, remarque Pierre Martini, ingénieur à l’IFV Beaujolais. Mais en fait cela peut devenir un véritable atout pour l’entreprise. » Car les solutions informatiques proposées pour assurer le suivi des étapes sont devenues aujourd’hui de vrais outils de pilotage pour l’entreprise, et vont bien au-delà de la simple traçabilité du produit. Chez certains fournisseurs, on peut y renseigner absolument toutes les informations utiles à l’entreprise et à sa gestion. « Notre solution permet de saisir et de suivre toutes les interventions ou activités depuis la pousse du cep jusqu’à l’expédition de la bouteille de vin », illustre Antoine Lejay, commercial pour Ertus Group.

Des applications mobiles qui bouleversent l’organisation du travail

Le nombre de cep remplacés, les heures d’ébourgeonnage ou les doses de sulfitage sont autant d’informations que l’on peut renseigner et sauvegarder pour les traiter par la suite. « Il y a un aspect technique : les solutions de traçabilité permettent de fluidifier l’information et donc de s’en servir d’avantage », décrypte Pierre Martini. Tous ces renseignements une fois regroupés permettent d’analyser la campagne. Sortir son bilan IFT par exemple pour l’étudier et progresser. Mais aussi les temps de travaux nécessaires pour une parcelle donnée. Avec l’arrivée des solutions mobiles, les logiciels de traçabilité viennent également bouleverser l’organisation du travail et sa gestion. « Il y a une tendance à rapprocher la saisie de l’information par celui qui réalise la tâche », observe Benoît Nodet chez Smag. Cette entreprise propose avec Agréo une solution pour optimiser le partage d’information entre acteurs. Comme un chef de culture et ses ouvriers pour les travaux au vignoble ou une cave coopérative et ses viticulteurs pour les sélections parcellaires. « Certains logiciels permettent de préenregistrer une tache pour donner l’ordre, et l’opérateur peut la valider une fois effectuée, ajoute Pierre Martini. Cela permet d’être plus efficient sur son organisation et la programmation du travail. » C’est d’ailleurs la motivation principale des professionnels qui s’équipent de logiciels de traçabilité : rentre son entreprise plus efficace et gagner en performance. Mais il est également possible d’intégrer dans les informations des aspects économiques. « Or la majeure partie des exploitations viticoles ne connaît pas ses coûts de revient, avance l’ingénieur IFV. Les logiciels offrent la possibilité de les calculer automatiquement. » En effet, dans le meilleur des cas les vignerons connaissent les coûts de production globaux sur l’entreprise. Mais d’autres font encore à l’aveugle, et ne se rendent compte qu’après coup s’ils margent sur un produit ou non. « En réalité ce sont des outils de travail technico-économique avant d’être des logiciels de traçabilité », résume Cyril Campo, responsable du produit Lavilog chez Lamouroux. Si la plupart des fournisseurs ne vont pas jusqu’à la proposition d’un ERP (voir encadré), certains proposent toutefois d’aller jusqu’à la gestion comptable de l’entreprise, allant de la facturation à la fiche de paie.

Les solutions peuvent être adaptées aux petits comme aux gros

Ces solutions sont aussi un plus pour ceux qui veulent se lancer dans des processus de certification. Les indicateurs HVE sont par exemple mesurables à l’aide de tels logiciels. L’informatique permet en outre de centraliser l’information et d’avoir un support unique, ce qui fait avancer plus vite lors d’un audit. Avec la volonté de la filière de multiplier les entreprises sous certification environnementale, les logiciels de traçabilité vont devenir de plus en plus incontournables. « On ne peut pas dire que le logiciel soit indispensable pour être certifié, mais quand on est dans un souci de progresser c’est important d’en avoir un », admet Pierre Martini.

Pour l’heure ce sont davantage les grandes entreprises, plus enclines à supporter le coût et la mise en place, qui se dotent de telles solutions. « Mais les logiciels sont adaptés à tous les types d’exploitations, grosses ou petites », estime l’ingénieur. Il s’agit seulement de choisir celui qui convient le mieux en fonction de ses usages et de son budget. Car les prix varient du simple au double. Si le vigneron souhaite simplement répondre aux exigences réglementaires de traçabilité, tous les logiciels font cela très bien. « Pour le reste, chacun a des attentes différentes. Il faut regarder en détail les bilans que peuvent sortir les logiciels, et voir lesquels sont adaptés à notre façon de fonctionner », analyse Pierre Martini. Ce dernier conseille aussi de prendre en compte dans le choix l’assistance technique et l’offre de mises à jour. « Nous sommes au début de l’ère des logiciels, ils évoluent très rapidement et sont appelés à proposer de nouvelles fonctionnalités », relève-t-il. Enfin, il est important également de se pencher sur les bases de données et leur export, pour être sûr de pouvoir communiquer avec d’autres logiciels et éviter la ressaisie d’information, source d’erreur et perte de temps.

Le logiciel ne remplace pas la saisie d’informations, au contraire

Attention toutefois à ne pas faire de son logiciel un gadget. Il doit être utile et ne pas devenir une perte de temps. Car, si l’idée est de gagner du temps dans sa gestion globale, la saisie reste toujours aussi fastidieuse que sur le papier. « Pour ceux qui n’ont aucune organisation, cela ne va pas les aider à être plus organisés ! avertit Cyril Campo. Les personnes qui réussissent le mieux l’intégration d’un logiciel sont celles qui ont compris qu’en un seul coup on peut répondre à l’exigence réglementaire, aider à la certification et au pilotage de l’exploitation. »

Vers une prise en compte des impacts environnementaux

Marc Jourdaine, doctorant à l’université de Bordeaux, réalise une thèse sur la mise en place d’une comptabilité environnementale intégrée dans les solutions de traçabilité, afin de permettre la prise en compte de l’impact sur l’environnement dans la prise de décision des vignerons. Pour cela, il applique le principe de l’Analyse du cycle de vie (ACV) au secteur du vin. « Les logiciels de traçabilité sont intéressants car beaucoup d’informations y sont renseignées, et elles peuvent être récupérées pour l’ACV », explique le doctorant. Le but de sa thèse est donc d’automatiser la collecte des données présentes dans un logiciel et les envoyer dans un calculateur qui donnera l’empreinte environnementale du produit. Une maquette a d’ores et déjà été créée, et devrait être testée en exploitation l’an prochain. Cela pourrait déboucher sur un module supplémentaire au sein du logiciel Process2wine du groupe Ertus, permettant de visualiser les impacts environnementaux et simuler des actions. « Il s’agit aussi par ce travail d’anticiper une éventuelle obligation d’affichage environnemental des produits », complète le thésard.

voir plus clair

Un logiciel est un outil permettant d’automatiser des traitements informatiques.

Un progiciel est aussi un logiciel mais adapté à un domaine d’activité et donc conçu pour réaliser des tâches spécifiques à ce secteur. C’est la conjonction de produit et de logiciel.

Un ERP est un type de progiciel intégrant tous outils informatiques aidant à gérer une entreprise. Il intègre aussi bien la production que la comptabilité, les ressources humaines, la facturation ou la gestion des stocks. C’est l’abréviation de Enterprise Resource Planning traduit en français par PGI ou progiciel de gestion intégré.

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