Une nouvelle famille d'enzymes prêtes à biocarburer
Des petites enzymes très prometteuses laissent entrevoir des avancées dans le domaine des biocarburants et de la chimie verte.
Marseille est une ville médiatique. Mais pas plus les films de Robert Guédiguian que les documentaires chocs ne parlent de l’UMR BBF. C’est pourtant dans la cité phocéenne, sur le site de l’école Polytech, que cette Unité mixte de recherche sur la biodiversité et biotechnologie fongiques a dressé son camp de base. Dans ce laboratoire de l’Inra, l’Institut national de la recherche agronomique, on travaille sur la dégradation de la lignocellulose, une matière qui constitue les parois des cellules des végétaux. De l’infiniment petit qui vient de conduire à une découverte de taille.
La lignocellulose se trouve en abondance dans les déchets végétaux mais elle est très résistante à la dégradation enzymatique. Dommage, car ces déchets végétaux pourraient constituer une ressource abondante pour la production de biocarburants.
Les résultats publiés dans la revue Nature Chemical Biology ce 29 janvier ouvrent un nouveau champ des possibles dans ce domaine. L’équipe de chercheurs a découvert une nouvelle famille d’enzymes capables de faciliter la dégradation du xylane, un polysaccharide particulièrement récalcitrant des parois cellulaires végétales.
Les enzymes sont produites uniquement par des champignons dégradeurs de bois et ont été identifiées au sein de la collection unique de champignons filamenteux constituée par les chercheurs de l’unité marseillaise. L’avancée porte sur « la fonction biologique d’une enzyme jusqu’alors inconnue ».
La publication dans la revue scientifique est l’aboutissement d’un travail de plus de 10 ans mené en collaboration avec d’autres équipes. Le Centre national de la recherche scientifique, CNRS d’Aix-Marseille Université, l’Université de York en Angleterre et une autre unité de l’Inra basée à Nantes ont apporté leur contribution à cette découverte majeure pour l’innovation en bioraffinerie.
Deux brevets ont été déposés et des essais sont menés sur la dégradation du pin et du peuplier. La super enzyme peut pratiquement doubler l’efficacité de la transformation de la cellulose en glucose par rapport aux enzymes utilisées classiquement dans l’industrie. Ces performances présentent un intérêt pour la production de bioéthanol à partir de biomasse mais aussi pour l’industrie papetière.
En France, c’est bien connu, on n’a pas de pétrole. Mais on a des idées pour valoriser les bio-ressources. Et le carbone renouvelable, c’est beaucoup plus durable que le carbone fossile !