Une analyse du Cerfrance Côtes-d’Armor
2017, une année exceptionnelle pour les trésoreries
Les bons résultats financiers des élevages de porcs en 2017 sont la résultante de trois leviers qui ont agi simultanément : des cours corrects, un prix d’aliment stable et des performances techniques à la hausse.
Les bons résultats financiers des élevages de porcs en 2017 sont la résultante de trois leviers qui ont agi simultanément : des cours corrects, un prix d’aliment stable et des performances techniques à la hausse.
Les premières synthèses de Cerfrance Côtes-d’Armor laissent apparaître des bilans financiers excellents pour l’année 2017. En moyenne sur l’année, la marge brute s’établit à près de 1 300 euros par truie, en hausse de 200 euros par rapport à 2016 et de plus de 400 euros par rapport à 2015. « Ces bons résultats sont la combinaison de trois facteurs qui, sans être exceptionnels, se sont complétés », analyse Georges Douguet, économiste, responsable du service études. Le prix moyen payé aux éleveurs a été de 1,538 €/kg sur l’année, en hausse de + 6,6 % par rapport à l’année précédente. Un niveau très bon, mais pas exceptionnel. « Nous n’avons pas atteint les sommets espérés, les prix sont restés en dessous des prévisions du début de l’année », rappelle-t-il. La moyenne du marché du porc breton se situe ainsi à 10 centimes au-dessous de son point haut de ces dix dernières années (1,369 €/kg contre 1,464 €/kg en 2013). Le second facteur favorisant est le prix de l’aliment, quasiment stable sur l’année, à 227 €/t en moyenne pour l’ensemble des éleveurs (235 €/t pour ceux qui achètent 100 % de leurs aliments). « Nous avons atteint un point bas suite aux sommets enregistrés en 2012 et 2013. Mais nous sommes encore loin des prix pratiqués avant 2007, qui se situaient aux alentours de 160 €/t », constate Georges Douguet. « De manière générale, les points bas sont… de moins en moins bas, et les points hauts de plus en plus haut. La tendance générale des prix des aliments est à la hausse depuis dix ans ». Le troisième facteur explicatif des bons résultats de 2017 est la progression constante du niveau technique des élevages. « L’indice de consommation global a baissé de 0,21 point en dix ans. Sur la même période, la productivité des truies s’est améliorée de 3,1 porcs. Elles produisent aujourd’hui 3 067 kg de poids vif par an, soit +446 kg en dix ans ! » Une progression qui, selon l’économiste, démultiplie la rentabilité des élevages en période de cours élevés. « La marge brute s’est nettement plus améliorée chez les meilleurs éleveurs que chez les moins bons. » En 2017, elle a atteint 2 000 €/truie pour les élevages les plus performants.
Un taux d’endettement moyen historiquement bas
Ces bons résultats se traduisent par une nette amélioration de la trésorerie nette globale des exploitations, qui passe à -19 € pour 100 kg de carcasse contre -33 € en 2016. Un tiers des élevages ont une situation économique qualifiée de « solide ». « Ils seront peu fragilisés par la prochaine crise grâce à la consolidation de leur bilan. » La part des producteurs en situation d’alerte a fortement diminué. Le taux d’endettement moyen a atteint un niveau historiquement bas, à 68 % en moyenne. « On se rapproche de la moyenne des producteurs de lait dont l’endettement a augmenté ces dernières années du fait d’investissements dans leurs moyens de production. »
Des investissements qui, dans le secteur porcin, constituent le point noir de l’année 2017. Ils se sont maintenus à un faible niveau, à 233 €/truie contre 211 € en 2016. Un niveau qui explique en partie la baisse du poste annuités + travail à façon (TAF) par kilo de carcasse constatée depuis vingt ans (0,182 €/kg en 2017). « La relance de l’investissement qui aurait dû logiquement accompagner les bons cours est nettement insuffisante", estime Georges Douguet. Manque de confiance dans la production, remise en cause de l’élevage, incertitude sur les choix techniques à adopter vis-à-vis des attentes sociétales peuvent expliquer cette situation. « Pourtant, les besoins sont importants. Les éleveurs doivent intégrer les nouvelles améliorations techniques. L’amélioration des conditions de travail est essentielle pour attirer les salariés et transmettre son outil de production en bon état de fonctionnement. La progression des performances techniques ne se fera que si les bâtiments le permettent." L’économiste pointe du doigt l’augmentation constante du coût de l’énergie, à 4,4 €/100 kg de carcasse en 2017. « C’est devenu le cinquième poste de dépense, devant les frais financiers, souligne-t-il. L’isolation des bâtiments ou les investissements dans des équipements économes en énergie s’avère de plus en plus rentable. »
Retour sur terre en 2018
L’année 2018 ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices. La baisse continue des cours depuis la mi-2017, et la stagnation, voire la hausse du coût de production se conjuguent pour en faire une année de transition. « Après 16 mois durant lesquels le coût de production a été couvert par le prix de vente, on retourne progressivement vers une situation de crise. » Pour Georges Douguet, l’été sera décisif. « Il faut absolument atteindre les 1,40 €/kg au cadran pour espérer avoir des bilans équilibrés en fin d’année. » L’économiste souligne aussi l’importance des bonnes résolutions énoncées aux États généraux de l’alimentation. « La montée en gamme doit s’accompagner d’une meilleure rémunération pour les éleveurs. La contractualisation doit contribuer à une sécurisation des revenus. Ces deux éléments sont indispensables pour restaurer la confiance et redonner l’envie d’investir. »