Loi de modernisation agricole
La filière contractualise avec la grande distribution
Dix-neuf groupements de producteurs ont contractualisé avec Carrefour qui engage sur des volumes d’agneaux précis, pour une durée de trois ans, dans six bassins de production.
Alors que la Loi de Modernisation Agricole (LMA) vient juste d'être votée, la filière ovine montre l'exemple en contractualisant avec la grande distribution. Laissant ses désaccords de côté, notamment en ce qui concerne l'agneau néo-zélandais, elle vient en effet de signer, à l'échelon national, six accords avec le groupe Carrefour, qui engage sur des volumes et sur une durée de trois ans, afin d'approvisionner 231 hypermarchés de l'enseigne. Dix-neuf groupements de producteurs et 2 800 éleveurs ovins sont concernés. Les signatures officielles ont eu lieu fin juin et début juillet dans des élevages ovins, à Gramat (Lot), Bellicourt (Aisne), Le Neubourg (Eure), Douchy (Loiret), Availles Limousine (Vienne) et Saint-Maurice-la-Souterraine (Creuse).
L'objectif de Carrefour - qui envisage la même chose en viande bovine - est de doubler ses approvisionnements en viande ovine française. Des volumes de production sont garantis en échange du respect d'un cahier des charges, sur le modèle de la charte de « l'engagement qualité Carrefour » déjà existante (respect du goût et authenticité du produit, qualité constante, environnement préservé...). Le contrat prévoit une augmentation des volumes de 12 % en 2010, puis 4 % en 2011 et 5 % en 2012, soit 21 % en trois ans.
Le 28 juin, c'était au tour du groupement des Bergers du Nord-Est de rencontrer les responsables de Carrefour, chez Jean-François Potel, le nouveau président de la structure, pour la signature d'un des six contrats, qui implique 473 éleveurs de Picardie, du Nord-Pas de Calais et de Champagne-Ardenne. « En contractualisant 15 000 agneaux par an, a expliqué Alain Basquin, directeur des achats, de l'approvisionnement et du marketing pour la boucherie à Carrefour, nous nous considérons comme un acteur du monde agricole, avec plus de responsabilité et de visibilité. La grande distribution est trop souvent diabolisée or 85 % de la viande produite est vendue par ce biais. »
Les volumes contractualisés par l'enseigne représentent 20 % de la production de la coopérative qui commercialise 60 000 agneaux par an. D'après Alain Basquin, les exigences de Carrefour sont « similaires à celles du groupement avec la traçabilité, la conduite sanitaire, l'alimentation... » En 2009, pour cette grande région, 13 974 agneaux avaient été commercialisés en direct avec les magasins Carrefour, sur 60 000 agneaux produits par an. « Nous sommes déjà partenaire depuis 14 ans, rappelle Jean Louis Potel, cet accord va donc dans la continuité, les éleveurs y vont sans crainte. » Pour 2010, l'augmentation de 12 % des volumes conduira à 15 400 agneaux commercialisés par ce biais, le reste étant engagé dans la filière « agneau d'or » chez les bouchers. « On se réunira plus régulièrement pour faire un état des lieux des besoins », ajoute Alain Basquin.
Seul regret pour les éleveurs, il n'est pas encore possible de fixer un prix minimum du kilo d'agneau. « Le marché est désorganisé aujourd'hui, parce que nous sommes dans un marché de cueillette » a justifié le directeur des achats de Carrefour. Des plus-values de 8 centimes par kilo qui passeront à 20 centimes d'ici à la fin de l'année, sont tout de même prévues dans le contrat. « Aux Bergers du Nord Est, nous avons une volonté sans faille de maintenir la production locale sur huit départements. Pour commercialiser, il nous faut des partenaires fiables » a expliqué Jean-François Potel.
« Nous nous sommes battus sur le prix, mais en échange, nous avons des devoirs sur la qualité en génétique et l'étalement de production, a rappelé pour sa part Frédéric Noizet, secrétaire général de la FNO, éleveur dans la Marne, lui-même membre des Bergers du Nord Est. Nous sommes satisfaits que la filière ovine ait un train d'avance concernant la loi de modernisation agricole. » Actuellement, 50 % de la production d'agneaux proposée chez Carrefour est d'origine française, assure l'enseigne, le reste provenant de Royaume-Uni, Irlande ou Nouvelle-Zélande.