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Des céréales et de l’enrubannage pour l’autonomie de ses ovins en Ille-et-Vilaine

Fabien Genouel a misé sur des céréales autoconsommées et de l’enrubannage de trèfle violet pour limiter sa consommation de concentré. L’autonomie et une productivité élevée assurent de bons résultats économiques.

Installé en 2010 avec sa femme Roselyne par reprise de l’exploitation familiale, Fabien Genouel élève 500 brebis croisées Romane, Île-de-France, Charolaise, sur 81 hectares, à Liffré, en Ille-et-Vilaine. Les agnelages sont répartis sur quatre périodes, en mars, juin, septembre et décembre, avec quatre agnelages en trois ans, ce qui lui permet de fournir toute l’année les démarches label rouge Brocéliande et CCP SVA. L’alimentation des brebis est basée sur de l’enrubannage, le pâturage et des céréales produites sur l’exploitation. Dès le départ, un objectif important pour Fabien Genouel a été de développer l’autonomie de l’exploitation. « 50 hectares sont accessibles aux brebis, explique-t-il. Mais une partie sont des landes très séchantes l’été et très humides l’hiver et les rendements en herbe sont limités, de 5 t MS/ha. En 2015, j’ai aussi contractualisé une MAEC polyculture élevage qui implique une part d’herbe dans la SAU de 65 % minimum et moins de 1 000 kg d’achat de concentré par UGB, soit environ 150 kg par brebis. Cela m’a amené à cultiver des céréales pour l’autoconsommation et à miser sur de l’enrubannage de ray-grass hybride-trèfle violet riche en protéines. » Sur 81,6 ha, 27,5 ha sont aujourd’hui consacrés à la production de triticale, dont 17,5 ha pour l’autoconsommation, avec un apport de 120 UN et un rendement moyen de 45 qx/ha. L’éleveur assure lui-même tous les travaux avec son propre matériel. Le reste est réparti entre 27,3 ha de prairies temporaires de ray-grass anglais-trèfle blanc-dactyle pour le pâturage, 1,8 ha de prairies permanentes et 25 ha de ray-grass hybride-trèfle violet gardé deux-trois ans pour l’enrubannage.

« L’hiver et une partie de l’été, toutes les brebis et agnelles sont en bâtiment, précise l’éleveur. Et même quand elles sortent, les agnelles reçoivent de l’enrubannage à volonté. J’ai besoin de 700-750 bottes d’enrubannage par an. Pour avoir le maximum de matière azotée, je privilégie les coupes jeunes, vers 50 % MS. Je me suis donc équipé du matériel nécessaire pour intervenir au meilleur moment. Je réalise quatre voire cinq coupes par an par parcelle, avec éventuellement du pâturage ensuite. » En 2021, bonne année pour la pousse de l’herbe, Fabien Genouel a récolté 930 bottes d’enrubannage de ray-grass hybride-trèfle violet. « Mais depuis 2017, je manquais régulièrement de fourrage et devais en acheter. Depuis 2021, j’achète donc en complément huit hectares de fétuque sur pied à un éleveur qui la fertilise avec du lisier de porc. En 2021, j’ai ainsi récolté 150 bottes de foin que je distribue aux brebis quatre à cinq jours avant l’agnelage et deux à trois semaines après le sevrage. » Les brebis valorisent aussi 7,5 ha de colza fourrager cultivé entre deux céréales. Avec ce système, les brebis ne reçoivent en complément que des céréales produites sur l’exploitation et des minéraux. Toutes les lactations (70 jours) se font en bergerie avec de l’enrubannage à volonté, 500 g de céréales et des minéraux.

Depuis deux ans, Fabien Genouel fait par ailleurs du dénombrement sur ses brebis, ce qui permet d’adapter l’apport en céréales. Les brebis simples en reçoivent 200 g, les doubles 500 g, les triples 800 g et les quadruples 1,2 kg, en deux repas pour les triples et les quadruples, avec un apport en minéraux pour toutes les brebis. « Je n’achète aucun concentré pour les brebis. » Tous les agneaux sont engraissés en bergerie avec un aliment fourni par Nutréa en échange céréales-aliment, avec 65 % de céréales de l’exploitation et 35 % d’un complémentaire azoté. L’aliment est livré par camions de 15 tonnes, que l’éleveur reprend avec une trémie sur télescopique et qu’il verse de l’extérieur dans les nourrisseurs. « Un objectif était aussi d’améliorer les conditions de travail, souligne-t-il. Je me suis équipé de cornadis, d’une pailleuse, d’une dérouleuse de bottes, d’une distribution automatisée pour les agneaux. Seule la distribution des céréales aux brebis se fait au seau. Au total, les soins aux brebis et aux agneaux ne me prennent que 3 heures par jour. »

Toute la reproduction se fait en insémination artificielle avec du Charollais, avec synchronisation des chaleurs sur le lot de mises bas de septembre, le reste en lutte naturelle. Le taux de réussite est de 92 % en comptant les retours. La productivité atteint 2,13 agneaux par brebis. "Depuis deux ans, je pratique de plus les luttes sur colza fourrager, ce qui fait un gros flushing. Sur le lot de mars, la productivité est de 2,5 en 2022, mais il y a beaucoup de pertes. La mortalité est en moyenne de 22 % et atteint parfois 30 %. Cela fait aussi plus de travail pour les agnelages, l’allaitement artificiel. L’idéal pour moi est de deux voire trois agneaux par brebis. » Fabien Genouel garde donc son renouvellement sur les mises bas de décembre et de mars, avec 50 % de béliers Île-de-France et 50 % de béliers Charollais. « La Romane est trop prolifique pour moi », souligne-t-il. Au final, l’éleveur a produit 1 069 agneaux en 2021, avec une autonomie en concentré de 76 %, une autonomie protéique de 79 %, un coût de production total de 8,9 €/kg carcasse et des résultats permettant un EBE de 87 000 euros. A l’avenir, il veut toutefois remettre du maïs, qu’il avait supprimé, pour faciliter les rotations, en vendant la production ou en utilisant éventuellement le grain. Et il s’inquiète aussi du coût croissant du film plastique d’enrubannage. « En 2021, le rouleau pour 30 bottes coûtait 78 euros, ce qui représentait une charge de 2400 euros, avec aussi 450 euros pour le filet, précise-t-il. En 2022, le moins cher que j’ai trouvé coûtait 99 euros le rouleau. »

Vente en démarches qualité

Fabien Genouel commercialise ses agneaux via l’OP Ter’Elevage. En 2021, 88 % ont été vendus en label rouge Brocéliande (52 %), CCP SVA ou sous la marque Celtes, qui permet une valorisation des agneaux labellisables mais non labellisés. Il vend aussi un peu d’agneaux à deux bouchers et en vente directe. 27 % des carcasses sont classées U, 71 % R, 2 % O et 2 % en gras. De 2019 à 2021, le poids moyen des agneaux est passé de 18,4 kg carcasse à 19,6 kg. « J’essaye d’avoir de gros agneaux à la naissance, précise-t-il. Et ces agneaux plus lourds ne sont pas plus gras. »

Alain Gouedard, conseiller ovin à la Chambre d’agriculture de Bretagne

« Un élevage autonome et économe »

 

 
Alain Gouedard, conseiller ovin à la Chambre d’agriculture de Bretagne
Alain Gouedard, conseiller ovin à la Chambre d’agriculture de Bretagne © V. Bargain

 

« Les bons résultats de Fabien Genouel sont d’abord liés à une bonne productivité numérique. L’élevage est aussi très autonome et économe en concentré et correcteur azoté, grâce à la production de céréales, à un enrubannage riche en azote et à une bonne production laitière des brebis. Le fait que Fabien soit équipé pour faire l’enrubannage fait qu’il peut récolter l’herbe au bon moment. Au final, la consommation totale de concentré n’est que de 263 kg par brebis et 6,3 kg par kg de carcasse produit, alors qu’elle se situe souvent autour de 8 kg dans la région. »

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