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Mal-être en agriculture : à quoi servent les sentinelles et comment sont-elles formées ?

L’agriculture est l’un des secteurs professionnels les plus touchés par le suicide. C’est pourquoi différentes actions ont été mises en place pour repérer le mal-être des agriculteurs. Mettre en avant la force du collectif était le thème de la 3e rencontre des réseaux professionnels de l’accompagnement  qui s’est tenue ce 18 juin à Paris. L’occasion de faire le point sur les aides apportées.

3e journée mal être
Les sentinelles sont chargées de repérer les agriculteurs en souffrance et de les orienter vers des aides adaptées.
© Pixabay

Lors de la troisième journée organisée par la MSA, la FNSEA, JA, Chambres d’agriculture France, Crédit Agricole, Groupama et la Coopération agricole, différents acteurs de la prévention du mal-être en agriculture ont pris la parole ce 18 juin à Pris.

Mais quelle est la définition du mal-être agricole ? Selon François-Régis Lenoir, docteur en psychologie sociale, psychologue et agriculteur, il ne s’agit pas d’un burn-out s’apparentant à un stress professionnel lié à l’épuisement. Il s’agit plutôt de quelque chose de plus diffus. « Nous cumulons tous des références que nous plaçons à un certain niveau. Lorsque le niveau des références est inférieur à celui que se fixe chaque personne, il engendre un mal-être » explique-t-il en mettant en avant plusieurs facteurs clés pour lutter contre ce fléau : conscientisation, détection précoce et prévention.

Lire aussi : Mal-être des agriculteurs : la mise en place de la feuille de route dans les départements s’accélère

 

Repérer les personnes en souffrance et les orienter vers une aide appropriée

Aujourd’hui, le sujet de la santé mentale commence à sortir des tabous et des actions sont menées pour venir en aide aux agriculteurs en difficulté. La MSA a mis en place il y a cinq ans  les réseaux Sentinelle afin de repérer les personnes en souffrance et les orienter vers une aide appropriée. Les sentinelles sont des personnes volontaires et majeures vivant en milieu rural et dont l’anonymat est préservé. Elles peuvent être des professionnels ou non, retraités, élus MSA ou locaux, salariés d’organisations agricoles, conseillers en prévention, travailleurs sociaux, vétérinaires

Lire aussi : Mal-être en agriculture : où en est-on ?

 

5 089 sentinelles en France 

Les sentinelles constituent un relais entre la personne en difficulté et les structures spécialisées en soins, aide sociale ou économique. De par leur contact quotidien avec le monde agricole, elles peuvent être amenées à détecter des situations de détresse ou de mal-être, repérer des signes précurseurs et intervenir en amont. Elles repèrent, écoutent, évaluent et orientent des personnes en situation de mal-être, voire en risque suicidaire. Pour ce faire, elles suivent une formation spécifique, dispensée par des professionnels, qui leur donnent les clefs pour agir, les aident à mieux repérer les situations, et dans laquelle elles apprennent les dispositifs d’accompagnement existants. 

Aujourd’hui le réseau comprend 5 089 sentinelles en France, l’objectif fixé est donc atteint.

Lire aussi : Le Réseau agri-sentinelles pour favoriser la prévention du suicide

 

Une formation reconnue comme positive

« Il s’agit d’un déploiement hétérogène lié à des liens plus ou moins étroits et historiques avec les ARS, à la disponibilité des formateurs, au vivier des sentinelles » explique Frédérique Jacquet-Libaude, responsable de département Instances et Pilotage MSA. Une étude qualitative menée par BVA en février 2024 montre que la formation sentinelle est reconnue comme positive. Mais de nombreuses limites au déploiement existent : difficultés à faire former les formateurs avec des tarifs de plus en plus élevés et à recruter des sentinelles

Autre difficulté : des formateurs externes intéressés mais qui ne connaissent pas le monde agricole. Il apparaît aussi qu’une animation de réseau est nécessaire, complémentaire au dispositif de recours et supervision. 

« Le tabou se lève grâce aux Nima »

« Il faut arriver à déployer massivement la formation des sentinelles et mettre toutes les forces en commun  devant cet enjeu de société » estime Dominique Chargé, président de la Coopération agricole pour qui le mal-être est « encore tabou », notamment à cause du « jugement des pairs » mais qui se lève grâce à « l’arrivée dans la profession des personnes non issues du monde agricole ».

« Savoir écouter c’est savoir se taire »

Henry Jouve, président MSA Ardèche Drôme Loire est sentinelle. Il témoigne : « L’engagement est important et il ne faut pas avoir peur. La sentinelle doit se positionner dans une situation d’écoute, s’écarter du jugement, faire preuve d’empathie, de sympathie, de bienveillance et de partage. Il faut accepter de donner du temps, dédiaboliser tous les sujets et bien avoir à l’esprit que savoir écouter c’est savoir se taire ».

 

Former les personnels en contact avec les agriculteurs

Tous les organismes en contact avec les agriculteurs reconnaissent la nécessité d’avoir des personnes formées pour repérer et signaler les personnes en difficulté. Ainsi, avec l’instauration en 2020 du dispositif « Coup dur » qui est lancé lorsque l’agriculteur est confronté à une difficulté majeure, les responsables du Crédit Agricole ont ressenti la nécessité de former les chargés de clientèle qui peuvent ainsi orienter une agriculteur en difficulté vers une cellule sentinelle.

Lire aussi : Le risque de mortalité par suicide s’accroît chez les exploitants agricoles

 

Une aide au répit administratif

Anne Gautier, vice-présidente de la CCMSA explique que de nouvelles études confirment l’existence d’un surrisque du phénomène suicidaire dans le monde agricole et un accroissement de ce surrisque, notamment lors des transmissions. Le risque suicidaire est nettement  supérieur pour les 65 ans et plus, notamment pour les non-salariés. « Pour aller de mieux en mieux , il faut en parler de plus en plus » martèle-t-elle. La MSA a redéployé en 2024 des moyens humains pour créer une équipe dédiée au pilotage de la prévention du mal-être agricole et des moyens financiers avec notamment la création d’une aide au répit administratif.

Lire aussi : Une aide au répit administratif pour les agriculteurs : la MSA mobilise 28 millions d’euros

Lire aussi : Mal-être en agriculture : faire appel au service de remplacement pour prendre du répit

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