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Alimentation animale : les coops « prisonnières du végétal »

Les fabricants français d'aliments composés ont vu le prix du blé en disponible augmenter de plus de 50 % en 6 mois, entre juin et novembre, et le tourteau de soja de près de 30 % sur la même période.

Le Brésil a tous les atouts, la France toutes les contraintes ; telle est la vérité qui s’est présentée jeudi dernier à Paris aux congressistes de l’assemblée générale du Syncopac. Le Brésil est doté d’un grand potentiel en élevage de bovins, de volailles et de porcs et d’une « adaptabilité formidable » a signalé François Luguenot, analyste chez le négociant international Louis Dreyfuss. « Ils pourraient même produire du poulet de Loué(Sic) », s’est-il aventuré.

Le Brésil devient aussi un opérateur majeur du marché du soja et un fournisseur potentiel de maïs, a souligné l’expert. Ainsi, non contents de constituer la moitié des importations communautaires de viande de volaille, les Brésiliens sont arrivés à exporter l’an dernier 25,3 Mt de graines de soja et 17,0 Mt de tourteaux de soja (prévisions), contre seulement 15,5 Mt et 10,9 Mt trois ans plus tôt. Une position dominante puisque la demande mondiale de soja se maintient même quand l’offre fluctue. « Les Brésiliens vont nous prendre en otages sur les matières premières et sur les produits finis », s’est alarmé Alain Melot, président de la Fédération des industries avicoles.

Comparativement, la France, avec son déficit en protéines végétales, ses salaires forcément plus élevés et ses contraintes réglementaires de tous ordres, est comme ligotée. Des exigences chaque année plus draconiennes en faveur de la sécurité alimentaire, de l’environnement ou du bien-être animal « plombent nos comptes », a regretté Jean-Claude Prieur, président de la section Abattage-transformation de la FNCBV (Fédération Nationale des coopératives Bétail et Viandes), sans compter la nouvelle taxe d’équarrissage et la prochaine redevance sur les matières azotées achetées par les éleveurs.

Le « principe d’inhibition » français

Patrice Gollier, directeur de la nutrition animale du groupe In Vivo, a stigmatisé le « principe d’inhibition » français, qui consiste à appliquer avec zèle le principe de précaution quand l’Espagne l’applique avec pragmatisme. L’Espagne, qui ne s’embarrasse pas de restrictions au soja et au maïs OGM et qui a moins de contraintes environnementales, est le premier pays producteur d’aliments pour porcs en 1998, et elle a stabilisé sa production en 2003 quand celle de ses concurrents déclinait.

Comme d’autres intervenants, le dirigeant a appelé à « fuir la sur-qualité ». « Nous sommes le pays qui nous mettons le plus de boulets aux pieds », a illustré Alain Melot, inculpant de complicité la « non-compétitivité administrative française » dans le fait que le poulet brésilien est 50 % moins cher que le français.

Ces cris du cœur sont lancés alors que l’élevage européen a connu une hausse historique de ses matières premières. Les fabricants français d’aliments composés ont vu le prix du blé en disponible a augmenté de plus de 50 % en 6 mois, entre juin et novembre, et le tourteau de soja de près de 30 % sur la même période. L’indice IPAA des matières premières pour l’élevage a progressé de près de 40 % sur la même période. Encore heureux que la flambée du soja ait été tempérée par la valorisation de l’euro face au dollar américain. Au Syncopac, l’on prévoit une répercussion de ces hausses sur les prix des aliments jusqu’à cet été.

A entendre l’expert de chez Louis Dreyfuss ou le responsable d’InVivo, le déficit européen en protéines végétales (pois, tourteaux de colza…) est difficilement remédiable. L’exportation de blé demeure la grande vocation des grandes cultures en France. D’autres ressources existent-elles, la protéine de coton par exemple ? Peu d’idées ont été émises. Patrice Gollier et d’autres responsables de la coopération ont appelé à mettre en branle une politique européenne, mais surtout mettre à profit le carrefour entre le végétal et l’animal que représentent les fabricants d’aliments, en ouvrant par exemple des chantiers mettant en relation l’alimentation et la qualité gustative des produits animaux.

L’utilité des co-produits animaux a été évoquée du bout des lèvres. Non pas les sous-produits de l’équarrissage, mais les produits comestibles issus de l’alimentation humaine. L’efficacité, la qualité même le requiert. Les porcs et les volailles ne sont pas végétariens. Plusieurs pensent qu’il faut « relancer ce débat-là, oser en parler aux consommateurs ». Eric Dumoulin, chef du bureau Porcs et Volailles de la DPEI, ardent défenseur du haut niveau d’exigence français, paraissait en douter.

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