Le PCV2d occupe de plus en plus de place parmi les circovirus porcins
Le PCV2 mute vite ; de nouveaux génotypes apparaissent. Cette évolution est scrutée à Labocea-Ploufragan depuis 2018. Elle confirme que c’est le PCV2d qui domine aujourd’hui. Éloigné du PCV2a, il impose de s’interroger sur les conséquences de son émergence.
Le PCV2 mute vite ; de nouveaux génotypes apparaissent. Cette évolution est scrutée à Labocea-Ploufragan depuis 2018. Elle confirme que c’est le PCV2d qui domine aujourd’hui. Éloigné du PCV2a, il impose de s’interroger sur les conséquences de son émergence.
La première description du PCV2d en France, dans un poster au congrès européen de médecine vétérinaire porcine (ESPHM) de 2017 , avait été faite dans le cadre d’une suspicion d’échec vaccinal. Ce cas clinique s’était déroulé sur 2015 et 2016 et les virologistes porcins de l’Anses-Ploufragan Plouzané étaient cosignataires de cette communication.
Évolution génétique
Le PCV2d est l’un des génotypes du Circovirus porcin de type 2 (PCV2). Le PCV2 compte quatre génotype (nommés de a à d), plus deux (e et f) en cours d’homologation. C’est un phénomène original parmi les virus à ADN : le génome du PCV2 évolue à une allure élevée, comparable à celle des virus à ARN (comme les Coronavirus, par exemple…), et cette évolution se poursuit. Le virus “historique”, du groupe ‘a’ (le PCV2a) correspond à celui mis en évidence lors de l’émergence de la maladie de l’amaigrissement du porcelet, en 1996. Il est à la base des vaccins contre le PCV2 actuellement disponibles sur le marché.
Étude en continu
Sur les 5 dernières années, plusieurs continents ont observé l’apparition du PCV2d. Ce qui, avec la confirmation de la présence du PCV2d en Bretagne, a incité les vétérinaires de Labocea-Ploufragan à évaluer dès 2017 la présence de ce génotype en France. Un travail réalisé en continu « et toujours avec la même méthode : d’abord une PCR PCV2 quantitative pour déterminer la présence et la quantité du PCV2 dans la matrice analysée, puis une PCR de "pré-séquençage" pour amplifier l’ ORF2 (gène codant pour la protéine de la capside du virus) et ensuite le séquençage, qui permet de distinguer les PCV2 a, b, c et d », précise Marie-Agnès Baudouard, cadre technique de l’unité PCR. Les premiers résultats de cette recherche ont été publiés à l’ESPHM de 2018 : entre mai 2016 et juin 2017, le PCV2d apparaissait déjà comme important, avec 18 sur 32 souches, et 14 PCV2b. « Comme il ne s’agit pas d’un échantillon représentatif des élevages français, l’interprétation de ces données était limitée » et demandait confirmation.
Données actualisées
Ces travaux ont été poursuivis, à l’initiative du laboratoire pharmaceutique Zoetis, sur 48 souches issues de cas terrains français soumis entre 2018 et 2020 à Labocea-Ploufragan, dont les résultats devaient être publiés à l’ESPHM 2020 – reporté à ce printemps. Ils confirment que le PCV2d devient dominant en France, avec 16 des 31 souches de 2019 et 7 des 12 du premier semestre 2020 (avec 1 seule souche de PCV2a chacune de ces années). Sur cette période, 37 des 48 souches provenaient de Bretagne.
Lien avec la clinique
Dans une étude menée pour essayer de mieux comprendre quelle était la clinique associée au PCV2d en France et publiée à l’ESPHM en 2018, les auteurs ont attribué une note clinique (de 0 à 10) à chacun des 30 cas pour lesquels l’historique était disponible. Le PCV2d était plus souvent associé à un note clinique sévère (en moyenne 7,8 contre 6,2 pour les cas avec PCV2b) et liée surtout à une perte de poids et/ou du dépérissement. « En revanche, pour le volet le plus récent de ce suivi, les motifs de soumission étaient trop peu détaillés pour analyser le lien du PCV2d avec la clinique, même si les causes de perte de poids et/ou dépérissement étaient souvent indiquées », détaille la Dre Silvia Turci (Labocea-Ploufragan).
Protection vaccinale
Ces éléments confirment la place du PCV2d parmi les PCV2 identifiés dans les pays européens à production porcine importante, décrite récemment par l’équipe du Pr Joaquim Segalés (université de Barcelone). En revanche, il n’y a pas de consensus scientifique sur l’origine du PCV2d. « Pour certains auteurs, le fait d’avoir vacciné une très large majorité des animaux en production avec des vaccins contenant un autre génotype pourrait avoir favorisé une sous-population de virus PCV2 différente », résume la Dre Silvia Turci. D’autant que des travaux récents montrent que les épitopes (régions du virus reconnues par les lymphocytes T) contenus dans les vaccins ne recouvrent pas tous ceux des souches du terrain (161 souches de tous les génotypes ont été analysées). Ils confirment ainsi que les vaccins ne fournissent qu’une protection croisée partielle, pouvant expliquer, avec la rapide évolution génétique des virus PCV2, la persistance d’une infection au moins subclinique en élevage et une pression de sélection vers un génotype échappant à cette protection.