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Sécheresse estivale
Le pâturage hivernal, une piste d'adaptation face à la sécheresse

Plus qu’une opportunité, le pâturage hivernal pourrait devenir une pratique d’élevage courante. Dans un contexte où le réchauffement climatique brouille les données météo, trois fermes expérimentales du grand ouest ont décidé d’évaluer concrètement cette conduite.

Veaux au pâturage à la ferme expérimentale de la Blanche maison à Pont-Hébert (50).
© DB

« Le chiffre le plus emblématique de cet essai est celui de la croissance des bœufs et des génisses, avec une moyenne de 650 g de GMQ/jour pour du pâturage hivernal qui a duré deux mois et demi », confie Lucie Morin, directrice de la ferme expérimentale de la Blanche Maison à Pont-Hébert dans la Manche. Avec la ferme expérimentale de Trévarez et celle de Thorigné d’Anjou, La Blanche Maison a mené l’essai durant les hivers 2021 et 2022. Objectif : recueillir des données chiffrées sur cette pratique, « qu’on faisait depuis plusieurs années sur des lots de bœufs » mais sans évaluation. Races, chargements, impacts sur le couvert et la repousse printanière, volume de production valorisée et enfin, croissance des animaux ont été passés au crible de l’analyse.

Un contexte climatique changeant

Si les freins à la conduite du pâturage hivernal sont parfois rédhibitoires, comme l’excès d’eau qui rend les sols peu ou pas portants, ou encore les conséquences du piétinement sur la repousse, le contexte climatique a évolué. « De plus en plus, on a une production d’herbe l’hiver et de moins en moins sur la période estivale », relève Lucie Morin. Un constat établi par les trois fermes (voir graphiques). Dans la Manche, « la pousse devient rare en août et en septembre, sauf dans des prairies riches en légumineuses, alors qu’on peut pâturer tous les hivers maintenant ».

 

Sans impact sur la repousse

Une des questions de départ était de s’assurer que le pâturage hivernal ne condamne pas la repousse printanière. Or, il a été constaté que, si la productivité est plus faible au 1er cycle après le pâturage hivernal, il n’a pas d’effet délétère sur la productivité totale. Au contraire, l’herbe printanière semble même être de meilleure qualité du fait de la valorisation de l’herbe d’hiver, « on a eu une herbe de printemps très jeune avec un temps de repousse de trente jours et de très bonne qualité », se réjouit la directrice.

D’autre part, le pâturage hivernal a eu peu d’effets sur la composition botanique des prairies, et ce, pour toutes les variétés, y compris les graminées et les légumineuses.

 

 

Une production bien valorisée

« On a de très bonnes valeurs alimentaires de l’herbe et une production importante. En moyenne, plus d’une tonne de matière sèche a été valorisée à l’hectare », se félicite la directrice de la ferme normande où 8,8 kg de matière sèche/animal par jour ont été valorisés en pâturage libre et 8,6 kg MS/animal/jour en pâturage tournant. Dans les trois fermes, l’analyse de l’herbe affiche des teneurs en MAT et CB élevées, ce qui explique le chiffre de croissance moyen de 650 g de GMQ/jour sur l’ensemble de l’essai.

Une expérimentation à poursuivre

« Les conditions météo ont été favorables », avise Lucie Morin : avec 30% de précipitations en moins sur l’hiver que la moyenne des cumuls sur 30 ans, elles ont permis d’allonger le pâturage à deux mois et demi et d’éviter le piétinement des prairies. « C’est aussi un gain économique puisqu’on n’a plus de distribution d’aliment et moins de charges mécaniques liées à la récolte des fourrages qui auraient été distribués », pointe Lucie Morin, ajoutant l’économie du temps de travail.

 

Les détails du dispositif : la gestion du pâturage

Thorigné d’Anjou (49)

20 bœufs Limousins et bœufs/génisses croisés Limousin/Angus de 12 à 24 mois en croissance

Pâturage tournant sur 5 jours adopté

0,5 UGB/ha

7 UGB/ha instantané

Composition de la prairie : fétuque élevée, RGA, TB, TH, lotier.

La Blanche maison (50)

15 bœufs Normands de 12 à 24 mois en croissance

Pâturage libre avec 1 UGB/ha, soit 1 UGB/ha instantané

Pâturage tournant sur 5 jours avec 1 UGB/ha soit 8 UGB/ha instantané

Prairie permanente et temporaire ray-grass anglais, fétuque, trèfle blanc, trèfle violet, trèfle hybride.

 

Ferme de Trévarez (29)

12 génisses Prim’Holstein gestantes de 19 mois et 5 génisses croisées gestantes de 20 mois

En conventionnel, pâturage tournant sur 10 jours avec 0,3 UGB/ha soit 2,85 UGB/ha instantané

En bio, pâturage tournant sur 15j, avec 0,8 UGB/ha soit 2,85 UGB/ha instantané sur prairie temporaire ray-grass anglais, trèfle blanc

 

Plus loin

[VIDEO] Changement climatique: le pâturage hivernal en alternative?

Le pâturage hivernal est une pratique d’avenir

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