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Lait bio : Un début d'année sous tension

La consommation de produits laitiers bio est un peu moins dynamique. Les appels à modérer la production laitière printanière se sont multipliés dans l'Ouest. Le prix du lait Lactalis baisse au deuxième trimestre. Mais d'autres opérateurs restent optimistes.

Comme chaque année, le printemps est une période délicate à passer en lait de vache bio, avec un pic de collecte marqué et des déclassements en conventionnel. Mais l'année 2021 semble plus sous pression à cause d'une demande un peu moins dynamique qu'entre 2018 et 2019. La croissance du marché évoluerait moins vite que les conversions et les nouveaux arrivages de lait bio. 

Dès le mois de mars, le réseau Fnab Ouest (Bretagne, Pays de la Loire, Normandie) a appelé à modérer voire à réduire la production. Biolait (1 400 fermes partout en France, près de 300 millions de litres collectés) a actionné un dispositif de maîtrise des volumes printaniers, comme d'autres années. L'OP lait bio Seine et Loire – 430 fermes livrant Lactalis, Danone, Sill, Saint Père, Montsûrs, Triballat Noyal – a appelé à modérer la production sur avril et mai, pour espérer maintenir a minima le prix du lait sur l'année au niveau de 2020. « Cette année, c'est surtout Lactalis qui est concerné. Ils ont des problèmes d'excédents déclassés. Et une moins bonne valorisation de leurs produits sous MDD (marque de distributeur). Nous leur avons proposé une baisse de 5 % des livraisons sur avril et mai (par rapport à avril et mai 2020), en échange d'un maintien du prix 2020 en 2021, au moins sur le premier semestre », indique Ivan Sachet, animateur de l'OP.

Une baisse du prix du lait bio

Mais pour Lactalis, ce n'est pas suffisant. Le groupe a annoncé une baisse de son prix du lait bio : -11,66 €/1 000 l sur le deuxième trimestre (/2e trim. 2020) pour les adhérents de l'OP Seine et Loire (et -13 € dans le Grand Est). « Nous ne sommes pas d'accord, mais nous ne pouvons pas le dénoncer ; il rentre dans le cadre contractuel qui prévoit la possibilité de baisser jusque -3 % le prix de base bio objectif annuel issu de la formule (479 € en 2021), en cas de déséquilibre de marché, ce qui sera le cas sur le printemps 2021. Par contre, nous n'accepterons aucune diminution sur le second semestre », indique Ivan Sachet. Ce que craignent les producteurs, c'est le mauvais signal que représente cette baisse du plus gros transformateur laitier bio (600 fermes environ, 207 millions de litres collectés).

Biolait avait déjà décroché en 2020 : 452 €/1 000 l prix réel payé, contre 470 € en 2019. « Certains clients ont été impactés par la Covid-19. Grâce à notre dispositif de réduction de l'offre au printemps, les excédents ont pu être limités, mais malgré tout, les excédents déclassés en conventionnel sont passés de 5 % habituellement à près de 10 % au printemps 2020. Puis, la dynamique de consommation s'est essoufflée durant l'été », énumère Ludovic Billard, président de Biolait, qui ne s'attend pas à une grosse amélioration en 2021. « Des clients ont mis leurs nouveaux projets à venir sur pause. »

Mais d'autres soutiennent le prix du lait

Chez Sodiaal (480 €/1 000 l en 2020), le prix du premier trimestre 2021 est stable – toutes primes, toutes qualités, 38/32 –, et le lait entier en progrès, compte tenu de la revalorisation des grammes différentiels.

Chez Eurial (488 € en 2020, hors ristournes), le premier semestre 2021 sera supérieur au premier semestre 2020, et le deuxième semestre est prévu stable (/2e semestre 2020). « Les difficultés liées à la pandémie sont réelles. Chez nous : perte de débouchés en RHD, moins d'exportations notamment sur la fraction protéique. Nous avons peu senti la baisse des ventes en ultrafrais grâce à la dynamique de notre marque Les 300 laitiers bio, mais les prises de commande ont diminué en MDD depuis l'été 2020. Néanmoins, nous restons optimistes car la consommation reste en croissance », indique Bruno Martel, président du conseil lait de vache bio chez Agrial. 

L'OP lait bio Seine et Loire indique que les cinq autres laiteries avec qui elle travaille se sont engagées soit sur un objectif de maintien du prix du lait, soit sur une hausse, sur l'année 2021. L'OP ne compte pas en rester là et interpelle l'interprofession et notamment son collège distributeurs. « Il faut absolument réussir à construire un prix en « marche avant"» à partir du prix de revient, tel que prévu par la loi Egalim, et ne pas perdre le fruit du travail de plusieurs années sur la valorisation du lait bio. »

Coup de frein sur les conversions

Signe que les laiteries sont prudentes, une majorité comme Lactalis, Agrial, Sodiaal, ont mis les conversions sur pause, hormis quelques exceptions pour les jeunes installés notamment.

« Les choses peuvent vite évoluer dans l'autre sens, prévient Ludovic Billard. Si la demande repart, on peut vite se retrouver en déficit. » À ce sujet, la loi Egalim a inscrit l’exigence de 50 % de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques. Elle s’appliquera au 1er janvier 2022 et concernera la restauration collective des services publics. « Si elle s'applique bien, les produits laitiers bio devraient en profiter dès la fin de cette année », espère Bruno Martel.

Parmi les signes positifs, quelques laiteries avancent dans leurs projets de valorisation, comme Triballat-Noyal qui a conclu un contrat cadre avec l'OP lait bio Seine et Loire concernant 51 adhérents ; avec un engagement sur le commerce équitable. "C'est la marque Tante Hélène qui le portera. L'engagement porte notamment sur une formule de prix du lait, avec un prix de revient qui pèse pour 50% dans le prix. Et un prix de base minimum garanti sur 3 années à 470 €/1000 l, plus une revalorisation de la matière grasse à 5€/gramme depuis 2020", indique Ivan Sachet.

À retenir

Sur l'année 2020, le prix du lait bio – toutes primes, toutes qualité, en 38-32 – publié par FranceAgriMer atterrit à 461,3 €/1 000 l, à peu près stable par rapport à 2019. La baisse du prix Biolait est compensée par la hausse des autres opérateurs. On peut s'attendre à une diminution sur le premier semestre 2021.

Des ventes un peu moins dynamiques

En grande distribution (e-commerce compris), les ventes en volume 2020 par rapport à 2019 ont été un peu moins dynamiques qu'en 2019 par rapport à 2018, sauf pour le lait conditionné, qui a bénéficié à plein de l'effet confinement :

+8,2 % pour le lait conditionné (+3,7 % en 2019 par rapport à 2018, en volume).

-2,9 % pour l'ultrafrais (+14,9 %). Cette baisse a débuté fin 2019. « Plusieurs explications : l'UF, moins stockable que le lait UHT, le beurre, la crème UHT, a moins profité de l'effet confinement ; des prix en légère progression (+1 à +3 %) qui auraient engendré un report sur l'ultrafrais non bio, qui a connu une légère croissance », indique Antoine Auvray, du Cniel.  

+6,9 % pour le beurre (+19 %).

+12,9 % pour le fromage (+25,6 %).

+11,2 % pour la crème (+23,6 %).

La restauration hors domicile (RHD) qui s'était développée en 2019 (+15 % / 2018) a subi un sérieux revers en 2020 (pas encore de chiffres). La catégorie ultrafrais est la plus représentée sur ce débouché : 50 % en valeur en 2019 (Source : GirafoodService).

La collecte poursuit sa croissance

Moins de conversions. Le nombre annuel de conversions en démarrage est passé de 388 sur la période novembre 2017-octobre 2018, à 343 sur la période 2018-2019, et à 297 sur 2019-2020. « Le rythme des conversions baisse, mais reste supérieur à la période 2010-2015 », précise Antoine Auvray, du Cniel.

Le nombre d'exploitations laitières bio continue de progresser, car en parallèle il y a peu de cessations d'activité déclarée en bio. Il y avait 3 693 exploitations bio déclarées en janvier 2020 et 3 892 en janvier 2021, soit une hausse de 5,4 %.

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