Unifa
L’industrie française des fertilisants toujours en quête de compétitivité
La progression du chiffre d’affaires 2011 dissimule la chute des livraisons d’engrais qui n’a cessé de s’accentuer tout au long de la campagne.
« Nous ne pouvons pas courir le cent mètres avec des chaussures de plomb. » C’est en ces termes que Gilles Poidevin, le délégué général de l’Union des industries de la fertilisation (Unifa), a conclu son allocution de clôture de l’assemblée générale du syndicat professionnel, qui s’est déroulée le 8 juin à Paris. Malgré le fort niveau d’investissement que les entreprises ont consenti –plus de 60 M€ par an sur les cinq dernières années– pour améliorer la productivité, la sécurité environnementale, la qualité des produits et la performance logistique, l’industrie française des fertilisants souffre toujours d’un différentiel de compétitivité sur ses concurrents étrangers. Il trouve son origine dans un contexte réglementaire qui la pénalise et alourdit ses charges d’exploitation.
Des livraisons d’engrais en fort recul
Les 47 adhérents de l’Unifa ont réalisé en 2011 un chiffre d’affaires de 2,8 Md€. Sans retrouver le niveau record de 2008, à 3,6 Md€, les ventes de fertilisants en France progressent cependant de 28 % en valeur par rapport à celui de 2010. Cette amélioration cache un repli des tonnages livrés sur la même période par les entreprises “premier metteur en marché” (adhérent ou non à l’Unifa) : -4,5 % en engrais azotés (1,923 Mt), -8,1 % en engrais phosphatés (100.400 t) et -11,6 % en engrais potassiques (282.500 t), d’après des données du syndicat. Le retard « préoccupant » des livraisons d’engrais minéraux sur la première moitié de la campagne 2011/2012, comme l’indique l’Unifa dans sa tendance à fin décembre, n’a fait qu’empirer durant les quatre mois qui ont suivi. Ainsi les livraisons cumulées sur janvier-avril 2012 sont « en forte baisse (-67 %) en tonnes de produits », souligne l’Unifa dans son communiqué du 8 juin.
Cette tendance ne semble pas devoir s’inverser à court terme. Actuellement, les agriculteurs ne se précipitent guère chez leurs fournisseurs d’engrais. Il faut dire que les nouveaux prix de l’ammonitrate, fixés par les producteurs d’Europe de l’Ouest, sont en hausse par rapport à l’an dernier (Engrais : l’ammonitrate démarre en hausse). Les produits à base de phosphate et de potasse suivent le même mouvement de fermeté, sur un marché mondial fortement demandeur. La croissance de la consommation globale, estimée par l’Ifa (association internationale de l’industrie des engrais) à 2,1 % par an en moyenne au cours des cinq prochaines années (cf. ci-contre), ne devrait qu’accentuer le phénomène.
Cependant, les industriels français de la fertilisation espèrent une reprise des achats sur le deuxième semestre. D’après l’UIC (Union des industries chimiques), en 2012, « l’activité des engrais devrait être en légère hausse, bénéficiant de la bonne orientation de la conjoncture agricole ».
Une concurrence déloyale au-delà des frontières
Si leur volume d’activité ne semble pas compromis à terme, leurs marges « souffrent d’un manque de compétitivité que leur impose la réglementation », insiste l’Unifa. C’est pourquoi, afin de garantir « la pérennité de ses entreprises », le syndicat demande « la baisse des taxes et prélèvements, en particulier la suppression de la taxe carbone 2012 destinée à financer les nouveaux entrants sur le marché des quotas ».
Il suggère également « la mise en place aux frontières de l’Europe d’un mécanisme de compensation carbone pour éviter que la politique de changement climatique ne devienne une cause de “fuite de carbone”, c’est-à-dire de délocalisation ». Les productions européennes seraient alors remplacées par des productions étrangères « à contenu carbone quatre fois plus élevé ». Et ce alors que « les achats de quotas d’émission de gaz à effet de serre à partir du 1er janvier 2013 représenteront 20 % de la valeur ajoutée de la filière qui n’en sera que plus fragilisée ».