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Pain/Nutrition
La filière met les pendules à l’heure

L’Observatoire du pain a fait analyser et publier la composition nutritionnelle des principaux pains français. Ces données objectives et officielles seront communiquées via le réseau médical et les boulangeries

MISE A PLAT. Détaillées sur les paquets de céréales du petit-déjeuner, vantées dans les spots TV ou même placardés sur les murs des fast-foods, les compositions nutritionnelles des produits alimentaires sont de plus en plus mises en avant par les fabricants, encouragés par le gouvernement à guider le consommateur dans ses choix. Marketées, elles sont devenues un argument commercial à part entière. Si la valeur du pain, riche en glucides complexes, n’est plus remise en cause, sa composition détaillée est encore méconnue. Et pour cause, aucune donnée fiable n’est disponible. L’Observatoire du pain a donc cherché, en s’appuyant sur son comité scientifique, à combler ce manque d’information préjudiciable en établissant une table nutritionnelle de référence. La profession espère que le pain retrouvera ainsi la place qu’il mérite sur les tables des Français.

Les professionnels aspirent à davantage d’informations

« Les qualités nutritionnelles des produits sont de plus en plus soulignées » par les professionnels de l’agroalimentaire, fait remarquer Olivier Deseine, vice-président de l’ANMF (Association nationale de la meunerie française) et Pdg des Moulins de Bras-seuil (78). Or jusqu’ici, les données relatives au pain étaient datées et erronées.

Les chiffres disponibles étaient incomplets et établis sur des pains dont les recettes n’étaient pas précises. De plus, si « les professionnels de santé ont une bonne image du pain », comme l’assure le docteur Marlène Galantier, nutritionniste consultée régulièrement par l’Observatoire du pain, ils se disent tout de même sous-informés « en matière de composition nutritionnelle ». Pourtant, le corps médical est demandeur de ce genre d’outils. « Les tables sont notre base de travail. Nous regardons la composition de chaque aliment en glucides, protides, lipides, vitamines et minéraux », explique la nutritionniste. Ces documents « nous permettent de réintroduire le pain dans l’alimentation, alors que des familles l’ont totalement supprimé ». Si certains l’ont évincé pour des raisons pratiques, d’autres « le pensent toujours trop riche. Si on leur met devant le nez des données concrètes pour leur prouver qu’il apporte de bons glucides, ils sont convaincus ! »

L’Observatoire du pain s’est donc lancé dans un chantier d’envergure : recalculer toutes les valeurs nutritionnelles des pains français et établir des fiches de référence. « Il a fallu faire un tri dans l’univers varié des pains » hexagonaux, explique Olivier Deseine. Cette étude permet d’avoir une gamme de pains assez large. Les baguettes issues de farines T65, qui représentent près de 80 % des ventes, ont bien sûr été passées à la moulinette des laboratoires, mais également des baguettes de T80, des pains complets, aux céréales, au seigle, au levain… « Nous avons cherché, avec le comité de meuniers et boulangers, à avoir un éventail reflétant le mieux l’offre disponible en boulangerie », assure Olivier Deseine. Pour être le plus représentatif possible, « nous avons ensuite sélectionné un panel de moulins, de localisations et tailles variées, dont les farines ont été mélangées ». Ces dernières, comme les pains, ont été analysées par les laboratoires Eurofins, accrédités Cofrac.

Quelque 700.000 dépliants diffusés au grand public via les cabinets médicaux

Après plus d’un an de travaux, les fiches sont prêtes ! L’ensemble du corps médical recevra fin juin les tables de composition nutritionnelle assorties d’un document d’aide à la consultation. Les fiches, qui permettront de réactualiser les données du Ciqual, référence en la matière, présentent, d’une part, la répartition en énergie, macro et micronutriments. Elle répertorient d’autre part les éventuelles allégations nutritionnelles auxquelles les différents produits ont droit. Ainsi, tous les pains peuvent se prévaloir de la mention “source de” protéines et de fibres. De même, tous les pains sont très riches en glucides complexes. Ces documents parviendront aux médecins et nutritionnistes accompagnés de la newsletter trimestrielle de l’Observa-toire du pain. Cette 4e édition sera dédiée aux résultats de l’étude qui devrait par ailleurs faire l’objet d’une publication scientifique dans les prochains mois. Début juillet, quelque 700.000 dépliants à l’approche plus pédagogique seront mis à disposition des consommateurs, dans les salles d’attente des cabinets médicaux. Ils seront diffusés durant trois à six mois, selon la demande.

Un outil pour tenter de réhabiliter le pain au quotidien

« Nous souhaitions tordre le cou à certaines idées reçues et donner une base objective », et donc indiscutable, de la valeur nutritionnelle des pains,explique Olivier Deseine. « Il n’y a pas eu de surprise dans les résultats », si ce n’est, contrairement à ce que l’on peut entendre, qu’ « il y a peu de différence entre les pains fabriqués à partir de T65 et ceux de T80 ». Ce dernier présente tout de même un léger apport en fibres supplémentaire, qui « le classe dans la même catégorie que la baguette courante ou la baguette de tradition française ». Et le meunier yvelinois de préciser : « Tous les pains sont bons. Il n’y en a pas de meilleur, chacun ayant son avantage. Il est d’ailleurs important de jouer sur la diversité pour varier les plaisirs, en termes de goût comme d’apport nutritionnel ». L’Observatoire du pain s’est donc attaché, lors de la conception des supports de communication, à valoriser tous les pains.

Cette étude permettra aux meuniers de « mieux connaître leurs produits et donc d’améliorer leur argumentaire, mais également d’avoir une référence pour d’éventuels examens complémentaires », dans le cadre de la R&D notamment. « Nous voulions aussi motiver le boulanger à parler de la valeur de ses pains » en lui fournissant des éléments intelligibles au plus grand nombre. Contrairement aux céréales pour petit-déjeuner ou biscuits, il est difficile pour le boulanger de disposer d’un emballage par type de produit pour y faire figurer leur composition nutritionnelle. Il fallait donc trouver une autre solution. En septembre, ils recevront une autre série de dépliants conçus pour leurs clients. Ces documents viendront appuyer la campagne “Du pain à chaque repas”, lancée par l’Observatoire du pain en 2007 avec le soutien du PNNS.

Les nutritionnistes, et le corps médical d’une manière générale, travaillent « à la réintroduction du pain dans le quotidien. Si possible à chaque repas. Au self, au goûter ou même en sandwich, c’est toujours mieux que rien », assure le docteur Galantier. « Si les gens ne mangent pas assez de sucres lents, ils consommeront plus de gras. C’est un problème de satiété », argumente-t-elle. Pour les enfants, qui ont pris l’habitude de manger « des céréales, trop sucrées, et des biscuits, trop gras », les nutritionnistes cherchent à réintroduire le pain au goûter et au petit-déjeuner. « Il est plus équilibré, même avec du beurre, du chocolat ou de la confiture ».

L’image du pain a évolué. Sa consommation s’est stabilisée depuis plus de dix ans. Mais, avec 140 g grignotés quotidiennement en moyenne, on est encore loin des 600 g avalés dans les années 1950. Certes les mœurs ont évolué. Les Français sont notamment plus sédentaires et les modes de consommation ont changé : les repas sont souvent pris sur le pouce, et la star du déjeuner express reste le sandwich. « Il faut donc redécouvrir » l’univers du pain, estime Olivier Deseine. La prochaine étude menée par l’Observatoire du pain devrait donc porter sur les comportements des consommateurs. Par ailleurs, selon le minotier, « il y a encore un vrai flou autour des quantités et proportions absorbées ». Une étude menée auprès des jeunes montre que 15 % pensaient encore que le pain faisait grossir et qu’ils n’étaient pas capables d’évaluer la quantité qu’ils consommaient. Il y a donc encore du chemin à parcourir. « Il faut marteler le discours » lance le vice-président de l’ANMF, poursuivant : « Il faut oser dire que nos produits sont supers : bons, simples et naturels ! »

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