Marchés
Faut-il redouter la puissance céréalière indienne ?
« L’Inde commence à peser d’un poids plus important sur les marchés, notamment celui des céréales, a souligné Philippe Chalmin, professeur à l’Université Paris-Dauphine et coordinateur général de Cyclope, lors de la présentation de la 27e édition le 14 mai à Paris (cf. n°4001). Cette campagne, si on arrive à faire la jointure sur le marché du blé tendre, c’est grâce paradoxalement aux exportations de blé indien. »
Des stocks importants mais entreposés de façon précaire
Après une nouvelle récolte supérieure aux besoins, le pays se decide à exporter. Cinq, six puis plus de 7 Mt ont été avancées, rappelle le Cyclope 2013. Mais au final, les ventes indiennes ont juste « quelque peu rééquilibrer les flux » et les États-Unis vont devoir « se contenter d’exporter 28 à 30 Mt au lieu des 35 à 40 Mt qu’on évoquait au cours de l’été ». Un évènement qui s’est traduit, sur la fin de l’année 2012 et les premiers mois de 2013, « par une baisse des prix (...) cette fois dans une tendance claire ».
Les opérateurs savaient depuis de nombreux mois que l’Inde croulait sous les stocks de blé tendre (cf. tableau). Au total, ce sont « 70 Mt de stocks de céréales dont l’Inde disposait en octobre 2012 ». Un volume « qu’on estime à trois fois le niveau normal de stockage de précaution (“buffer stocks”) ». Mais « moins des deux tiers bénéficient de conditions de stockage acceptable ». Le reste va en général pourrir comme on l’a vu au Pendjab, un des deux greniers à céréales de l’Inde, « où seulement 3 Mt sur 14 seraient aujourd’hui protégées des intempéries ».
Des réserves stratégiques pour l’économie du pays
L’économie indienne « connaît aujourd’hui un trou d’air après un court rebond en 2010 ». Un moyen de relancer sa croissance consisterait à stimuler la demande en abaissant les prix intérieurs. Une mesure « à court terme » serait de mettre sur le marché domestique une partie des stocks nationaux de céréales.
Cependant, cette opération aurait « un impact politique et budgétaire » non négligeable. Elle représenterait « une dépense d’au moins deux points de PIB », étant donné les « prix élévés » auxquels ont été achetés les « stocks publics ». Une façon d’aider les agriculteurs, « qui constituent le gros des troupes électorales ».
Alors, dans la perspective des « élections générales prévues début 2014 », le Premier ministre libéral a plutôt « mis tout son poids dans des mesures chocs en faveur de l’investissement étranger ».