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« Hervé Morin n’a pas bien compris le dossier de l’agrivoltaïsme »

Thierry Vergnaud, directeur activités général de la branche « onshore » d'Iberdrola France et coprésident de France Agrivoltaïsme, répond à la Tribune d’Hervé Morin, président de la région Normandie publiée dans Le Point, et intitulée « sur l’agrivoltaïsme arrêtons le massacre ! ».

Thierry Vergnaud, directeur activités « onshore » d'Iberdrola France et coprésident de France Agrivoltaïsme.
Thierry Vergnaud, directeur activités « onshore » d'Iberdrola France et coprésident de France Agrivoltaïsme.
© Iberdrola

Quelle est votre première réaction à la lecture de la Tribune d’Hervé Morin dans le Point intitulée « Sur l’agrivoltaïsme arrêtons le massacre ! » ?

Thierry Vergnaud : On pense qu’Hervé Morin n’a pas bien compris le dossier de l’agrivoltaïsme, les sujets de la politique énergétique et plus généralement les besoins énergétiques de la France. On pense qu’il y a une incompréhension. Plusieurs éléments cités dans sa tribune sont faux.

Lorsqu’il dit « l’agrivoltaïsme fait partie des nouvelles absurdités de la politique française en matière énergétique », il se trompe. Pour garantir un équilibre entre l’offre et la demande énergétique en 2035 dans l’objectif de la neutralité carbone en 2050, RTE dit qu’il faudrait 65 gigawatts (GW) provenant du parc photovoltaïque contre 16 GW aujourd’hui. Le développement solaire est indispensable car avant 2035 on n’aura pas de nouveau réacteur nucléaire.

Lire : Agrivoltaïsme : « évitons le massacre ! », s’emporte Hervé Morin 

Autre affirmation fausse : Hervé Morin dit que « la France va couvrir nos espaces agricoles et nos pâturages de panneaux photovoltaïques ». Pour passer de 16 à 65 GW, on va devoir faire de l’agrivoltaïsme, car les friches sont peu disponibles, et le photovoltaïque sur bâtiment intéressant mais plus cher (104 euros du mégawatt heure le prix d’achat de l’électricité contre 85 euros pour l’agrivoltaïsme). 

Même si on poussait jusqu’à 80 GW pour l’agrivoltaïsme cela ne concernerait que 60 000 hectares, on est loin du massacre

Mais même si on poussait jusqu’à 80 GW pour l’agrivoltaïsme cela ne concernerait que 60 000 hectares, soit 0,2% de la SAU française, on est loin du massacre ! Nous sommes pour panacher les solutions entre les toitures, les friches et l’agrivoltaïsme.

Hervé Morin dit encore que l’agrivoltaïsme se développera au détriment des vaches et des moutons, c’est faux ! La finalité de l’agrivoltaïsme telle que définie réglementairement est une cohabitation entre l’agriculture et la production énergétique, les panneaux pouvant même apporter des services à l’élevage, sur le bien-être animal. La loi a été faite dans ce sens-là.

Enfin Hervé Morin dit que 4000 euros l’hectare de redevance en Normandie contribuerait à pousser les agriculteurs à arrêter leur activité d’élevage. Si l’agriculteur perçoit plus d’argent de la production d’énergie que sa production agricole cela l’amènerait à perdre son statut. C’est inscrit dans la loi, la production énergétique doit constituer un complément de revenu. Je ne pense pas que les agriculteurs se risqueraient à perdre leur statut.

Lire aussi : Agrivoltaïsme : quelles perspectives de développement au bénéfice de l’agriculture ?

Le président de Région peut-il empêcher des projets agrivoltaïques qui respectent la loi AER d’aboutir ?

De mon point de vue, non. Il peut indirectement financer des organisations qui vont faire des recours contre les projets comme le président des Hauts de France, Xavier Bertrand, le fait avec l’éolien. Ce que l’on ne souhaite pas. C’est pour cela que nous avons sollicité un rendez-vous avec Hervé Morin pour aller débattre avec lui. On veut l’aider à mieux comprendre le dossier. 

Nous avons sollicité un rendez-vous avec Hervé Morin pour aller débattre avec lui

Voir tous nos articles sur l'agrivoltaïsme 

La filière agrivoltaïque est en attente d’un décret d’application de la loi AER, attendu d’ici janvier 2024. La dernière mouture définit un taux d’emprise au sol maximal de 40% et une surface non exploitable de 10% maximum de la superficie totale couverte par les panneaux, est-ce que cette version vous convient ?

Au niveau des différents comités dans lesquels nous siégeons, il y a beaucoup de discussions autour de ces chiffres. Mais le diable est dans les détails, est-ce que l’on parle de structures fixes ou mobiles par exemple ? Nous sommes actifs dans les discussions sur les différents sujets et notamment sur la question d’une période de transition

Le décret devrait être d'application immédiate

Nous pensons que le décret devrait être d’application immédiate. Une période de transition risquerait de donner de la résonance à des projets non conformes à la loi et ça nous ne le souhaitons pas. 

Dans cette phase d’attente du décret, des projets agrivoltaïques en dehors des clous sont-ils en train d’éclore selon vous ?

Ce qui est sûr c’est que certains développeurs sont en train d’essayer de pousser à la finalisation des projets qu’ils avaient dans les tiroirs. Il y a une forte pression, ils essaient de passer en force. Mais je ne sais pas s’ils ont obtenu des autorisations. Une chose est sûre cette période transitoire n’est pas bonne. 

Lire aussi : Méthanisation : pourquoi Hervé Morin suspend toute instruction de dossier de financement en Normandie ?

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