Fraise hors-sol : le recyclage de l'eau d'irrigation et des solutions nutritives se développe
Contraint par la réglementation, le recyclage des solutions nutritives des cultures de fraise hors-sol s’est développé en Provence. Des pistes d’amélioration et des nouvelles solutions sont à l’étude.
Contraint par la réglementation, le recyclage des solutions nutritives des cultures de fraise hors-sol s’est développé en Provence. Des pistes d’amélioration et des nouvelles solutions sont à l’étude.
La station d’expérimentation de l’Aprel a pris en compte le recyclage de l’eau et des solutions nutritives dans ses programmes d’expérimentation depuis 2005 afin de permettre aux producteurs de fraises provençaux de répondre à la réglementation concernant les zones vulnérables nitrates, notamment dans la région du Comtat (Vaucluse).
Eviter les accumulations de certains ions
Entre 2012 et 2015, une étude réalisée par Daniel Izard, Chambre d’agriculture de Vaucluse et Catherine Taussig, Aprel, sur plusieurs sites de production et plusieurs variétés (Gariguette, Ciflorette, Cléry…) a permis d’avoir une approche des quantités d’eau et d’engrais apportées en culture de fraise hors-sol. Ainsi, sans recyclage, les apports moyens d’eau de forage sont d’environ 4 000 m3. Mesuré sur deux sites, le recyclage représentait respectivement 28 et 33 % des apports d’eau, soit 30 % en moyenne. « Avec recyclage et un taux de drainage de 30 %, on apporte en moyenne 2 853 m3 d’eau de forage et 1 222 m3 de solution drainée et recyclée. Le recyclage permet d’économiser 30 % d’eau », peut-on lire dans le compte rendu d’expérimentation.
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Les économies portent également sur la fertilisation. « Sur les trois éléments N, P, K, le recyclage permet d’économiser 40 % d’engrais, en moyenne. Environ 125 kg/ha de N, près de 100 kg de P2O5 et plus de 200 kg de K2O, soit près de 1 000 €/ha/an », précise le document. Dans le Vaucluse et notamment sur les zones classées vulnérables nitrates, le recyclage des solutions des cultures hors-sol dont la fraise s’est généralisé.
« Toute nouvelle installation ou implantation de culture hors-sol doit le mettre en place. Sur les exploitations disposant d’une eau normale, le recyclage est facilement gérable. Il faut toutefois des contrôles réguliers avec les analyses, apport et drain, pour détecter les éventuelles accumulations de certains ions qui créent des déséquilibres », témoigne Sylvia Gasq, Conseillère en maraîchage à la Chambre d’agriculture de Vaucluse et GDA du Comtat. Les exploitations qui ont des eaux chargées ont beaucoup plus de mal à recycler sans procéder à une dilution avec des eaux de pluie ou des eaux du canal, ou en pratiquant l’épandage sur une zone enherbée ou dans d’autres cultures. « C’est pour cela que l’on attend avec impatience les résultats du projet Vespa », assure-t-elle. Le recyclage a aussi un coût d’installation que Sylvia Gasq estime entre 20 000 et 25 000 € par exploitation (hors station de fertilisation).
Piloter et optimiser à partir de seuils
Outre le recyclage, l’Aprel et le Criiam Sud ont mis en place un programme d’expérimentation pour tester des sondes capacitives, déjà présentes sur plusieurs exploitations de la région, principalement pour des cultures en sol. Celles-ci sont placées à l’horizontale dans le sac de substrat (fibre de coco, à base d’écorce). L’objectif est de pouvoir piloter et optimiser l’irrigation et la fertilisation à partir de seuils de référence. Pour l’heure, les relevés réalisés depuis trois ans ont d’abord montré l’hétérogénéité des systèmes d’irrigation entre blocs et dans les blocs de production.
Les données ponctuelles fournies par les sondes ne sont donc pas représentatives de l’état d’irrigation de l’ensemble de la culture mais sont suffisamment précises pour avoir une bonne idée de l’état hydrique des cultures. « Toutefois, on commence à distinguer des seuils de pilotage. Certaines journées nuageuses, les plantes consomment moins, ce qui permet une diminution des irrigations », commente Elodie Derivry à l’Aprel. « L’objectif serait de pouvoir comparer les systèmes d’irrigation, piloter avec et sans sondes pour estimer les gains potentiels de productivité en rendement et en qualité », précise la chargée de l’expérimentation.
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Vers une gestion agro-écologique
Le projet Vespa (Valorisation des effluents agricoles comme support pour la production de biomasse) a pour objectif de traiter vertueusement les effluents agricoles (solution nutritive, effluents de cave viticole ou de moulin à huile d’olive) sur leurs sites de production par un complexe de micro-algues et de bactéries photosynthétiques. « Le procédé vise à éliminer les charges minérale, organique et phytosanitaire des effluents liquides, réutiliser l’eau ainsi purifiée et valoriser la biomasse produite sous forme de phytostimulant », explique Claire Goillon de l’Aprel qui fait partie des sept partenaires du projet porté par le CEA de Cadarache, cofinancé par l’Ademe.
Le procédé fonctionne grâce à l’action de plusieurs micro-organismes. Des micro-algues qui ont la capacité de traiter très efficacement la charge minérale (azote, phosphore notamment), des bactéries responsables de l’élimination de la charge organique et de bactéries photosynthétiques anoxygéniques dont la faculté est de traiter des micro-polluants comme les pesticides. « En système hors-sol, le système Vespa est prévu pour traiter l’intégralité des effluents de drainage lorsqu’il n’y a pas de recyclage ou seulement les purges en système recyclé », précise l’expérimentatrice.