Pêche-nectarine : vers des variétés moins sensibles aux bioagresseurs
Les producteurs de pêches sont fortement demandeurs de variétés résistantes ou tolérantes aux bioagresseurs. Les obtenteurs, les stations d’expérimentation et la recherche travaillent d’un côté à apporter des informations sur les variétés actuelles, de l’autre à préparer les variétés du futur.
Les producteurs de pêches sont fortement demandeurs de variétés résistantes ou tolérantes aux bioagresseurs. Les obtenteurs, les stations d’expérimentation et la recherche travaillent d’un côté à apporter des informations sur les variétés actuelles, de l’autre à préparer les variétés du futur.
« Les variétés les plus attendues sont celles qui sont le plus résilientes vis-à-vis des bioagresseurs que ce soit en bio comme en conventionnel, constate Nathalie Courtieu de la Chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales. Avec le retrait des produits, c’est de plus en plus compliqué de protéger ses vergers même en conventionnel. Mais pour le moment, seules quelques variétés sont moins sensibles. Il n’est pas possible de bâtir un calendrier de production sur les quatre segments avec des variétés peu sensibles à la cloque par exemple. » Tous les obtenteurs travaillent sur l’axe de recherche de variétés plus tolérantes.
Depuis 2019, des marqueurs de tolérance au Xanthomonas ont été identifiés par INRAE. Depuis, 150 variétés d’obtenteurs ont été testées et un calendrier de variétés conseillées en zone Xanthomonas est proposé. Tous les ans, de nouvelles obtentions sont testées. Vingt-sept ont été testées en 2021, six d’entre elles présentent au moins un allèle de résistance sur les deux zones génétiques identifiées, K1 et K6. Il s’agit de Arizona, Daytona, Amapola de PSB, SF16049 de Star Fruits, Melox 26 et PB_5118 d’Escande. « L’objectif pour nous sera de combiner ces marqueurs génétiques pour obtenir des gammes tolérantes sur les six segments, prévoit Clarisse Auvinet de CEP Innovation. Mais même avec les marqueurs existants, pour le moment, nous ne sommes pas encore au stade de variétés commercialisables combinant des tolérances ou résistances à différents bioagresseurs. »
70 variétés commerciales évaluées
Un dispositif spécifique vise à identifier les niveaux de sensibilité des variétés commerciales de pêche depuis 2012 (et d’abricot depuis 2018) aux principaux bioagresseurs. Ce réseau coordonné par le CTIFL rassemble les stations expérimentales SudExpé Saint Gilles (Gard), Sefra (Drôme), Sica Centrex (Pyrénées-Orientales) et le centre CTIFL de Balandran (Gard). Plus de 70 variétés de pêche et nectarine, plantées en plusieurs tranches, ont été évaluées depuis les débuts du dispositif, principalement par rapport à leur sensibilité à la cloque, aux thrips méridional et californien, et à la tordeuse orientale du pêcher. « Ces variétés, toutes déjà disponibles à la vente, ont été choisies car elles présentent un intérêt pour la profession, de par leur potentiel agronomique et leurs performances », souligne Claire Crestin, ingénieure du CTIFL, lors de la rencontre technique Fruits en agriculture biologique.
Les variétés sélectionnées sont mises en place sur les quatre sites, qui présentent des conditions pédoclimatiques et des pressions en bioagresseurs différentes. « Comme on ne maîtrise pas toute la variabilité des bioagresseurs et du matériel végétal, on conduit l’étude sur plusieurs années pour essayer de gommer cette part d’incertitude », poursuit-elle. Les vergers sont conduits sans traitements phytosanitaires vis-à-vis des bioagresseurs observés. Le dispositif permet surtout d’identifier les comportements extrêmes des variétés face aux bioagresseurs, soit très peu sensibles, soit très sensibles. Les comportements intermédiaires sont plus difficiles à interpréter. Une variété plantée en 2018 dans le réseau, Royal Maid, ressort particulièrement par rapport à sa forte tolérance à la cloque. A l’instar de la variété de référence Benedicte, connue pour sa tolérance à la cloque, Royal Maid a montré très peu de dégâts de cloque sur trois années d’observation (2019 à 2021) et sur les quatre sites, même en cas de forte pression cloque.
Le comportement en conditions de bas intrants
Les sites d’expérimentation se sont coordonnés pour définir les bioagresseurs à étudier, en fonction des pressions dominantes dans leur bassin de production. « A SudExpé, historiquement, on a beaucoup travaillé les thrips, la tordeuse aussi sur les premières tranches de plantation, indique Alexandre Magrit, de SudExpé Saint Gilles. Depuis quelques années, on se recentre plutôt sur la cloque. Cette maladie devient vraiment problématique pour les producteurs avec le retrait de certains produits phytosanitaires. En fonction de la pression cloque de l’année, on observe aussi les thrips, la rouille, l’oïdium… C’est un peu opportuniste, en fonction des maladies qui apparaissent. »
Sur cette station, un autre dispositif d’évaluation des variétés a été mis en place en 2017, afin d’évaluer le comportement des variétés d’abricot et pêche en conditions de bas intrants phytosanitaires. « Ce choix a été fait face à la forte réduction du nombre de produits de synthèse, évoque Maëlle Guiraud, de SudExpé. On s’attend à avoir des impasses techniques sur certains bioagresseurs. Nous ne traitons ce verger qu’avec des produits de biocontrôle et/ou autorisés en AB. L’objectif est de maîtriser suffisamment les bioagresseurs pour aller jusqu’à la récolte et pouvoir évaluer les fruits en plus des observations au verger tout au long de la saison : rendement, calibre, taux de sucres, intensité d’attaque par les bioagresseurs… »
« Les deux dispositifs sont complémentaires, note Alexandre Magrit. Le dispositif bioagresseurs cherche à évaluer la génétique, la résistance des variétés. Tandis que celui en bas intrants vise plutôt à chercher quelles variétés seront capables de produire demain si on n’a plus de produits, avec une approche plus globale. »
Une nouvelle application pour les fiches variétales
Les fiches variétales synthétisent les éléments issus de l’évaluation variétale sur plusieurs sites (CTIFL centre opérationnel de Balandran, Sica Centrex, Sefra et SudExpé), coordonnée par le CTIFL. Elles apportent des données de performance agronomique et qualitative, de l’arbre au fruit, des éléments de conduite adaptés aux caractéristiques physiologiques des variétés. L’application des fiches variétales fait peau neuve en 2022. Pour les espèces Abricot, Cerise, Noix, Pêche et Nectarine, Pomme, Fraise puis Prune et Tomate dans un second temps, les données variétales seront accessibles de façon uniforme, avec deux degrés d’information et une plus grande opportunité de tri et de comparaison. Rendez-vous sur www.ctifl.fr fin 2022.