Crise de la filière betterave : 105 parlementaires écrivent à Emmanuel Macron
105 parlementaires ont adressé une lettre ouverte à Emmanuel Macron, président de la République. Cette tribune, intitulée "Halte au Sabordage de la Filière Betteravière (sucre-alcool-bioénergie …)" s'inquiète de la décroissance agricole et demande de rétablir les moyens de protection indispensables de la filière betterave. Les parlementaires notent que d'autres pays européens ont obtenu des dérogations face à l'épidémie de jaunisse qui attaque les betteraves. Les signataires souhaitent qu'Emmanuel Macron fasse preuve de "pragmatisme".
Retrouvez la tribune dans son intégralité et la liste des signataires.
105 parlementaires ont adressé une lettre ouverte à Emmanuel Macron, président de la République. Cette tribune, intitulée "Halte au Sabordage de la Filière Betteravière (sucre-alcool-bioénergie …)" s'inquiète de la décroissance agricole et demande de rétablir les moyens de protection indispensables de la filière betterave. Les parlementaires notent que d'autres pays européens ont obtenu des dérogations face à l'épidémie de jaunisse qui attaque les betteraves. Les signataires souhaitent qu'Emmanuel Macron fasse preuve de "pragmatisme".
Retrouvez la tribune dans son intégralité et la liste des signataires.
Les betteraviers redoutent une forte chute des rendements. Depuis plusieurs semaines, la CGB demande un plan d'urgence avec notamment une autorisation de traitements d’enrobage de semences pour 2021 et un plan d’indemnisation.
Lire aussi : une infestation inédite de pucerons verts sur betterave.
Le préjudice est estimé à 150 millions d’euros pour les betteraviers. Dans les régions, les élus défendent une filière betterave en difficulté. Le gouvernement a donc écarté le retour des néonicotinoïdes et planche un plan d'aides. Certains ont donc signé la tribune à retrouver en intégralité ci-dessous.
Halte au Sabordage de la Filière Betteravière (sucre-alcool-bioénergie…)
Monsieur le Président,
La France est le 1er.pays agricole européen et un leader mondial pour l’exportation de produits agricoles et agroalimentaires. L’Agriculture française est internationalement reconnue comme étant le « modèle le plus durable du monde ». Néanmoins à un moment de l’histoire de notre pays où nos filières alimentaires et bioénergie ont fait la preuve de leur résilience face aux difficultés sanitaires, économiques et sociales engendrées par la pandémie du Covi-19, de nombreux indicateurs économiques se dégradent : érosion des revenus des agriculteurs, investissements dans les exploitations agricoles en berne et effondrement de notre excédent commercial agroalimentaire.
Dans ce contexte, la filière betterave-sucre-bioénergie française fait encore office de porte-drapeau de l’excellence à l’international : 26.000 betteraviers et 21 sucreries dans nos territoires ruraux, 45.000 emplois directs, 1er producteur européen de sucre et de bioéthanol pour plus d’1 Md € d’excédent commercial …
A la crise sanitaire dont nous sortons progressivement, vous avez, monsieur le Président, dès le 13 avril dernier, répondu en affirmant qu’il nous fallait à présent « rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française ». Nous ne pouvons que partager une telle ambition et la filière betterave-sucre-bioénergie répond à tous ces enjeux : souveraineté alimentaire, agricole, industrielle, énergétique, sanitaire, pour une économie décarbonée d’excellence. Elle répond aux attentes des citoyens au cœur des territoires ruraux, en appliquant les meilleurs standards dans ses champs ou dans ses usines.
Mais cette excellence agro industrielle est en danger vital : 4 fermetures de sucreries en un an et plus du tiers de la production de betteraves en péril à cause du virus de la jaunisse faute, pour les agriculteurs, d’avoir pu protéger efficacement les plantes.
Historiquement leader au niveau européen, la filière est aujourd’hui la plus fragilisée d’Europe.
La question de la lutte contre les insectes et parasites laisse nos agriculteurs aujourd’hui sans solution viable. Or, sans protection contre le puceron vecteur de la jaunisse, plus de betteraves, sans betteraves plus de sucreries, sans sucreries plus de sucre, de gel hydroalcoolique, de bioéthanol ou même de pulpes pour nos élevages, moins d’activité économique dans nos territoires ruraux et 45.000 emplois supprimés !
N’ajoutons pas un drame économique aux difficultés majeures que connaît notre pays avec les impacts de la COVID-19, alors même que cela peut être évité, comme dans les autres pays européens !
Les planteurs français qui connaissent des niveaux de pertes financières jamais atteints, ne replanteront pas sans avoir la certitude de pouvoir protéger leurs cultures dès la prochaine campagne !
Monsieur le Président : il y a urgence à agir. Quelques jours. Quelques semaines tout au plus, et si vous ne décidez rien, alors la filière s’affaissera par manque de surfaces cultivées. Elle entraînera irrémédiablement la perte des efforts de recherche et d’innovation investis depuis des années, le recul d’une activité économique créatrice d’emploi dans nos territoires ruraux et un accroissement de notre dépendance alimentaire.
Monsieur le Président de la République, vous nous expliquez que vous croyez à cette écologie positive, cette écologie du « mieux », et pas à l’écologie punitive, celle du « moins ». Comme vous, nous sommes résolument mobilisés par l’enjeu environnemental de la production agricole. C’est la raison pour laquelle, si vous souhaitez placer l’écologie au cœur de la reconstruction de notre modèle économique, cela doit se transcrire avec pragmatisme et en proposant des solutions concrètes, réalistes et efficaces pour les agriculteurs dans nos territoires et au plus près de nos filières.
A l’heure où l’Europe renforce son unité en s’engageant en faveur d’un plan de relance commun, comment comprendre que la filière betteravière fasse l’objet d’un traitement radicalement différent de part et d’autre des frontières des Etats européens ? Quand nos voisins, Allemands, Belges, Néerlandais ont réagi de manière pragmatique et sans délai en obtenant des dérogations temporaires pour faire face à l’épidémie (jaunisse), la France, entravée par une réglementation trop rigide, prendra-t-elle le risque de faire disparaître, à leur profit, son industrie sucrière et éthanolière ?
Monsieur le Président, stoppons d’urgence ce virus de la décroissance agricole ! Rétablissez les moyens de protection indispensables à cette filière !