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Les livreurs de lait de chèvre bio face à la crise de consommation

La baisse de la demande en fromage bio fragilise la filière longue du lait de chèvre bio qui a déclassé ou stocké la moitié de sa production en 2023. D’ici 2030, il ne pourrait rester que 100 à 120 livreurs.

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Un tiers des 153 livreurs de lait de chèvre bio encore présents en 2023 pourraient arrêter le bio à court ou moyen terme.

Depuis quelques années, la filière du lait de chèvre biologique traverse une période tumultueuse. Une consommation en déclin, des revenus fragiles pour les livreurs et des tensions économiques pour les transformateurs remettent en question l’avenir de ce secteur. À la demande de l’Anicap (interprofession de la filière laitière caprine française), l’Institut de l’élevage a dressé, à partir des données 2023, un panorama du lait de chèvre bio en France et a évalué les effets de la baisse de la consommation sur les transformateurs et les livreurs.

Une chute de la consommation de fromage de chèvre bio

Après un engouement notable à partir de 2015, la consommation de fromages de chèvre bio en grande distribution s’est effondrée dès 2021. En 2023, la chute a atteint 19 % par rapport à l’année précédente. Ce déclin, initialement indépendant de l’inflation, est désormais amplifié par des contraintes budgétaires des ménages.

Les livreurs de lait de chèvre bio subissent de plein fouet les effets de cette crise. Le prix moyen payé du lait bio a été de 1 080 €/1 000 l en 2023, en hausse de 3,3 % par rapport à 2022. Mais l’écart entre les prix du lait conventionnel et celui du lait bio s’est réduit : de 219 € en 2021 à seulement 154 € en 2023. Un prix insuffisant pour couvrir des coûts de production. D’après les observations 2023 de l’Institut de l’élevage, il aurait fallu un prix moyen de 1 256 €/1 000 l pour que les livreurs dégagent un revenu équivalent à deux Smic par personne.

Des transformateurs sous tension

Au final, les livreurs bios en suivi Inosys ont dégagé un Smic de moins que les éleveurs conventionnels. Avec ces revenus insuffisants, un tiers des 158 livreurs de lait bio recensés au printemps 2024 (contre 177 en 2023) risque de quitter la filière à court ou moyen terme, que ce soit par la retraite, par des arrêts de l’atelier caprin ou par des déconversions vers le conventionnel.

Côté laiteries, le tableau n’est pas rose non plus. En 2023, la moitié du lait bio collecté a été déclassée ou stocké, générant des coûts élevés. Les fabrications de fromages de chèvre bio ont diminué de 14 % par rapport à 2020, et de 16 % sur les neuf premiers mois de 2024 par rapport à la même période en 2023. Les acteurs les plus spécialisés en bio, sans débouchés alternatifs, sont particulièrement touchés, avec des risques de désengagements croissants.

Des pistes pour une relance durable

Pour accompagner la pérennité des livreurs bio, l’Institut de l’élevage préconise de garantir un prix du lait spécifique pour les récents installés ou convertis en bio. L’accompagnement technique permettrait aussi parfois d’optimiser la production par chèvre. Enfin, un appui à l’acquisition de foncier permettrait de renforcer l’autonomie alimentaire, essentielle en production biologique.

Même en cas de baisse de la consommation de 5 % par an, il faudrait maintenir une production de 16 millions de litres, soit l’équivalent de 100 éleveurs. Redynamiser la consommation, soutenir les éleveurs et préserver la diversité des opérateurs forment le triple défi pour maintenir un équilibre entre l’offre et la demande tout en garantissant des revenus décents pour les producteurs. Dans ce contexte, la mobilisation collective sera essentielle pour pérenniser une filière déjà fragilisée mais toujours porteuse de sens et de valeur ajoutée. Malgré les difficultés du marché, les opérateurs ont, pour la plupart, maintenu en 2023 et 2024 le prix du lait bio.

Coté web

État de la filière lait de chèvre bio et effets de la crise de consommation

Un résumé de quatre pages de l’étude État de la filière lait de chèvre bio et effets de la crise de consommation est en ligne sur anicap.org/chiffres-cles.

Côté éco

Le plan gouvernemental, doté de 90 millions d’euros, a été lancé en 2024 pour compenser les pertes économiques des exploitations bio.

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