Coline Sabik, conseillère technologie à Actalia
Influence de la température de caillage sur l’acidification et la qualité des fromages lactiques de chèvre
Tous les fromagers fermiers connaissent ce sentiment d’inquiétude en arrivant en fromagerie pour observer leur caillé lactique : est-il réussi ? Entre autres paramètres, le processus d’acidification doit être bien maîtrisé pour éviter les accidents de fabrication.
Tous les fromagers fermiers connaissent ce sentiment d’inquiétude en arrivant en fromagerie pour observer leur caillé lactique : est-il réussi ? Entre autres paramètres, le processus d’acidification doit être bien maîtrisé pour éviter les accidents de fabrication.
Il est parfois difficile de maintenir une température de caillage stable, par exemple au printemps, lorsque les nuits sont froides et les jours plus chauds. Il s’agit pourtant d’un des paramètres clés de l’acidification et de la réussite des fromages lactiques, parfois mal maîtrisé faute d’équipements ou d’équipements mal adaptés. Trop chaud ? Il y a un risque de caillé « digéré ». Trop froid ? Le lactosérum est alors peu acidifiant et des bactéries indésirables pourraient se développer. Par ailleurs, le caillage à froid entraîne des fromages plus humides.
L’acidification est également une étape importante pour le développement des composés aromatiques du futur fromage. Un processus à bien maîtriser donc.
Trois températures de caillage ont été testées par les équipes Actalia de Carmejane, afin de simuler les différentes fluctuations des saisons : 18, 20 et 26 °C dans des conditions de fabrication identiques : même lait, opérateur et jour de fabrication. Au total, quatre répétitions sur du lait de chèvre ont été réalisées.
Il résulte de ces essais que la température de caillage a un réel impact sur la cinétique d’acidification. L’augmentation de la température permet de réduire son temps de démarrage et qu’elle soit plus rapide. À la clé, un lactosérum plus riche en flore acidifiante avec un meilleur pouvoir d’acidification et une réduction de l’implantation de la flore indésirable. En effet, les caillés les plus riches en flore indésirables sont issus des cuves caillées à basse température (18°C), ce sont également ces cuves qui ont un démarrage de l’acidification la plus lente. Il n’y a pas d’écarts observés sur les cuves caillées à 20 et 26°C. Le démarrage de l’acidification est plus rapide à 26°C, mais les bactéries indésirables ont un développement rapide à cette température.
L’acidification plus rapide s’accompagne également de fromages moins humides au stade du démoulage. Lors de l’affinage (fin ressuyage et fin d’affinage), les différences d’humidité des produits se réduisaient considérablement, conférant aux produits peu d’écart sur l’appréciation de leurs qualités organoleptiques.
Aucun impact de la température n’a été observé sur le pH et l’acidité au moulage, avec un aspect semblable des caillés au moulage lorsque le pH et l’acidité sont comparables à ces stades.
La régulation de la température de caillage est fortement conseillée pour les producteurs ayant des difficultés pour maîtriser leur vitesse d’acidification et la pratique du repiquage du lactosérum. En revanche, nous n’avons pas mis en évidence de gain qualitatif sur les fromages lactiques de chèvre et ce à deux stades d’affinage différents.
Si vos problèmes de caillage et d’acidification persistent, n’hésitez pas à contacter un technicien fromager pour vous accompagner.
Côté biblio
Afin de déterminer l’impact réel de la température sur l’acidification, l’égouttage et la qualité des fromages lactiques, une étude a été réalisée par Actalia-centre de Carmejane, en partenariat avec la Maison régionale de l’élevage, durant l’été 2019. Ce projet, baptisé Thermotique, a bénéficié du soutien financier du Conseil régional Paca et du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT/CIMA) et présenté lors des 11es rencontres du fromager fermier de Carmejane le 19 octobre 2021.
Succès pour les rencontres du fromager fermier 2021 de Carmejane
Le 19 octobre dernier étaient organisées les 11es rencontres du fromager fermier par la Maison régionale de l’élevage Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Avec plus d’une centaine d’inscrits, les éleveurs ont répondu présents. « Cela montre le réel intérêt pour les questions techniques, et c’est une bonne nouvelle », se réjouissent les organisateurs. Cette journée est l’occasion de diffuser des résultats d’essais, de programmes collectifs et d’échanges riches entre les participants. Au programme cette année, la fabrication de glaces fermières, influence de la température de caillage sur l’acidification des fromages lactiques (voir ci-dessus), valorisation du lait écrémé et des chevreaux et impact du pré-égouttage sur la qualité des fromages lactiques.