Augmenter le prix de ses fromages face à la hausse des intrants
Aliments, engrais, matériaux… mais aussi énergie, emballages, coût de la main-d’œuvre, chez les producteurs fermiers, tous les prix sont à la hausse. Dans ces conditions, l’augmentation des prix est une nécessité.
Aliments, engrais, matériaux… mais aussi énergie, emballages, coût de la main-d’œuvre, chez les producteurs fermiers, tous les prix sont à la hausse. Dans ces conditions, l’augmentation des prix est une nécessité.
D’après les hypothèses de l’Institut de l’élevage, le coût de production des producteurs fermiers caprins augmenterait en moyenne de 240 à 500 euros les 1 000 litres par rapport à 2021. En août 2022, l’indice Ipampa lait de chèvre a augmenté de 21,9 %, par rapport à août 2021. Le prix des aliments achetés, qui représente plus de la moitié des charges de l’indice, a, quant à lui, augmenté de 27,9 %. En parallèle, le carburant, les engrais et les matériaux voient aussi leur prix s’envoler. En plus de ces fortes hausses, les producteurs fermiers font face à celles des emballages et de l’énergie. Enfin, l’augmentation du Smic perturbe aussi le poste « travail » (rémunération des exploitants à hauteur de deux Smic/UMO, plus les salaires et charges salariales) qui représente en moyenne 53 % du coût de production chez les producteurs fermiers.
Hausse comprise entre 240 et 500 €/1 000 l
On constate avec l’hypothèse basse (voir encadré) un surcoût moyen de 283 €/1 000 l pour les fromagers fermiers Sud Méditerranée. Dans les autres régions, ils enregistrent une hausse de 195 €/1 000 l. En hypothèse haute, les postes électricité et charges de commercialisation s’ajoutent à l’augmentation du coût de la main-d’œuvre. Dans certaines régions, des achats de fourrages supplémentaires à la suite de la sécheresse viennent s’ajouter.
Jusqu'à 19 % de hausse des tarifs
Avec une valorisation moyenne de 2 970 €/1 000 l en 2021, les fromagers fermiers du Sud Méditerranée devront augmenter leurs tarifs de 10 à 19 %, selon le jeu d’hypothèses retenu. Ce qui représente une hausse de 0,10 à 0,25 € TTC pour un pélardon, par exemple.
Avec une valorisation moyenne de 2 340 €/1 000 l en 2021, les fromagers fermiers des autres régions devront augmenter leurs tarifs de 8 à 19 %, selon le jeu d’hypothèses retenu. Ce qui représente une hausse de 0,40 à 0,90 € TTC pour un sainte-maure de Touraine, par exemple.
Augmenter sans attendre
Les conséquences financières seront bien sûr variables d’un élevage à un autre. À chacun de calculer son coût de production et son prix de revient, c’est-à-dire la valorisation nécessaire pour dégager un revenu.
C’est dès maintenant qu’il faut passer des hausses de tarifs tant que la demande est forte, sans attendre de faire le point après le pic d’activités des fêtes de fin d’année.
Avant d’augmenter le prix de vente des fromages, il faut d’abord s’assurer de la régularité de leur poids. En AOP Crottin de Chavignol par exemple, une augmentation de 10 % du poids du fromage (soit à peine 8 g de plus que la norme) sans hausse du prix amène une perte de 12 000 € pour un atelier transformant 50 000 litres de lait. Il faut peut-être aussi limiter les promotions, remises et cadeaux.
Concernant l’augmentation du prix des fromages, une différenciation du prix sur les marchés (si ce n’est déjà fait) par rapport à la vente à la ferme se justifiera aisément par la hausse du carburant.
Évaluer la rentabilité des circuits de commercialisation
L’augmentation du prix peut concerner tous les fromages ou seulement certains. Jean-Philippe Bonnefoy, producteur fermier en Bourgogne témoigne : « Nous augmentons différemment nos fromages. Les plus récemment proposés à la vente ont une bonne valorisation, du coup, nous n’y touchons guère. Nous faisons des hausses plus importantes pour les références plus anciennes… »
Au-delà de l’augmentation des prix des produits laitiers, c’est aussi le moment de regarder la rentabilité de certains circuits de commercialisation : faut-il faire 60 km pour livrer 30 fromages ou continuer à vendre à un grossiste qui prend peut-être du volume, mais rapporte moins que d’autres circuits ?
Certaines pratiques sont peut-être aussi à revoir. Faut-il encore traire en décembre quelques chèvres en lactations longues « pour avoir un peu de lait à Noël », lait qui va coûter de l’énergie en salle de traite et en fromagerie et aussi du travail ?
Enfin, la réduction de certaines charges, sans réduire les charges « efficaces », contribue aussi à maintenir le revenu, avec un effet à plus ou moins long terme : optimisation du coût alimentaire, économies d’énergie, autoconsommation photovoltaïque…
Deux hypothèses de prix
Face à la volatilité des marchés et à la difficulté d’établir des prévisions fiables, Idele a choisi de construire deux jeux d’hypothèses de prix et d’en calculer les effets toutes choses égales par ailleurs sur les élevages caprins suivis dans le cadre du réseau Inosys. Les fromagers fermiers ont été classés en deux systèmes : les fromagers fermiers du Sud Méditerranée avec une forte valorisation du litre de lait et, pour beaucoup d’entre eux, une utilisation de surfaces pastorales, et les fromagers fermiers des autres régions avec une valorisation plus faible et des ateliers souvent de plus grande dimension.