Carrefour veut plus de bien-être dans les élevages de porcs
Le numéro deux de la distribution en France a mis en place une démarche d’amélioration du bien-être animal dans ses filières d’approvisionnement pour répondre aux attentes des consommateurs.
Le numéro deux de la distribution en France a mis en place une démarche d’amélioration du bien-être animal dans ses filières d’approvisionnement pour répondre aux attentes des consommateurs.
« Les clients tiennent compte de plus en plus du bien-être des animaux dans leurs actes d’achat », affirmait Séverine Fontaine, directrice qualité des filières animales Carrefour, lors du congrès vétérinaire de l’AFMVP (1) qui s’est déroulé en visioconférence le 3 décembre dernier. « On ressent cette tendance au travers des sondages de préférence d’achat de produits alimentaires que nous réalisons régulièrement », souligne-t-elle. « La prise de conscience est particulièrement forte chez les nouvelles générations, ce qui laisse supposer que le phénomène va s’amplifier. » Une ampleur déjà démontrée par des initiatives citoyennes. « Celle qui vise à mettre fin à l’élevage en cage a recueilli 1,4 million de signatures. Nous ne pouvons pas ignorer cette tendance. Sinon, il y aura un impact certain sur la fréquentation de nos magasins », ajoute-t-elle.
Des actions à court et à long terme
Séverine Fontaine définit la stratégie Carrefour en trois points. « Nous nous engageons actuellement dans une phase de sécurisation de nos approvisionnements qui nous permet de certifier à nos clients que les animaux ne sont pas maltraités et que les pratiques les plus controversées ne sont plus appliquées. » Pour elle, l’arrêt des truies bloquées en maternité fait partie de cette stratégie à court terme, de même que la limitation des mutilations ou la garantie que les animaux ne ressentent pas de douleur si elles sont maintenues. « Nous voulons ainsi protéger notre enseigne, on ne peut pas se permettre d’être cité comme un mauvais exemple. » À moyen terme, Carrefour envisage de transformer les modes d’élevage de ses fournisseurs, « tout en gardant une offre accessible aux consommateurs, qui sont toujours très attentifs au prix lors du choix en rayon ». Pas question donc de passer au plein air. Carrefour vise plutôt des mesures intermédiaires, telles que le développement de la lumière naturelle, la limitation de la densité, ou encore l’enrichissement des milieux…
Une notation du bien-être
En parallèle, l’enseigne propose dans ses rayons des produits emblématiques en matière de bien-être sur lesquels elle communique fortement : bio, porc plein air Reflets de France (une marque de Carrefour), Filière qualité Carrefour… « Tout ceci avec un étiquetage clair pour expliquer les démarches. » Carrefour a développé en collaboration avec l’enseigne Système U un système de notation du bien-être allant de A (supérieur) à E (minimal). Les allégations mentionnées sur l’étiquette des barquettes portent sur les modes d’élevage qui englobent toute la vie de l’animal. Ils sont garantis par des audits annuels. La filière poulet de chair à marque Carrefour est la première concernée par cet étiquetage. Séverine Fontaine souligne qu’il pourrait être rapidement appliqué aux produits du porc. « Un consensus se dégage avec nos fournisseurs sur la généralisation des maternités liberté à l’horizon 2025. Concernant l’arrêt de la castration à vif, le consensus n’est pas encore trouvé. La science et l’expérimentation doivent répondre à nos interrogations. » Des interrogations également sur la nature du sol des bâtiments d’élevage et l’arrêt de la coupe des queues. « Deux aspects qui ont un impact important sur la pénibilité du travail, l’environnement, la transformation des bâtiments ou la santé des animaux. Mais tous les indicateurs démontrent que ces sujets sont loin d’être neutres pour les consommateurs », met-elle en garde.
D. P.
Avis d’expert : Bernard Valat, président de la FICT (fédération des entreprises françaises de charcuterie traiteur)
« Attention aux surcoûts excessifs »
« La demande sociétale sur le bien-être animal s’accélère. Tous les professionnels de la filière de prendre en compte cette demande, sans faire de preuve de conservatisme. Cela ne ferait qu’empirer la mauvaise image qui est en train de se développer dans l’esprit des citoyens vis-à-vis des éleveurs, des abatteurs et des transformateurs. Mais il faut bien avoir conscience des limites des mesures qui seraient adoptées dans ce cadre en termes de surcoût pour le consommateur. Nous devons préserver des coûts de production compatibles avec le portefeuille des Français moyens. Sinon, d’autres pays comme l’Espagne ou la Pologne viendraient se substituer sur les produits d’entrée de gamme à nos productions, réservées aux riches. Cette stratégie ferait voler en éclat toutes nos politiques sur le porc français et la souveraineté alimentaire. »