Pourquoi la filière a-t-elle retenu le persillé comme paramètre complémentaire ?
Emmanuel Bernard - Pour rappel, l’ambition du plan de filière était d’encourager la consommation de viande bovine française durable et de qualité, notamment en collant davantage aux attentes des consommateurs. L’amélioration de leur satisfaction sur la viande qu’ils achètent passe en effet par l’intégration de nouveaux paramètres d’évaluation des viandes. C’est pourquoi, la filière bovine a retenu le critère du persillé en complément des outils actuels. L’objectif étant d’adapter au mieux la caractéristique de la carcasse aux besoins des clients, quel que soit le débouché : GMS en libre-service (viande crue, sans accompagnement du consommateur dans son choix), GMS en rayon traditionnel ou en boucherie artisanale (viande crue, avec le conseil du boucher), restauration hors domicile (viande cuite).
Comment les attentes des consommateurs ont-elles évolué vis-à-vis de ce critère ?
E. B. - Des études auprès des Français ont montré qu’une légère infiltration de gras intramusculaire est synonyme de jutosité et favorise la tendreté, rendant ainsi la viande plus fondante et savoureuse. Pourtant, les consommateurs peuvent avoir tendance à choisir visuellement des morceaux plus maigres, au risque d’être déçus à la dégustation, d’où l’importance de travailler sur ce critère et de communiquer à bon escient.
Quels outils sont disponibles à ce stade pour mesurer les niveaux de persillé des carcasses ?
E. B. - Une grille d’évaluation du persillé de la carcasse a été conçue pour garantir une harmonisation des notes entre les établissements de découpe et de transformation. Elle se décline selon six niveaux, la classe 6 étant très persillée. La notation se fait sur l’avant de la carcasse, après découpe primaire, au niveau de la cinquième côte sur la noix. Cet outil pratique, propriété d’Interbev, a été élaboré par l’Idele. Il fait suite à un travail de terrain réalisé par des opérateurs d’abattage-découpe qui l’ont testé à titre expérimental. Après l’obtention d’excellentes mesures, un accord interprofessionnel sur l’évaluation du persillé sur les carcasses de bovins de plus de huit mois a été adopté en 2022. Ainsi, les entreprises françaises qui décident d’évaluer le persillé sur tout ou partie de leurs carcasses doivent obligatoirement se référer à la grille interprofessionnelle.
Quels facteurs influent sur le dépôt du persillé des bovins ?
E. B. - D’après une récente étude de l’Idele pour le compte d’Interbev Bovins, il existe une grande variabilité des niveaux de persillé dans toutes les races. Les animaux plutôt gras, lourds et conformés ont tendance à être plus persillés, en lien avec le choix de la conduite en finition. Néanmoins, l’obtention d’un poids, d’une conformation ou d’un état d’engraissement ne garantit pas un niveau de persillé. Le travail technique réalisé confirme le bénéfice des finitions longues combinées à des niveaux énergétiques soutenus pour déposer du persillé, et semble avancer l’intérêt d’une conduite alimentaire plus riche au jeune âge. Les études doivent être approfondies pour valider ces premières hypothèses et mieux comprendre les mécanismes. Elles doivent être complétées d’une approche économique qui intègre le coût de ces changements de pratiques au niveau de l’élevage, dans l’optique de création de valeur dans la filière.
Approfondir les conduites d’élevage