Sécuriser l’implantation des prairies
Implanter des prairies sous couvert permet de gagner du temps à l'échelle de la rotation et de s'affranchir du risque de fort salissement de la prairie en première année.
Implanter des prairies sous couvert permet de gagner du temps à l'échelle de la rotation et de s'affranchir du risque de fort salissement de la prairie en première année.
Depuis quelques années, on enregiste dans les Pays de la Loire une fréquence importante de situations climatiques défavorables à l’implantation des prairies en fin d’été (début septembre) comme en sortie d’hiver (mi-mars). Face à ce constat, le semis de prairies sous couvert de cultures d’hiver (céréales ou associations céréales-protéagineux) a été étudié entre 2011 et 2015, en fermes expérimentales et en élevages dans la région. Implanter des prairies sous couvert permet de gagner du temps à l'échelle de la rotation et de s'affranchir du risque de fort salissement de la prairie en première année », note Aude Brachet de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire.
Deux pratiques ont été testées. La première consiste à semer le même jour, mi-octobre, une céréale ou une association céréales-protéagineux et une prairie. La seconde à semer normalement la céréale à l’automne, puis à revenir en fin d’hiver (stade tallage de la céréale) avec un outil (herse étrille) pour ouvrir le couvert et installer la prairie en sursemis. Dans ce dernier cas, la qualité d’implantation est aléatoire et ne répond donc pas à l’objectif de sécurisation des semis. « Cette technique peut constituer une opportunité en fin d’hiver pour rattraper une impossibilité de semis automnal mais sous certaines conditions : un bon ressuyage des sols, l’utilisation d’une céréale peu couvrante (blé), un stade de la céréale peu avancé au moment du semis de la prairie, l’absence de vrilles formées des pois », observe Bertrand Daveau, de la ferme expérimentale de Thorigné-d’Anjou.
La prairie compense la perte de rendement de la céréale
En semis simultané d’automne, l’installation des prairies a été satisfaisante et ce, quels que soient le mélange prairial semé (hors luzerne) et la céréale de couverture. Dans le cas d’un semis de début d’automne, on avance la date normale de semis de la céréale et on retarde celle de la prairie. Cette pratique demande un semis en deux passages le même jour avec un semoir à bottes (bottes relevées ou descentes décrochées ou semis à la volée). « La céréale doit être semée à une profondeur de 2 à 3 cm et la prairie dans le premier centimètre, dans l’entre-rang de la céréale. Après semis, il faut penser à bien rappuyer le sol (rouleau denté ou cultipacker). Le semoir à double caisson permet un semis en un passage mais il est difficile à régler », souligne Aude Brachet.
L’impact sur la biomasse de céréale produite récoltée en fourrage est nul ou positif. Dans les situations où la prairie a concurrencé la céréale, sa contribution au rendement a compensé la perte de rendement de la céréale. La récolte intervenant courant juin (coupe directe avec un bec), la prairie a alors moins de concurrence sur l’eau et un accès plus précoce à la lumière ce qui permet d’obtenir un rendement en herbe intéressant dès le premier été (de 1 à 2,5 tonnes de MS). Dans le cas d’une récolte en grains de la céréale, cette solution est satisfaisante à condition d’associer une céréale couvrante avec ou sans protéagineux et une prairie peu agressive comme par exemple, une prairie multiespèce et un triticale-pois fourrager. « L’impact sur le rendement en grains de la céréale est modéré et variable de 0 à - 30 %. Des travaux complémentaires sont en cours sur les densités de semis pour tenter d’atténuer l’effet dépréciateur de la prairie sur le rendement de la céréale récoltée en grains. Des tests d’ensilage précoce sont également en réflexion, en augmentant la part de protéagineux avec des prairies lentes ou rapides d’installation », précise Bertrand Daveau.
Respecter la dose de semis selon les espèces
Lors d’une récolte en grains, il faut prévoir de laisser sécher la paille plus longtemps au sol en raison de la présence de foin. « Les chaumes ne posent par ailleurs pas de problèmes pour ensuite une exploitation en pâturage. En cas de craintes, il est possible de passer un rouleau pour les plaquer au sol. »
La prairie à flore variée, semée au cours des essais, l’a été à la dose de 27 kg/ha. Les doses de semis pour la céréale sont pour une récolte en grains de 250 à 300 grains/m2 pour le triticale, 20 grains/m2 pour le pois, pour une récolte en ensilage (triticale + avoine+ pois + vesce + féverole) de 250 à 300 grains/m2 pour les céréales et de 30 grains/m2 pour les protéagineux. « La fertilisation minérale est à éviter la première année pour favoriser les protéagineux et les légumineuses. Une fertilisation organique est possible en fonction de l’arrière effet. Cette technique d’implantation des céréales ne permet pas de désherber les céréales. »
Bien marier la céréale
En fonction de leur force de concurrence potentielle, bien marier la céréale et la prairie représente un point très important. Il faut bien distinguer les fourragères à implantation lente (dactyle, fléole, luzerne) de celles à implantation rapide (RGI, trèfle violet). Même constat pour le mélange. L’association blé - pois protéagineux est moins agressive qu’un mélange triticale - pois fourragers. Le premier mélange subit une trop forte concurrence de la prairie et donne de faibles rendements. L’association RGH - trèfle violet est quant à elle trop agressive pour une récolte en grains du mélange céréalier.