Rations hivernales : la ferme de Thorigné d'Anjou teste avec succès de nouveaux menus ultra-économes pour les vaches
Depuis sa création, la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou, dans le Maine-et-Loire explore différents leviers de conduite économe. Avec une ration hivernale des vaches même en vêlage d'automne, composée à 100 % de fourrages, des essais de simplification donnent des résultats concluants.
Depuis sa création, la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou, dans le Maine-et-Loire explore différents leviers de conduite économe. Avec une ration hivernale des vaches même en vêlage d'automne, composée à 100 % de fourrages, des essais de simplification donnent des résultats concluants.
En hiver, les vaches limousines de la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou dans le Maine-et-Loire ne mangent que des fourrages. Elles sont conduites en deux lots distincts, correspondant aux deux périodes strictes de vêlages de la ferme : celles qui vêlent à l’automne (septembre/octobre) disposent de fourrages de plus haute qualité puisqu’elles sont en plein allaitement. Celles qui vêlent au printemps (mars-avril) ont des fourrages de qualité moindre.
Les vaches mises à la diète durant l'hiver
Jusqu’en 2019, les vaches en vêlages d’automne avaient une ration composée d’ensilage de céréales et protéagineux (CerPro), récolté fin mai au stade laiteux-pâteux des céréales, et de foin de luzerne. Durant les trois hivers de 2020 à 2023, sur la période du 1er novembre au 25 février, la ferme expérimentale a comparé deux rations encore plus « économes ». Deux lots expérimentaux de 40 vaches multipares ont été constitués, l’un avec une ration ensilage Cerpro-enrubannage de luzerne et l’autre avec le même CerPro, mais avec un enrubannage d'un mélange protéagineux céréales (Procer) récolté au 15 mai.
Sur les trois années de l’essai, les valeurs alimentaires de l’ensilage CerPro étaient en moyenne de 0,77 UFL, 49 PDIN(1) et 63 PDIE(2) par kilogramme de matière sèche (kg/MS) et il était distribué à 6 kg MS/j. Les fourrages complémentaires étaient plus riches en protéines avec 0,75 UFL, 96 PDIN, 80 PDIE pour l’enrubannage de luzerne et 0,80 UFL, 84 PDIN, 69 PDIE pour le ProCer, eux aussi distribués à 6 kg MS/j.
Résultats de ces essais : la ration avec ProCer a occasionné plus de 1 kg de refus par jour et par vache. Les besoins alimentaires des animaux n’ont pas été couverts, le déficit étant évalué à 1 UFL/j. En conséquence directe, les vaches ont perdu environ 40 kg de poids vif sur la période hivernale, ont produit 1 litre de lait en moins par jour, et leurs veaux ont eu une croissance moindre (- 96 g/j par rapport au lot enrubannage de luzerne).
Un rattrapage au pâturage important
Cette période de « vaches maigres » a été suivie, pour les deux lots, par du pâturage, de mars à juin. Au cours de cette période, les vaches du lot ProCer ont rattrapé en poids celles du lot enrubannage de luzerne, et leurs veaux ont eux aussi presque rejoint leurs collègues (différence de 16,5 kg, non statistiquement significative). Les performances de reproduction des vaches des deux lots sont sensiblement les mêmes.
L’évaluation du coût de ces deux rations montre qu’elles sont toutes les deux plus économes que la ration classique avec le foin de luzerne : cette dernière est évaluée à 1,35 €/j par couple mère-veau, contre 1,26 € /j pour la ration CerPro/enrubannage de luzerne et 1,17 €/j pour la ration CerPro/enrubannage de ProCer. En surface nécessaire à la nourriture hivernale de 40 vaches, la ration avec enrubannage de luzerne consomme 10,5 ha, celle avec foin de luzerne 11,2 ha et celle avec enrubannage de ProCer 12,8 ha.
Pas d'incidences sur les performances
Les vaches en vêlage de printemps ont, elles aussi, eu droit à leur essai de ration ultra-économique entre 2020 et 2023. Ces bêtes ne rentrent en 100 % bâtiment qu’à partir de début janvier. Deux rations ont été comparées : un menu avec 8,4 kg MS/j de foin de faible qualité, 1 kg/j féverole et 100 g/j de minéraux et la même ration sans minéraux.
Durant la période de vêlage, les deux lots ont eu des performances comparables, en poids et en conditions de naissance de leurs veaux et qualité du colostrum. Les essais n’ont pas montré non plus de différence sur les performances de reproduction des mères et sur les croissances des veaux. L’emploi de la ration sans minéraux engendre plus de 1000 euros d’économie pour un lot de 25 vaches : pas uniquement sur le coût des minéraux, mais aussi sur celui de la féverole, dont la seule fonction était de faire consommer les minéraux. L’économie concerne également le temps de travail et la consommation de surfaces.
Un régime strict sous conditions
Les responsables de la ferme expérimentale le soulignent : si ces deux essais de rations hivernales ultra-économes fonctionnent, c’est parce que l’ensemble du système de Thorigné repose sur un pâturage tournant avec des prairies de qualité, à flore diversifiée et riches en légumineuses.
Lorsque les animaux rentrent en bâtiment, ils ont une bonne note d’état corporel et peuvent donc se permettre de perdre un peu d’état, sachant qu’ils vont le regagner rapidement au printemps. De plus, la phase hivernale est courte : pour les vêlages de printemps, elle ne dure que 80 jours. Se passer d’un apport minéral pendant une durée aussi courte est donc sans incidence sur leurs performances, l’objectif étant aussi d'apporter une simplification du travail hivernal pour les éleveurs.