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"Mon voisin producteur", un partenariat avec Leclerc
Dans le Grand Est, l’Apal a initié l’approvisionnement d’hypermarchés Leclerc.
La démarche est encore en phase de lancement.
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Améliorer le prix pour l’éleveur, valoriser localement la production, mettre en avant l’élevage allaitant… La démarche « Mon voisin producteur » à laquelle l’Apal (association de production animale de l’Est) a souscrit ne peut susciter que des approbations.
L’initiative est récente. Les premiers animaux ont été abattus début août et la plupart des différents hypermarchés Leclerc se sont engagés fin 2011. Début février de cette année, 15 à 20 gros bovins par semaine étaient écoulés via les rayons à la coupe d’hypermarchés du Grand Est de la France : essentiellement des jeunes femelles de race à viande, sans exclure les taurillons.
« Cela a démarré le 11 mars 2011, date de notre premier contact avec des représentants de cette enseigne. On voulait développer des filières courtes et surtout capter de la plus-value, explique Stéphane Peultier, éleveur de Salers en Meurthe-et-Moselle et président de l’Apal. Nous avons mis à profit le travail déjà réalisé par François Rechenman, viceprésident de notre association. Depuis dix ans, il livre en direct au Leclerc de Sarrebourg, une à deux génisses ou jeune vache par semaine. » L’équipe dirigeante de l’Apal a donc pris contact avec Scap’Est et Scap’Alsace, les deux centrales d’achat de l’enseigne, situées dans la zone de reconnaissance de l’association.
Au fil des semaines et des discussions, la sauce a commencé à prendre. En fin d’automne, plusieurs hypermarchés s’engageaient. L’enseigne Leclerc étant composée d’adhérents tous indépendants, chaque hypermarché conserve sa politique en matière d’achat et signe ses propres contrats d’approvisionnement. « Nous avons embauché Charlotte Stal en septembre 2011. Elle est chargée de démarcher les magasins pour convaincre directeurs, chefs de produits frais et chefs boucher, ajoute Sophie Lacroix, directrice de l’Apal. Elle prend les commandes chaque semaine.
Ces dernières sont ensuite transmises au responsable ‘production’ de notre association. C’est lui qui est en contact avec les négociants pour trouver les animaux adéquats chez nos adhérents en retenant dans la mesure du possible ceux situés dans un rayon de 50 kilomètres autour de chaque magasin. » La livraison de l’animal s’accompagne de la mise en avant de l’élevage dans le rayon via une photo du producteur mise à la disposition du chef boucher.
PLUS-VALUE ENTRE 100 ET 200 € PAR TÊTE
La grille de prix est consultable sur le site de l’Apal pour les adhérents munis d’un code d’accès. Elle prend en compte la grille du marché de Rethel à laquelle s’ajoute une plus-value oscillant entre 20 et 50 centimes d’euros suivant la catégorie desquels il convient de déduire une commission négociée avec le collège acheteur pour un montant maximum de 15 centimes le kilo.
« Suivant la catégorie, la plus-value oscille entre 100 et 200 euros par tête », indique Stéphane Peultier. « Nous avons créé avec un cabinet d’avocat quatre contrats pour les signataires de cette démarche. Ils engagent l’Apal avec respectivement le magasin, l’abattoir, le négociant et l’éleveur. Notre démarche anticipe sur la Loi de modernisation agricole », explique Sophie Lacroix.
« Elle est conforme aux souhaits du ministère qui incite à contractualiser sur les volumes et sur une qualité donnée pour une durée minimum de trois ans, sans oublier la façon dont sera déterminé le prix du produit », ajoute Stéphane Peultier.« Dans notre magasin, ce produit sous marque est désormais vendu au rayon à la coupe à la place d’un label rouge. Pour l’instant, les retours sont favorables, mais il est encore trop tôt pour faire un bilan. Nous attendons avec impatience la viande hachée qui doit être proposée le 5 mars sous cette même marque », indique Jean-Luc Reicht, directeur d’un Leclerc situé dans l’agglomération de Nancy. Cette viande hachée vise aussi à répartir le report de la plus-value versée au producteur sur l’ensemble des muscles et non uniquement sur ceux de l’arrière.
L’autre chantier du moment consiste à faire cesser une polémique locale liée à l’abattage en Bretagne par la société Kermené — filiale de Leclerc — des animaux destinés à cette démarche. Il est évident qu’il y a mieux à faire pour mettre à l’honneur une démarche de proximité et améliorer son bilan carbone que de traverser deux fois la France en camion, d’abord avec des bêtes sur pied puis en carcasse ou en muscle. Plusieurs visites ont été faites dans des abattoirs lorrains de façon à analyser celui qui sera le plus opportun pour éviter ces allers-retours.
Avis d'éleveur
Daniel Guelle, en Gaec à trois associés à Wuisse en Moselle : « On ne demande qu’une chose, que cela prenne de l’ampleur »
« Toutes catégories confondues, nous vendons tout au long de l’année autour de 300 bovins finis par an. Tous sont nés chez nous à partir de nos deux troupeaux Charolais et Limousin. Pour l’instant, nous avons valorisé trois animaux dans le cadre de la nouvelle démarche de l’Apal. À une époque, nous étions engagés dans le label rouge Charolais. Nous avons arrêté. Nous trouvions le cahier des charges trop contraignant sur son volet alimentation comparativement au nombre d’animaux valorisés. Ce qui a été initié avec Leclerc ne va pas audelà de la réglementation. Reste désormais à savoir si cela pourra concerner l’essentiel des volumes de viande vendu dans ces magasins ou si cela ne constituera pas simplement un produit d’appel. Pour l’instant, on ne demande qu’une chose, que cela prenne de l’ampleur ! »