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"Un maximum de productivité par UTH et par UGB avec mon troupeau Charolais"

Bonne productivité numérique, mortalité maîtrisée, croissances de bon niveau, vêlage à deux ans de plus en plus fréquent… Tous les résultats chiffrés du troupeau charolais de Didier Touillon, lauréat des Sabots d'or 2020, concourent pour permettre un maximum de productivité.

« La génétique est un moyen pour arriver aux objectifs techniques que je me suis fixé. Ce qui m’intéresse, c’est la performance globale de mon cheptel et pas seulement celle de quelques vaches », souligne Didier Touillon, éleveur à Palinges, en Saône-et-Loire en plein fief de la race charolaise et dernier lauréat des Sabots d’or. 

En 2019, la productivité de son cheptel de 160 mères conduit en système naisseur engraisseur avec un salarié était de 475 kg de viande vive par UGB (unité gros bovins) et 56 tonnes par UMO (unité de main-d’œuvre). Et un total de 128 tonnes l’an dernier ! « Mon objectif est d’être au-delà des 500 kg de viande vive par UGB. » Ces chiffres sont le résultat d’une conduite optimisée sur tous les volets en cherchant assez logiquement à maximiser la productivité numérique et les croissances tout en faisant la chasse aux génisses et vaches improductives.

Pas plus de 100 jours pour les IA et mises bas

Tout le troupeau est inséminé. « Avec mon père on avait commencé les IA sur les génisses. Après une formation, j’ai commencé à inséminer moi-même à compter de 2005 et depuis 10 ans je n’ai plus de taureaux. » Les IA démarrent le 5 janvier et se prolongent jusqu’à la mise à l’herbe début avril. « En incluant les retours, je réalise un peu moins de 300 IA par an. » Pour la dernière campagne, les vêlages ont commencé le 8 octobre et étaient terminés mi-janvier avec 80 naissances sur le seul mois d’octobre. « Dans l’idéal, j’aimerais que tout soit terminé fin décembre. »

Lire aussi : Le Sabot d’or Charolais 2019 pour le Gaec de la Chaudronnerie

Ce choix du vêlage d’automne est d’abord lié à la volonté de sortir le maximum de JB au premier trimestre, période où les tarifs sont en principe les plus favorables. En octobre, les travaux liés aux cultures se chevauchent avec le début de la campagne de vêlages mais la surveillance de ces derniers est alors une priorité.

Tous ont lieu en bâtiments avec des lots de femelles préalablement constitués par âges (génisses pleines 2 ans, 3 ans et multipares) et selon la date présumée de mise bas connue d’après la dernière IA. Les femelles pleines sont rentrées 15 jours avant vêlage. Elles bénéficient d’une cure d’oligoéléments et de chlorure de magnésium et sont vaccinées contre les diarrhées, de même que les veaux contre les problèmes pulmonaires. En début d’automne, une partie des vaches suitées ressortent en fonction de la disponibilité en herbe.

Beaucoup de surveillance mais pas échographies

Deux cents femelles sont mises à la reproduction chaque année de façon à être certain d’en avoir 170 pleines au moment de la mise à l’herbe. « Inséminer moi-même me permet de le faire au moment le plus opportun. Le choix des taureaux et le fait de gérer de A à Z le suivi de la reproduction sont passionnants, confesse Didier Touillon. J’utilise des taureaux des deux unités de sélection en retenant ceux qui répondent le mieux à mes objectifs. Pour les génisses, ils ne doivent pas être indexés à moins de 110 en IFnais et pour les vaches, ce seuil est de 98. Je ne souhaite plus accroître le développement squelettique, mais je recherche en revanche des taureaux favorablement indexés en DM en associant cette aptitude à un bon potentiel laitier. Et s’ils sont en plus génétiquement sans cornes, c’est encore mieux ! »

Au printemps, 148 femelles suitées sont mises à l’herbe. La plupart des lots sont composés de 20 vaches, allotées selon le sexe de leur veau et la date de leur dernière IA de façon à avoir des lots déjà à peu près constitués pour les vêlages à venir. Cela permet d’anticiper sur la rentrée en stabulation qui suivra.

Lire aussi : Le Sabot d’Or Charolais 2018 pour l’EARL de la Mare du Bois

Quel que soit leur potentiel génétique ou leur morphologie, toutes les femelles vides ou qui ne remplissent pas dans les délais impartis sont réformées au plus tôt. « Je surveille beaucoup, mais je n’échographie aucune vache pour limiter les frais. » Toutes sont en revanche fouillées mi-juillet au moment du sevrage.

Depuis deux ans, vaches et génisses sont équipées de collier Smarttag Nedap pour aider à la détection des chaleurs en les posant un bon mois avant le début des IA. « Maintenant on est deux à surveiller les chaleurs ! », souligne Didier Touillon en insistant aussi sur toute l’implication de Serge Levif, son salarié, pour arriver à ces résultats. Autre recette maison, toutes les reproductrices bénéficient d’un « flushing » avec ajout d’un kilo par tête, d’avoine dans la ration peu avant le début de la mise à la reproduction. « Tous les ingrédients sont présents dans la ration tout au long de la durée de l’hivernage. En revanche, leur proportion varie pour s’adapter aux besoins. Il est particulièrement important que les vaches soient en phase de reprise de poids au moment de la mise à la reproduction. »

Stabulations de 80 et 100 places

Sur la campagne 2020-2021, il y a eu 165 vêlages (dont 38 génisses) pour 177 veaux nés. Sept sont morts peu après le vêlage, soit un taux de prolificité de 107,3 % avec un IVV de 366 jours pour les multipares et 371 jours entre le premier et le second vêlage. Des chiffres sensiblement équivalents à ceux des années précédentes. La plupart des IA sont sur chaleurs naturelles. Un groupage est ponctuellement réalisé sur quelques primipares.

« J’ai deux stabulations pour les femelles suitées : une de 80 places pour les primipares vêlant à 2 ans ou à 3 ans et pour les jeunes vaches de 3 ans en second vêlage sans oublier la case de celles mises à la repro à 2 ans. Cela permet de bien surveiller leur alimentation et de leur réserver les meilleurs fourrages. En bâtiment, on a la possibilité de tout maîtriser. » La stabulation de 100 places est occupée par des multipares.

Mâles comme femelles, tous les veaux sont complémentés en bâtiment puis seulement les mâles en pâture. Le mélange distribué repose sur une association 22 % foin de luzerne, 24 % d’épeautre, 23 % de triticale, 15 % de pulpes sèches, 10 % de tourteau de colza, 4 % de tourteau de soja, 1 % de minéraux et 1 % d’anti-acidose (produit tampon à base de bicarbonate). Une moyenne de trois veaux par an rejoignent en fin d’été la station d’évaluation de l’Union charolais croissance à Créancey en Côte-d’Or et une demi-douzaine sont vendus sur la ferme pour la reproduction. « Au sevrage, la plupart d’entre eux intègrent cependant les cases du bâtiment d’engraissement. » Leur potentiel associé à leur morphologie fait que certains auront plus de chance que d’autres !

La part croissante du vêlage à 2 ans

Pour limiter la durée de vie improductive des femelles, une quarantaine de génisses vêlent à 2 ans.

Le vêlage 2 ans a été initié en 2004. « Je commençais à avoir quelques génisses qui passaient le cap des 700 kilos à la mise à la reproduction. Je me disais que c’était dommage de les faire attendre. J’ai commencé tout doucement puis j’ai graduellement augmenté le nombre. » Désormais toutes celles qui font plus de 450 kilos à 1 an sont inséminées. Soit une bonne quarantaine par an.

« C’est une bonne façon d’augmenter le nombre de kilos par UGB sans places de bâtiment supplémentaire. » Didier Touillon regrette en revanche un petit problème de fertilité sur ces femelles. Sur 40 mises à la repro à 14 mois cette année, 28 ont rempli (avec un seul retour). « C’est lié il me semble à une ration un peu trop 'dosée' en ensilage de maïs dans la mesure où ce lot est hiverné dans le bâtiment d’engraissement. Leur ration gagnerait probablement à comporter davantage d’ensilage d’herbe et de foin et moins de maïs. »

Les génisses vides à 1 an passent dans le lot de celles mises à la reproduction à 2 ans, mais dans les années à venir, l’objectif est de n’avoir pratiquement que des premiers vêlages à 2 ans. « C’est une façon d’avoir une assez large gamme de poids de carcasses sur les femelles finies et de mieux répondre en cela aux préoccupations de l’aval. Cela réduit également le nombre d’UGB improductives et conforte le bilan carbone de mon élevage », souligne Didier Touillon également administrateur de Sicarev. coop auprès de qui est commercialisée la totalité de ses animaux.

Toutes les femelles sont finies

Les génisses non mises à la reproduction étaient jusqu’à présent destinées à une production de génisses bouchères et vendues à un peu plus de 30 mois. Pour le lot né à l’automne 2019, la volonté est de faire évoluer la conduite en produisant des 30 mois uniquement avec celles susceptibles d’être classées au moins en U- et d’engraisser en babynettes abattues à 18-20 mois celles qui ont moins de potentiel. La quasi-totalité des mâles sont engraissés avec une ration basée sur l’ensilage de maïs, soit autour de 75 JB/an. Pour les cinq dernières campagnes, ils ont été vendus en moyenne à 15 mois et 27 jours pour un poids de carcasse de 458 kg.

En bref

270 ha dont 80 de cultures réparties entre 23 ha de maïs ensilage (non irrigué) et le complément en céréales à paille en diversifiant les espèces (blé tendre, triticale, orge d’hiver, épeautre, avoine) pour étaler les dates de chantier et jouer sur la diversité et la complémentarité de ces céréales pour les rations. Viennent s’y ajouter 5 ha de luzerne et une vingtaine d’hectares de prairies temporaires.

Sébastien Sydor, technicien à Alsoni Conseil élevage

Accentuer les efforts sur la gestion du pâturage

 

 
 © S. Sydor
© S. Sydor
« Sur cet élevage, l’objectif clairement affiché est de conforter le nombre de kilo par UGB avec, entre autres, la volonté de réduire la durée de vie improductive des animaux. Le choix de développer la part prise par le vêlage à 2 ans en fait évidemment partie. C’est donc un cheptel relativement jeune avec une moyenne d’âge de 4,2 ans et pas de vaches de plus de 9 ans. Pour faire progresser son outil de production, l’éleveur se remet en question en permanence. Il cherche à anticiper et s’interroge également pour faire évoluer le type et les différentes catégories d’animaux qu’il produit pour être en phase avec les évolutions du marché. Dans les années à venir, il entend mettre l’accent sur la gestion du pâturage et nous a demandé de faire des analyses comparatives sur les niveaux de croissance de certains lots selon la façon dont ils sont conduits à l’herbe. »

 

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