Maladies respiratoires, changer certaines pratiques non durables
La prévention des bronchopneumonies infectieuses enzootiques doit passer par la vaccination et la gestion des facteurs de risques. L’antibioprévention doit être abandonnée.
La prévention des bronchopneumonies infectieuses enzootiques doit passer par la vaccination et la gestion des facteurs de risques. L’antibioprévention doit être abandonnée.


Les bronchopneumonies infectieuses enzootiques (BPIE) sont des pathologies respiratoires très fréquentes en élevages dont l’impact technico-économique est important. Les infections respiratoires sont dues à différents agents infectieux, virus ou bactéries, certains plus pathogènes que d’autres (virus respiratoire syncytial, pasteurelles dont Mannheimia haemolytica). « Chaque année, on en découvre de nouveaux. L’action des pathogènes est séquentielle dans le temps, souvent les virus interviennent et font le lit des bactéries qui viennent compliquer l’infection virale. Le plus souvent, la présence de ces agents infectieux ne suffit pas à créer la maladie. Les BPIE ont en effet des origines multifactorielles. Autrement dit, il faut des circonstances favorisantes en lien avec l’animal et les conditions d’élevages », a rappelé Sébastien Assié, vétérinaire-enseignant à Nantes-Oniris, lors d’une conférence organisée au Space par le Laboratoire Ceva.
Dans le cadre des plans Ecoantibio, l’usage des antibiotiques doit diminuer. Pour y parvenir, il est nécessaire de prévenir l’apparition des BPIE. En effet, une fois l’animal malade, « il mérite un traitement antibiotique. La seule solution pour limiter le recours aux antibiotiques est donc de lutter contre les différents facteurs de risques qui facilitent leur entrée dans les élevages (ventilation, courant d’air, humidité, regroupement d’animaux de statut sanitaire différent…) et de faire appel à la vaccination. »
Privilégier un traitement curatif individuel et précoce
« Dans le contexte actuel, l’antibioprévention (administration d’un antibiotique à un lot à un moment donné du cycle de production pour prévenir la maladie) n’est pas une pratique durable. Elle est à proscrire. D’autre part, si un animal est détecté malade, la prise en charge médicale doit s’effectuer individuellement et précocement. Il s’avère qu’une étude récente sur des bolus prenant la température intraruminale pour repérer les animaux à plus de 40 °C a montré que les animaux n’étaient abattus que deux jours après l’apparition de la température. Ainsi, la surveillance telle que l’on peut la faire dans nos élevages ne permet souvent de détecter les animaux que 48 heures après le début de la montée en température. De plus, il a été constaté qu’elle n’était que partielle. Dans une autre étude par exemple, seulement un quart des bêtes malades a été identifié par les éleveurs. Une surveillance maximale des animaux reste de mise, même si cela est chronophage », observe Sébastien Assié. Plusieurs systèmes de capteurs de température sont apparus (boucle, bolus, caméra infrarouge) pour aider à la détection.
La métaphylaxie, traitement de la totalité d’un groupe d’animaux au-delà d’un seuil d’incidence clinique peut, selon la réglementation « être utilisée sous conditions : elle doit être prescrite par un vétérinaire après examen clinique. Le traitement curatif des animaux réellement malades à un stade précoce étant à privilégier. Le gros enjeu autour du traitement des BPIE est de trouver le traitement pour éviter les rechutes, les récidives et la propagation de la maladie. Certains antibiotiques peuvent être utilisés en première intention, d’autres uniquement en deuxième intention (rechutes). Ceux de première intention peuvent s’inscrire dans un protocole de soins défini avec son vétérinaire. »
Bien choisir son traitement
Trois données entrent en ligne de compte pour bien choisir son antibiotique. « Il faut qu’il soit actif contre les pasteurelles et qu’il diffuse bien dans les poumons. Il ne doit pas être critique (particulièrement générateur de résistance) et enfin, il doit être de longue action mais pas trop, au risque de favoriser l’apparition de résistances au niveau des flores commensales, intestinales notamment. Le traitement doit être administré tôt, à la bonne dose et sur une durée pas trop longue. À cet antibiotique de première intention, un AINS (anti-inflammatoire non stéroïdien) est à associer afin de lutter contre l’hyperthermie et l’inflammation du poumon à l’origine des retards de croissance. Si l’on manque de données scientifiques pour justifier l’intérêt économique de l’utilisation d’un AINS, l’intérêt médical est bien là (baisse de l’hyperthermie, amélioration des signes cliniques, réduction des phénomènes douloureux). »
Fréquence et impact économique
Il est compliqué de donner des chiffres relatifs à la fréquence et à l’impact économique des BPIE. En effet, dans la littérature scientifique la définition du malade est variable. « Ainsi, en considérant qu’un animal malade est un animal traité pour maladies respiratoires, c’est-à-dire un animal vu malade par l’éleveur et soigné car son état a été jugé suffisamment grave, les BPIE touchent 10 à 15 % des veaux laitiers, 15 à 20 % des veaux allaitants et plus de 20 % des jeunes bovins en lots », souligne Sébastien Assié. La fréquence moyenne est importante mais elle est très variable d’une exploitation à l’autre. Les travaux concernant l’impact sur les revenus en veaux allaitants (moins de six mois) sont anciens. En moyenne, les frais de traitements et d’interventions vétérinaires ne représentent que 14 % des pertes. « Ce qui coûte cher c’est, la mortalité, les retards de croissance mais également les cas subcliniques (animaux non détectés malades). Le taux de létalité oscille entre 3 et 10 %. En atelier d’engraissement, les BPIE représentent 45 à 60 % de la mortalité totale. L’impact économique varie entre 10 et 80 euros par jeune bovin mis en lots. »