Des rations autonomes pour des vêlages d’automne en bio
À la ferme expérimentale bio de Thorigné-d’Anjou, quatre rations ont été testées sur des vaches en vêlage d’automne. Cet essai montre que de bonnes performances zootechniques sont possibles avec des rations produites entièrement sur l’exploitation.
À la ferme expérimentale bio de Thorigné-d’Anjou, quatre rations ont été testées sur des vaches en vêlage d’automne. Cet essai montre que de bonnes performances zootechniques sont possibles avec des rations produites entièrement sur l’exploitation.
Faire vêler à l’automne en élevage bio, ce n’est pas choisir la facilité. Il s’agit de nourrir tout l’hiver des animaux à forts besoins, avec des stocks dont la valeur alimentaire varie fortement d’une année à l’autre. C’est pourtant le choix fait par 25 % des élevages bio de la région Pays de la Loire. D’ailleurs, les élevages conventionnels sont eux aussi 25 % à pratiquer le vêlage d’automne dans cette région, souvent couplé à des vêlages de printemps pour l’autre moitié du troupeau.
À la ferme expérimentale de Thorigné-d’Anjou dans le Maine-et-Loire, quatre rations ont été testées pour des Limousines vêlant d’août à octobre. L’objectif était de conserver l’autonomie alimentaire à l’échelle de la ferme, tout en visant de bonnes performances zootechniques.
Les quatre rations testées sont composées à partir des fourrages produits sur la ferme : foin de luzerne, foin de prairie temporaire à flore variée (au moins deux légumineuses et trois graminées), foin de prairie naturelle, ensilage d’un mélange de céréales et protéagineux (lire tableau). Les rations ont été calculées selon les recommandations Inra et rationnées. Les veaux sont complémentés en bâtiment (foin et concentré). Les performances des mères ont été évaluées par la variation de leur note d’état corporel, la variation de leur poids, leur production laitière et les résultats de reproduction. La croissance des veaux a été mesurée.
Les vaches expriment leur potentiel laitier avec les quatre rations
« Nous n’avons pas observé d’effet de la ration sur la production laitière. Avec ces quatre rations, les vaches expriment donc tout leur potentiel laitier », analyse Julien Fortin, responsable de la ferme expérimentale de Thorigné d’Anjou. Au « pic », la production laitière est autour de 7,5 litres de lait par jour. Les multipares produisent en moyenne 1,3 kg de lait par jour de plus que les multipares et la persistance de la lactation est meilleure après 150 jours de lactation (+ 1,7 kg/j) (lire Réussir Bovins viande, février 2018, p. 44). L’essai montre que dans le cas où la ration ne couvre pas complètement les besoins azotés, comme c’est le cas pour la ration « foin de prairie naturelle et ensilage de céréales et protéagineux », la vache puise dans ses réserves puisqu’elle maintient sa production laitière.
Toutes les vaches ont perdu du poids au cours de la phase en bâtiment, mais il n’y a pas de différence significative sur ce critère selon la ration. La note moyenne d’état corporel des vaches est de 1,9 le 15 mars. Aucun impact de la ration sur la reproduction n’a non plus été relevé à l’échelle du troupeau, avec un taux de gestation global conforme (82 %). Par contre, un gros effet de la parité a été constaté. Les primipares ont eu un taux de gestation moyen de 64 % contre 89 % pour les multipares.
Sur la croissance des veaux, le régime n’a pas eu d’impact non plus, mais là aussi on retrouve un effet de la parité. Les veaux de primipares boivent moins de lait que ceux de multipares et on suppose aussi un effet génétique de leur ascendance paternelle (leur père étant un taureau facilité de naissance). Les mâles ont réalisé une croissance moyenne de 1 202 g/j et les femelles de 1 139 g/j entre la naissance et le sevrage. Ils sont sevrés à l’âge de neuf mois à 353 kg pour les mâles et 341 kg pour les femelles.
Globalement, les performances se sont maintenues ensuite au pâturage. Les lots de vaches suitées tournent sur quatre à six parcelles sur des prairies à flore variée (chargement 38 à 48 ares/UGB), et les veaux ne sont pas complémentés. Les pertes de poids des vaches sont largement compensées au pâturage.
Caractériser ses fourrages et calculer une ration
« Plusieurs solutions de rationnement fonctionnent donc, commente Julien Fortin. Le coût des quatre rations reste modeste. » Si on regarde de près les coûts alimentaires pour 100 kg de viande vive produits, la ration la plus intéressante est « foin de luzerne et ensilage de céréales et protéagineux ». Celle qui consomme le plus de surfaces, « foin de prairie naturelle et ensilage de mélange céréales et protéagineux », est aussi celle qui revient le plus cher. Cependant, il faut tenir compte, pour départager les quatre rations, d’un effet année non négligeable qui n’est ici pas visible sur un an d’essai.
« Le vêlage d’automne est tout à fait possible en bio, conclut Julien Fortin. L’important est de distribuer une ration toujours équilibrée pour que les vaches expriment leur potentiel laitier. On peut compter sur la mobilisation des réserves des vaches. Le tout est donc de caractériser ses fourrages pour calculer une ration, et de distribuer les bonnes quantités. Une attention particulière aux primipares est nécessaire. Il faut les séparer des multipares et adapter leur ration pour assurer leurs performances. »