Culture Viande : « Nous cherchons à mieux cibler la contractualisation avec les éleveurs »
Yves Fantou, élu en septembre 2023 président de Culture viande, place au cœur de son mandat la valorisation du travail des métiers de la viande, et souhaite renforcer la logique de contractualisation avec les éleveurs.
Yves Fantou, élu en septembre 2023 président de Culture viande, place au cœur de son mandat la valorisation du travail des métiers de la viande, et souhaite renforcer la logique de contractualisation avec les éleveurs.
Quels sont les objectifs de votre mandat ?
Yves Fantou : Nous avons regroupé en 2020 deux syndicats sous la bannière de Culture viande ; il faut que nous continuions à fédérer l’ensemble des entreprises du secteur de la viande. Nous avons une ambition : valoriser nos métiers et nos entreprises, montrer la complexité de nos métiers, et expliquer qu’un steak qui arrive dans un magasin ou dans l’assiette du consommateur, c’est énormément de travail en amont. Non, ça ne tombe pas du ciel.
Nous avons ciblé nos actions autour de trois axes : affirmer l’expertise viandes, accompagner les adhérents de Culture viande, et promouvoir le produit viande et la noblesse de nos métiers. Le slogan d’Interbev est « aimez la viande, mangez-en mieux » : c’est à nous de proposer le mieux. Nous voulons faire progresser tous nos adhérents dans leurs performances sanitaires, sociales et économiques.
Comment faites-vous face à la décapitalisation ?
Y. F. : Nous cherchons à contrer cette décapitalisation, au moins la stopper. Nous avons besoin que les producteurs vivent de leur métier et soient en capacité de produire.
Nous devons couvrir nos approvisionnements, pour cela nous cherchons à contractualiser. Avant même Egalim, Culture viande a encouragé la contractualisation depuis des années et nous continuons à travailler sur ces sujets-là. Certaines entreprises s’engagent déjà avec les producteurs pour avoir tel ou tel type d’animaux. Cela nécessite de gros moyens parce que ce sont des cycles longs, notamment sur le bœuf. Le veau, lui, est totalement intégré depuis des années, et cela se développe dans le bœuf. Nous cherchons à renforcer la contractualisation afin que de plus en plus d’éleveurs puissent y adhérer.
La rémunération passe aussi par l’équilibre matière. Comment est-il géré ?
Y. F. : La part du haché augmente depuis plusieurs années. C’était nécessaire, car aujourd’hui toutes les pièces avant, auparavant consommés en cuisson lente, passent en steak haché. Ce produit est devenu numéro un des ventes. À peu près 60 % des volumes de bœuf sont vendus sous la forme de produits élaborés ou en steak haché. C’est énorme.
Aujourd’hui, c’est le steak haché qui permet l’équilibre matière. Il trouve des débouchés dans la restauration collective, à domicile ou commerciale, qui font aussi appel à l’importation. La forte chute du prix des coproduits rend aussi plus difficile l’accès de l’équilibre matière.
Finalement, nous achetons les animaux plus cher, les coproduits ont baissé, nous allons vendre peut-être un peu moins cher la viande… D’où les difficultés rencontrées par les abattoirs qui ne peuvent pas toujours réaliser les investissements qui seraient nécessaires d’un point de vue économique notamment.
Quelle serait la porte de sortie ?
Y. F. : La restructuration est déjà entamée pas des grands groupes, d’autres l’ont annoncée. Je ne dis pas qu’il ne faut que des gros outils ! Car les outils de différentes tailles sont complémentaires et se positionnent souvent sur des marchés différents : les petits vont être spécialisés plutôt sur les abattages familiaux, tandis que les plus gros viseront des marchés nationaux, voire d’export.
Arrivera-t-on à stabiliser la situation ? Nous devons continuer à monter en compétences et en qualité : qualité de produit, qualité sanitaire, etc. Nous souhaitons que toutes nos entreprises progressent, afin d’aller chercher de la valeur ajoutée pour les producteurs et pour nos entreprises.
Comment garder un maillage des abattoirs au niveau territorial ?
Y.F. : Les études [pour la Stratégie Abattoir] sont en cours, je ne pourrai donc pas donner davantage de précisions. Je pense qu’il faut être vigilant sur la création de nouveaux outils. Il y a aujourd’hui des projets qu’on a du mal à comprendre. S’il s’agit d’un nouvel outil dans un projet privé, ça ne me pose aucun problème, nous ne sommes pas là pour bloquer la concurrence. En revanche, ne finançons pas avec de l’argent public des outils qui seront quasiment obligatoirement déficitaires. Le Plan abattoir doit renforcer exclusivement les outils d’abattage conformes à la totalité de la législation, dotés d’une structure viable et ne rentrant pas dans un système subventionné de concurrence déloyale. Des outils de service public peuvent être envisagés, mais ce sont des situations particulières dans laquelle il faut des engagements de l’ensemble des parties prenantes.
Chiffres clés
Culture viande représente :
- 290 entreprises
- 85 % des abattages de gros bovins
- 88 % des abattages de veaux