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Culture Viande : l’industrie de la viande dans le rouge

Les entreprises d’abattage-découpe traversent une passe particulièrement délicate avec la baisse des abattages. À l’occasion du congrès de Culture Viande, tenu le 15 octobre 2024, elles ont tenté de tracer quelques pistes pour préserver leur activité.

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La baisse des abattages bovins, la hausse des prix des animaux et surtout des charges expliquent la dégringolade de l’industrie de la viande bovine française en 2023.
© Gutner

L’érosion de la production bovine, et dans une moindre mesure, porcine, pourrait hypothéquer l’avenir de bon nombre de sites d’abattage-découpe en France. C’est le constat qu’ont tiré le 15 octobre dernier les participants au congrès annuel de Culture Viande, la fédération des entreprises du secteur, certaines traversant actuellement de graves difficultés économiques.

La baisse des abattages bovins, la hausse des prix des animaux et surtout des charges expliquent la dégringolade de l’industrie de la viande bovine française en 2023. « Habituée à vivre avec des taux de résultat courant avant impôt très faibles mais malgré tout légèrement positifs, les résultats des entreprises du secteur sont devenus déficitaires en 2023 », note le rapport d’activité de la fédération. Selon l’Observatoire de formation des prix et des marges de juillet 2024, le résultat courant moyen avant impôt des industries d’abattage et de transformation s’établit en effet à -0,9 %.

Un abattoir en moins par mois

Cette situation a contribué à accélérer une restructuration du maillon intermédiaire du secteur pourtant déjà bien entamée. En France, « entre 2010 et 2020, on est passé de 270 abattoirs de boucherie à 180 », a précisé Boris Duflot, directeur du département Économie à l’Institut de l’élevage (Idele) lors de l’assemblée générale de Culture Viande, citant les statistiques du ministère de l’Agriculture. « C’était déjà un rythme important, mais il s’est accentué, puisqu’on en est aujourd’hui à un abattoir qui ferme chaque mois ».

À ce jour, une trentaine d’abattoirs seraient en grande difficulté, a-t-on appris au cours du congrès. Le phénomène affecte même le leader du secteur, le groupe Bigard, comme en témoigne le plan annoncé par l’entreprise sur le site Charal de Sablé-sur-Sarthe (72). Ce dernier va en effet être dépossédé de son activité d’abattage de bovins pour être recentré sur des missions logistiques, une évolution qui menace directement 200 postes sur les 300 emplois actuels mais prive également les éleveurs locaux d’un interlocuteur important.

La décapitalisation se poursuit

Même si le rythme de décapitalisation du cheptel tend à se ralentir (-2,5 % en 2023, -2,1 % au premier quadrimestre 2024), la situation reste préoccupante, a poursuivi Boris Duflot d’Idele qui souligne que les abattages de gros bovins ont continué à baisser de 8 % en 2023. Selon la société de conseil Ceresco, la poursuite de la baisse du cheptel au rythme de 2 % par an aboutirait à une chute de 15 % du cheptel laitier et de 23 % du cheptel allaitant d’ici 2030. Une mauvaise nouvelle pour les prairies - et donc pour la captation du carbone - puisque les besoins en prairies permanentes plongeraient d’ici quinze ans de 1,1 à 1,4 Mha, selon Ceresco.

Les entreprises ont cependant tenté de mettre en lumière les quelques évolutions favorables actuelles comme l’augmentation des effectifs de génisses allaitantes et celle des achats de broutards destinés aux ateliers d’engraissement français. « Ces premiers signaux positifs, encore insuffisants, devront se confirmer et s’accroître dans les prochains mois afin de retrouver une situation plus saine », estiment les responsables de la fédération qui ont planché sur les leviers dont disposaient les entreprises pour alimenter leurs outils.

Relance de l’engraissement et contractualisation

En matière de troupeau allaitant, Ludovic Paccard, le directeur général du groupe Sicarev, a évoqué la possibilité, à court terme, de relancer l’engraissement de jeunes bovins « en captant une partie du million d’animaux qui franchissent chaque année les Alpes ou les Pyrénées ». « Nous voyons apparaître de nouveaux marchés sur le jeune bovin, en France, mais aussi à l’export comme vers la Turquie, l’Algérie ou le Maroc qui sont demandeurs auquel les entreprises ont accès ». À plus long terme, le dirigeant du géant coopératif de la viande a évoqué la volonté de s’appuyer « sur une jeune génération d’éleveurs engagés dans des projets d’entreprise innovants, associant par exemple le biogaz ou le photovoltaïque ». « On peut aussi améliorer l’adaptation de notre produit au marché sur des segments où nous avons perdu du terrain », a-t-il expliqué. « Certaines races ont un potentiel génétique permettant de travailler sur leur précocité, de manière à sortir des animaux plus jeunes, aux poids carcasses plus faibles et aux niveaux de persillé correspondants aux attentes des consommateurs ».

Les différents intervenants ont aussi insisté sur le rôle positif joué par la contractualisation pour approvisionner les abattoirs. « La contractualisation a considérablement augmenté depuis 2023 », s’est félicité en conclusion le président de Culture Viande Yves Fantou, même si elle est plus adaptée aux animaux « à cycle court ». « Avec cet outil, il y a matière à relancer la machine et sécuriser les relations entre les éleveurs et les entreprises ».

Pour en savoir plus, lire l’interview d’Yves Fantou, président de Culture Viande | « Nous cherchons à mieux cibler la contractualisation avec les éleveurs »

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