Boiteries : « Nous avons dû jouer sur plusieurs fronts pour lutter contre panaris, Mortellaro et fourbure »
Gwendal Marchand a résolu une bonne partie des problèmes de boiteries sur son exploitation grâce à un audit approfondi avec son vétérinaire. Ensemble, ils ont identifié les sources d'infection, établi des priorités et mis en place des solutions efficaces.
Gwendal Marchand a résolu une bonne partie des problèmes de boiteries sur son exploitation grâce à un audit approfondi avec son vétérinaire. Ensemble, ils ont identifié les sources d'infection, établi des priorités et mis en place des solutions efficaces.
Gwendal Marchand, engraisseur à Beignon dans le Morbihan, porte une attention particulière à l’état sanitaire de son exploitation. Il engraisse des broutards, qui passent au moins trois semaines en quarantaine avant d’être transférés en bâtiment d’engraissement. À ce moment, la quarantaine est lavée, désinfectée et de la chaux vive est mise au sol. Il pèse ses animaux tous les deux mois, et les soigne deux fois par jour. Ce sont les moments clés où l’éleveur peut détecter une anomalie chez ses bovins. « Dès que j’en vois un qui ne se lève pas, je vais le voir. »
En cas de doute, Gwendal les place en cage de contention et ausculte leurs pieds. « Il y a deux ans, je pensais que certains de mes animaux avaient du panaris. En les observant, je me suis rendu compte que la lésion ressemblait davantage à la boule rouge (comme une cerise) caractéristique de la maladie de Mortellaro. » À l’été 2022, les boiteries se sont multipliées. Gwendal fait alors le point avec son vétérinaire de coopérative, Guillaume Perrin. Le diagnostic est sans appel : 12 cas de dermatite digitale, 7 panaris et quelques fourbures. Les animaux atteints sont majoritairement ceux dont la croissance est déjà bien avancée (550 à 600 kg). Ils se lèvent de moins en moins, allant jusqu’à diminuer leur alimentation et leur abreuvement. « Ça se voyait qu’ils avaient maigri. Je les parais, les traitais et faisais des pansements si nécessaire. Dès que l’infection se stabilisait, les bovins concernés partaient pour la vente de façon précoce (650 à 680 kg). »
Diminuer l’humidité de la litière, le risque d’acidose et le temps de station debout
Comme les boiteries sont multifactorielles, déterminer leur origine peut s’avérer complexe. C’est pourquoi en octobre 2022, l’éleveur et son vétérinaire effectuent un audit complet de la ferme. Ensemble, ils identifient plusieurs points à améliorer. Tout d’abord, diminuer l’humidité de la litière. En effet, Gwendal engraisse ses jeunes bovins sur litière accumulée de paille, « et notamment l’été, les animaux jouent avec l’eau, transpirent et font de la condensation dans le bâtiment » expose-t-il. La ventilation a été améliorée et depuis l’été dernier, Gwendal utilise de la poudre asséchante contenant une bactérie afin d’assainir la litière.
Le temps d’attente pour l’abreuvement et l’alimentation est un autre facteur aggravant des boiteries des bovins. Chez Gwendal, le débit des abreuvoirs a donc été augmenté de 10 L/min à 12 L/min. Enfin, comme l'explique Guillaume Perrin : « La fourbure est une inflammation qui apparait en réponse à l’acidose, augmentant la production de vasoconstricteurs. Or dans les pieds des bovins les vaisseaux sanguins sont déjà de faible diamètre, donc la circulation sanguine y est affaiblie et l'inflammation apparaît. » Un moyen de prévenir la fourbure est donc d’éviter au maximum les situations d’acidose. Cependant, l’alimentation des jeunes bovins engraissés est dense énergétiquement – et donc frôle l’acidose - pour obtenir les performances adéquates. Les cures de substances tampons (acidoline), prises sous forme de granulés mélangés à la ration, régulent l’acidité du rumen. « Les 150 bovins du bâtiment d’engraissement ont reçu une cure de trois semaines pour un coût de revient de 17 centimes par jour et par bovin » précise-t-il. Un an plus tard, trois cas de Mortellaro ont été vus sur l'année, les cas de fourbure ont quasiment disparu, mais le panaris se maintient. Cet hiver, il y a moins de problèmes mais Gwendal reste alerte : « Une prochaine étape serait d’installer un pédiluve à sec à la pesée, toujours pour sécher les pieds de bovins ».
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Chiffres clés
- 350 à 430 jeunes bovins charolais et limousins engraissés par an. Achat à 8-10 mois, 320 kg à 350 kg, et vente à 16-20 mois, 750 kg
- 67 ha blé, ensilage de maïs, triticale, 10 ha d’herbe (foin)
Côté éco
- Poudre asséchante : 50 g/m² de litière, 25 euros/kg
- Acidoline : 100 g/bovin/jour pendant 3 semaines, 41 euros/25 kg
Guillaume Perrin, vétérinaire chez Terrena
« Anticiper et planifier les actions pour diminuer les boiteries »
« Lorsqu’un animal présente des symptômes, un train peut en cacher un autre… J’essaie donc d’être le plus exhaustif possible en faisant le tour de tout ce qui peut jouer en faveur des boiteries sur l’exploitation. Lors de l’audit, on vérifie notamment la densité de logement des animaux, leur état corporel, leur alimentation, la qualité de la ventilation des bâtiments, l’attente ou non des animaux pour l’alimentation et pour l’abreuvement. Dans le cas de Gwendal, la densité de logement était suffisante. Pour les autres paramètres, nous les avons classés selon leur facilité de gestion dans le court/moyen terme. Nous avons mené une action à la fois, afin de voir ce qui a le plus d’impact sur l’état des animaux. En planifiant de la sorte, on ne s’éparpille pas à essayer de tout résoudre en même temps et on étale les potentiels coûts d’aménagement. Avec les mesures préventives, on s’arme au maximum pour éviter de payer le prix de la baisse de production et des traitements curatifs. »