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Au Gaec Dubrion : finition de femelles avec 100 % d’herbe pâturée

Au Gaec Dubrion, une partie des femelles sont finies à l’herbe. L’adoption, l’an dernier, du pâturage tournant a permis de ne pas avoir recours au concentré pour un lot de vaches finies au cours du printemps.

« J’engraisse toutes les femelles nées sur l’exploitation. En année de croisière, cela représente une petite vingtaine de vaches et une douzaine de génisses lourdes, lesquelles sont abattues selon leur potentiel entre 30 mois et un peu plus de trois ans », explique Baptiste Dubrion en Gaec avec son épouse à Ciry-le-Noble, près de Montceau-les-Mines, en Saône-et-Loire. Autant de Charolaises vendues en confiance à la société Gessler dans l’Ain et valorisées pour les meilleures dans le cadre du label rouge Charolais Terroir. Au printemps, les vaches suitées destinées à être réformées sont rassemblées en un petit lot sans taureau. À l’automne, une fois leur veau sevré, les plus âgées et celles qui ont le moins de potentiel sont finies dès la rentrée en bâtiment. Les autres prolongent leur séjour à l’herbe le plus longtemps possible, puis sont hivernées avec uniquement des fourrages grossiers (enrubannage et paille). En cours d’hiver leur nombre est conforté par quelques jeunes vaches qui ont perdu leur veau.

Avec l’arrivée des beaux jours, ces jeunes vaches sont remises à l’herbe dès la mi-mars en constituant dans un premier temps des microlots de trois têtes réparties sur de grandes surfaces, de façon à utiliser au mieux les premières repousses en limitant les risques de piétinement. « Nos parcelles sont sur sols argileux. Au printemps, on craint les excès d’eau. » Début avril, ce lot de réformes est regroupé sur la parcelle utilisée pour leur finition. Les génisses de deux ans, non conservées pour le renouvellement, viennent les rejoindre. « On a toujours fini un lot de femelles à l’herbe sur cette prairie permanente de 7,5 hectares. C’est une des meilleures pâtures de l’exploitation. »

Du pâturage continu au pâturage tournant

Jusqu’en 2018, ce lot était en pâturage continu tout au long du printemps. La complémentation à l’auge avec un aliment complet à 17 % de protéine démarrait à compter de fin mai à 2 kg/tête puis montait progressivement à pratiquement 5 kg/tête en début d’été quelques jours avant l’abattage. « Il y a deux ans, j’ai suivi une formation au pâturage tournant organisée par la chambre d’agriculture. Cela m’a incité à faire évoluer la conduite en choisissant de démarrer le pâturage tournant avec ce lot. » L’ambition était aussi de conforter l’autonomie alimentaire de l’exploitation. Pour cela, la parcelle d’embouche a été redécoupée début 2019 en sept longues bandes de 0,8 ha (environ 45 m de large et 170 m de long) avec perpendiculairement deux couloirs de circulation en accès permanent permettant d’un côté un accès facile au point d’eau et de l’autre à un parc de reprise où étaient jusque-là positionnées les auges utilisées pour la complémentation et un râtelier de paille à libre disposition. « L’an dernier, elles n’en ont consommé que deux bottes de 400 kg mais il est important qu’elles puissent y avoir accès. » En 2019, ce lot de 9 jeunes vaches (4 à 8 ans) et 13 génisses de deux ans ont rejoint la parcelle d’embouche mi-avril, soit un chargement global de 38 ares/UGB au printemps. Tous les trois jours, elles ont eu accès à un nouveau « couloir » avec simultanément fermeture du précédent de façon à ne pas pénaliser les jeunes pousses. « Ce qui m’a surpris, c’est la capacité de l’herbe à repartir juste après le passage d’un lot, même si le paddock a été un peu piétiné. »

Quatre séances de pesée

Entre mi-mars et fin juin, Alsoni Conseil élevage a procédé à quatre séances de pesée individuelle après avoir relevé la note d’état corporel de ces vaches et génisses lors de la première pesée. Les vaches ont réalisé de bonnes performances. Elles ont pris en moyenne un peu plus de 130 kg entre le 20 mars et le 21 juin, soit un GMQ moyen de 1,6 kg sur cette période avec uniquement de l’herbe pâturée. Le poids vif peu avant l’abattage oscillait entre 712 et 904 kg pour une moyenne de 761 kg. Hormis une, insuffisamment finie, donc complémentée tout au long du mois de juillet, les autres vaches ont été abattues la première semaine de juillet. Les poids carcasse ont oscillé entre 400 et 477 kg pour une moyenne de 422 kg. Toutes ont été notées 3 en état d’engraissement. La date de départ a été décidée par Baptiste Dubrion en concertation avec son acheteur habituel. « Mon abatteur n’a rien noté de particulier sur les carcasses. Il les a analysées comme correctement finies. » Eu égard à leur morphologie et format, Baptiste Dubrion estime que cette absence de complémentation s’est en moyenne traduite par une vingtaine de kilos de carcasse en moins. Un manque à gagner compensé par l’aliment non acheté et par la réduction du temps de travail. « C’est aussi plus agréable et moins fatiguant de se contenter d’ouvrir et refermer les clôtures des paddocks plutôt que de garnir des auges avec des seaux d’aliment », souligne le jeune éleveur globalement convaincu par l’évolution de ses pratiques. Pas question en revanche de mettre en place des céréales pour gagner en autonomie alimentaire. « Le potentiel des terres est modeste. Je ne dispose pas du matériel nécessaire et faire des heures de tracteur n’est pas mon objectif. Je préfère miser sur la bonne productivité des surfaces en herbe associée à une bonne gestion de cette ressource. »

Finition des génisses en bâtiment

Pour les génisses, le gain de poids a en moyenne été de 106 kg entre début avril et fin juin avec un poids vif moyen de 472 kg au moment de la mise à l’herbe. Comparativement aux vaches, Baptiste Dubrion attribue ces moins bonnes performances à une mise à l’herbe plus tardive et une transition alimentaire encore imparfaite en début de période. Au cours de la première quinzaine d’avril, les génisses n’auraient pas été en mesure de valoriser pleinement l’herbe de début de printemps. Le GMQ moyen constaté entre la première pesée (le 20 mars) et la seconde (le 17 avril) a été inférieur à 500 g/j. Il a par la suite approché celui des vaches.
L’idéal aurait été de faire abattre une partie de ces génisses à compter de la fin de l’été en particulier les moins prometteuses côté poids et conformation. La sécheresse 2019 a contrarié ces objectifs. Mais pour les plus lourdes et les plus épaisses, la volonté a toujours été de poursuivre leur finition en bâtiment pour un abattage s’étalant à compter de la fin de l’automne jusqu’au début du printemps.

Chiffres clés

Gaec Dubrion entre époux

110 ha avec 100 % de prairies permanentes
75 vêlages/an centrés sur février
2 UTH
38 chèvres en transformation fermière

Une météo 2019 particulière

La quasi-absence de précipitations tout au long de l’été 2019 a perturbé ce travail de finition à l’herbe.

Sur cette parcelle au sol argileux qui craint les excès d’eau, le printemps 2019 avait été globalement favorable. Il n’en a pas été de même en été. « Mais en année plus ‘normale’avec quelques belles pluies orageuses en juillet-août, il doit être possible de finir à l’herbe au moins une partie des génisses pour les faire abattre en cours d’automne sans avoir à les rentrer. »
L’an dernier les premières vraies pluies sont tombées en octobre. Elles ont permis une belle repousse en novembre, laquelle a été utilisée par le lot de laitonnes remises à l’herbe quinze jours après avoir été sevrées. « La parcelle était magnifique avec un regain superbe qui commençait presque à verser. » Début janvier il restait d’ailleurs encore six laitonnes dans la parcelle avec un râtelier de foin à libre disposition mais elles n’y avaient recours que de façon bien modeste. « Je m’apprête à les rentrer. Même en mangeant peu de foin et zéro concentré, elles sont restées bien en état, mais je ne veux pas prendre le risque de dégrader la parcelle et la finition à l’herbe du prochain lot ! »

F. A.

Fertilisation modérée

Comme les autres pâtures de l’exploitation, la parcelle utilisée en finition est au besoin hersée mais rien de systématique sur l’ensemble de la surface. « Je ne le fais qu’en cas de besoin, aux endroits un peu dégradés ou pour araser ponctuellement des taupinières », précise Baptiste Dubrion. Côté fertilisation, cette dernière se résume à 15 t/ha de fumier bien décomposé tous les deux à trois ans complété par environ 300 kg/ha de chaux tous les trois à quatre ans.

Mise en route du pâturage tournant pour les taurillons maigres

Les mâles sont tous vendus maigres mais avec deux modes de conduite différents. Les plus âgés sont commercialisés alourdis en cours d’hiver comme broutards repoussés. Les plus jeunes sont destinés à une production de taurillons d’herbe maigres. Hivernés avec une ration économique, l’objectif est de leur faire prendre des kilos avec d’abord de l’herbe pâturée. Les bons résultats obtenus en pâturage tournant avec les vaches à l’engrais ont décidé Baptiste Dubrion à opter à partir de cette année pour ce mode de conduite. Avec ce lot d’une quinzaine de mâles, l’habituelle bonne pâture qui leur est attribué va aussi être recoupée en plusieurs bandes — successivement utilisées par ce lot — selon le même principe que ce qui est déjà utilisé pour les femelles à l’engrais.

Avis d’expert - Sarah Besombes, chambre d’agriculture de Saône-et-Loire

Un printemps 2019 favorable à ce mode de conduite

"Les valeurs alimentaires de l’herbe de printemps prélevée dans la prairie utilisée pour l’engraissement sont proches de celles d’un concentré. Il s’agit d’une herbe feuillue obtenue avec un pâturage tournant bien géré et prélevée au bon stade entre 6 et 12 cm en mimant ce que fait une vache en broutant. Au-delà de 12 cm de hauteur, la part des fibres progresse et se ressent sur les valeurs alimentaires. Avec une herbe très riche, il est important de mettre un fourrage grossier (type foin ou paille) à disposition. L’existence d’un tapis fibreux dans la panse favorise l’activité du rumen et même si elle est consommée en quantité modeste, elle favorise une meilleure valorisation de l’herbe de printemps. Certaines parcelles sont forcément plus propices que d’autres à une finition à l’herbe, mais les résultats obtenus au Gaec Dubrion comme dans d’autres élevages, attestent qu’il est possible d’obtenir une finition à l’herbe sans apport de concentré. Quand les sols sont suffisamment portants, il est important de sortir les animaux le plus tôt possible. Ils vont s’'herber' de bonne heure et la transition alimentaire aura déjà eu lieu quand la pleine pousse va démarrer. La météo sèche du printemps 2019 a aussi, il est vrai, été favorable à ce mode de conduite dans les élevages disposant de parcelles argileuses sensibles aux excès d’eau comme c’est le cas au Gaec Dubrion. »

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