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L’alimentation animale bio manque de matières premières

Le secteur de l’alimentation animale biologique bénéficie d’une croissance importante. Mais la production végétale française insuffisante l’oblige à compléter ses besoins par des ressources importées.

La pression sur la disponibilité des matières premières se fait ressentir au sein du secteur de l’élevage
© L. Guilemin/Ll'Agriculteur Charentais

Des surfaces biologiques françaises en hausse

Depuis 2015, le développement des surfaces biologiques s’accélère, avec une vague de conversions importante. En 2017 d’après l’Agence Bio, les surfaces en grandes cultures bio représentaient 23 % de la SAU française bio et les surfaces fourragères 65 %. Entre 2016 et 2017, les surfaces de grandes cultures bio ont augmenté de 16 %, mais leur place reste modeste. Elles ne représentent que 3,3 % des grandes cultures françaises (contre 9,2 % pour les surfaces fourragères et 19,5 % pour les fruits).

Au sein des grandes cultures biologiques la part des céréales est prépondérante et représente 74 % de la collecte en 2017. Les oléagineux constituent 15 % de la collecte et les protéagineux 7 %. Du fait des limitations imposées en agriculture biologique (produits phytosanitaires, engrais), les cultures nécessitant des apports importants d’intrants voient leurs rendements baisser. C’est le cas du colza, dont la production biologique est quasi inexistante, tandis que le soja, bien adapté à un faible apport d’intrants, représente 59 % des oléagineux biologiques cultivés en 2017. Le blé biologique affiche des rendements plus faibles car il est doublement pénalisé par l’absence d’apports en azote et par la faible place du bio dans les bassins à très haut potentiel.

Concurrence sur la ressource entre l’alimentation humaine et animale

L’approvisionnement en France du secteur de l’alimentation animale biologique repose en grande partie sur les volumes en C2 : cultures en deuxième année de conversion vers l’agriculture biologique, valorisables en bio en alimentation animale mais pas en alimentation humaine. Mais la faible disponibilité en matières premières biologiques en France oblige les opérateurs à importer une partie de leurs besoins. D’après les données de France AgriMer pour la campagne 2017/18, 20 % du blé tendre biologique consommé en France est issu de l’importation. Il est majoritairement alloué à l’alimentation humaine qui capte plus de 70 % des volumes contre un peu plus de 20 % pour l’alimentation animale. C’est ce déséquilibre entre alimentation humaine et animale qui explique l’incorporation plus importante qu’en conventionnel du triticale et de l’orge dans les rations animales biologiques. Les importations du total du soja utilisé en France s’élèvent à 40 %. Le soja biologique français est, comme en conventionnel, préférentiellement destiné à l’alimentation humaine, bien qu’une partie revienne après trituration (tourteaux) dans les circuits d’alimentation animale.

La pression sur la disponibilité des matières premières se fait ressentir au sein du secteur de l’élevage, avec toutefois des impacts économiques différents entre les filières. Les rations porcines incorporent plus de protéagineux, ce qui permet de diminuer les incorporations en tourteaux. Les rations de volailles de chair et pondeuses affichent une part de tourteaux de soja qui varie entre 15 et 25 % de la ration contre 10 à 20 % pour les rations porcines.

Les FAB sécurisent leurs approvisionnements

Face aux difficultés d’accès aux matières premières, les FAB s’adaptent par des stratégies leur permettant de sécuriser leurs approvisionnements. La contractualisation entre les FAB et les agriculteurs est une pratique très courante. Ces contrats à moyen et long terme (durée annuelle et pluriannuelle) expliquent la stabilité des prix constatée depuis environ cinq ans. C’est un marché de gré à gré qui affiche des cours bien plus élevées qu’en conventionnel, en particulier pour le tourteau de soja (différence d’environ + 400 €/t).

Les importations sont incontournables actuellement et le secteur investit à l’étranger pour sécuriser ses approvisionnements. La Chine constitue à l’heure actuelle le premier exportateur mondial de tourteau de soja bio, mais la traçabilité de sa filière suscite quelques réserves. L’Inde ou encore des pays d’Afrique de l’Ouest développent la culture de rente du soja biologique destinée à l’exportation. Les pays de la mer Noire sont d’importants fournisseurs de tourteaux biologiques dans l’UE.

Quelle bio pour demain ?

L’accès aux ressources alimentaires constitue un des principaux freins au développement de l’élevage biologique en France. Bien que la production végétale augmente en France, la démarche de conversion du conventionnel vers le biologique pour les cultures est complexe. Le secteur de l’alimentation animale biologique repose quant à lui de façon non négligeable sur les importations. Se posent alors les questions de l’évolution de la dépendance aux importations en France et de la cohérence de la production bio, avec la montée en puissance des attentes de relocalisation de l’alimentation humaine et animale.

Une conjoncture défavorable pour la campagne 2018/19

La variabilité des rendements est plus importante en bio qu’en conventionnel. Les aléas climatiques en 2018 auront impacté à la baisse les rendements des grandes cultures en France, en bio comme en conventionnel, pour la campagne 2018/19. Tandis que la demande en matières premières biologiques augmente, on constate une baisse de la collecte à la mi-campagne (d’après France AgriMer, chiffres provisoires) : - 9 % en céréales, - 3 % en oléagineux et - 12 % en protéagineux. La campagne 2018/19 verra donc une hausse des importations en matières premières issues des grandes cultures biologiques. Parallèlement, pour sécuriser l’origine France des matières premières biologiques, la contractualisation entre industriels et producteurs devrait se renforcer.

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