Bientôt des plants de vigne tolérants à la sécheresse ?
L'entreprise Farm3 travaille sur la production de plants de vignes dans les conditions contrôlées d'une serre aéroponique. Une des applications pourrait être de les acclimater à la sécheresse pour réduire leur sensibilité, méthode déjà éprouvée en foresterie.
Fondée en 2019, l’entreprise franc-comtoise Farm3 a délaissé sa vocation de production maraîchère en hydro et aéroponie pour se concentrer sur de la recherche pour le végétal. Elle travaille depuis peu avec la maison champenoise Moët & Chandon sur l’élaboration de plants de vigne en serre aéroponique. L’avantage de la chambre de culture de Farm3 étant de pouvoir maîtriser différents paramètres comme l’humidité, la température, la lumière ou encore la concentration de CO2, et étudier le poids de ces facteurs sur la stratification, la croissance et l’aoûtement. « Les premiers résultats sont encourageants, dévoile Henri Nicod, responsable du centre de phénotypage de Farm3. Non seulement nous avons réussi à produire des plants de vigne en aéroponie, mais nous avons pu obtenir une meilleure stratification. Les taux de reprise atteignent plus de 80 %, contre 50 % environ habituellement. »
De même, la firme arrive à accélérer le cycle de production à quatre mois au lieu de dix. La qualité du plant de vigne obtenu ne semble pas en pâtir, puisque les mesures sur la quantité de racines sont bonnes, tout comme les résultats à la replantation. « Le but n’est pas de produire des plants à grande échelle, cela demanderait un nombre de serres incroyable, poursuit l’ingénieur agronome. Mais nos recherches pourraient aider à comprendre comment réduire les pertes pendant la phase de culture en pépinière. » Pour lui l’aéroponie pourrait apporter, à terme, un outil supplémentaire dans la production de petits lots de matériel végétal, pour optimiser par exemple la multiplication de sélections massales où il n’y a que peu de bois.
Accoutumer les plants petit à petit aux stress environnementaux
Une autre application semble prometteuse et intéressante pour la filière : l’acclimatation des jeunes plants aux contraintes environnementales qui les attendent. L’entreprise maîtrise déjà le process pour les plants forestiers, qui deviennent ainsi plus résistants à la sécheresse une fois cultivés. « Nous appliquons des stress contrôlés et répétés aux jeunes individus dans notre chambre de culture pour qu’ils s’habituent », explique Henri Nicod. De cette manière les arbres apprennent les réponses physiologiques, en quelque sorte, et façonnent leurs caractères épigénétiques (qui définissent l’activité des gènes selon l’environnement). Au champ, les essais sur prunelliers montrent par exemple un doublement du taux de survie face à un stress hydrique intense. Farm3 a tenté de calquer son protocole sur la vigne, « mais c’est une espèce très différente, indique l’agronome, il nous faut revoir la recette ». Henri Nicod est confiant. Et espère décliner cette méthode pour toute une panoplie de stress, à commencer par le stress salin.