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Un mandat atypique

Pascal Lerousseau, président de la Chambre d’agriculture de la Creuse, présente le bilan des actions menées sous sa présidence durant le mandat qui s’achève à la fin de l’année.

Groupe de personnes visitant un pré.
© CDA 23

L’équipe que j’ai l’honneur de présider et que vous avez élue en 2019 à la tête de la Chambre d’agriculture de la Creuse tient, avant les prochaines élections de cette instance consulaire prévues en janvier 2025, à vous faire partager son sentiment sur les résultats obtenus par votre institution. Mais avant de présenter les travaux de la Chambre d’agriculture, il me semble important de rappeler le contexte mouvementé dans lequel ce mandat a eu lieu.

2019-2021 : les années COVID

La crise du Covid s’est invitée en fin d’année 2019 et a complètement bouleversé notre organisation sociétale, en France comme ailleurs. Au-delà du chaos sanitaire engendré et des pertes humaines que nous déplorons, il faut se rappeler que toutes les activités économiques avaient été mises à l’arrêt ou presque. Faisant partie des secteurs essentiels, nos métiers ont été peu impactés par cette pagaille généralisée. Toutefois, les ruptures sur les chaînes de production et les pénuries qui en ont découlé, ont généré de graves répercussions inflationnistes. Ainsi le « Quoi qu’il en coûte », nous coûte encore très cher aujourd’hui ! Cette crise qui a duré deux ans et ses impacts, tant sur le mental de la population que sur les aspects économiques, ne semblent pas près de s’estomper ! Concernant la Chambre d’agriculture, nos agents ont bien sûr été mis, eux aussi, en télétravail lors des différents confinements. Mais ils ont pu continuer à assurer l’essentiel des activités en distanciel. Nos réseaux d’information ont tourné à plein régime pour vous communiquer, en temps et en heure, via notre site Internet, SMS, mailing… les mesures décidées par nos dirigeants et les particularités attribuées à notre secteur d’activité… qui se devait de continuer à travailler pour nourrir la France. D’ailleurs, dans ce cadre, des points de retrait et autres drives fermiers ont été mis en place par la Chambre d’agriculture au pied levé pour permettre à la population creusoise, souvent très éloignée des centres urbains, de continuer à s’approvisionner. Pour les producteurs locaux, ce débouché leur a aussi permis d’écouler leur production. En effet, nombre d’entre eux avaient vu leurs circuits de distribution habituels (marchés, restauration collective, …) fermés et n’avaient plus de possibilité de vendre leur stock. Ainsi, les services de la Chambre d’agriculture sont toujours restés mobilisés et joignables pour continuer à vous servir.

2021 à nos jours, des conflits armés qui ont déstabilisé les marchés

Après cette crise sanitaire sans précédent, en février 2021 c’est l’invasion Russe en Ukraine qui a généré une autre stupeur générale. Nos civilisations européennes, éloignées des divers conflits qui ont pourtant toujours eu lieu dans un pays ou un autre sur la planète, ne pensaient pas voir la guerre arriver à leur porte. Si cette guerre meurtrière et fratricide engendre malheureusement des drames humains atroces, celle-ci a aussi déclenché d’importantes perturbations sur les marchés mondiaux. En premier lieu, les fournitures de matières premières, déjà mises à mal par la crise du Covid, ont été une nouvelle fois très impactées, à croire d’ailleurs que toutes nos marchandises étaient fabriquées en Ukraine… La flambée des coûts de l’énergie qui en a découlé, et que nous subissons encore à l’heure actuelle, a fait exploser les charges de fonctionnement des entreprises et du citoyen par la même occasion ! Si celui-ci a privilégié les produits locaux dans le cadre de la crise du Covid, il n’en n’est pas de même pour la crise de la guerre en Ukraine. Devant faire des arbitrages de consommation dans le cadre de la gestion de son budget, le consommateur choisi dorénavant le prix avant toute chose. La désaffection pour les produits locaux mais surtout pour les produits bio a même engendré, pour la première fois, un taux important de déconversion en agriculture biologique. Par ailleurs, les arrangements diplomatiques entre nos dirigeants pour soutenir ce pays en guerre ont ouvert la porte à une inondation de nos marchés par des produits vendus à des prix défiant toute concurrence ! La volaille et le miel sont les deux produits les plus concernés et nos producteurs français peinent en conséquence à écouler leur production. Sans oublier que pour ce qui concerne les premiers, ils avaient déjà été bien impactés par l’Inflenza Aviaire.
En 2023, un autre conflit armé se déroulant, cette fois-ci, entre la Palestine et Israël a fini de brouiller les cartes et a fait se crisper un peu plus les relations géopolitiques internationales, entraînant même des répercussions sociétales en France où les avis sur la question deviennent de plus en plus tranchés. Par ailleurs, là encore, les retombées économiques (taux d’emprunt, énergie, etc.) se font sentir et les échéances politiques aux États-Unis brouillent un peu plus le devenir de la question.
Au regard de cette situation, la Chambre d’agriculture, concernée, au même titre que les autres secteurs d’activité par la hausse exponentielle de ses charges a dû tailler sévèrement dans son budget de fonctionnement afin de ne pas devoir répercuter ces hausses sur le tarif de ses prestations. Le meilleur service au meilleur coût est, et restera, ma devise tant que je serai aux commandes !

Une météo instable et des accidents météorologiques d’ampleur

Du côté du ciel, rien non plus ne nous aura été épargné ! Entre les sécheresses à répétition, le gel, les orages de grêle destructeurs et maintenant les inondations, les années se suivent mais ne se ressemblent pas ! L’agriculture doit faire faire à de multiples défis pour sécuriser ses productions. L’adaptation au changement climatique est une bonne chose et si nous nous devons de continuer à travailler dans ce sens pour trouver des pistes nous permettant d’avoir une meilleure résilience, anticiper les accidents climatiques de plus en plus nombreux est compliqué, voire impossible. Dans ce cadre, la Chambre d’agriculture est un outil majeur pour la gestion des crises. Les services se mobilisent dès l’information donnée pour évaluer les dégâts engendrés et réaliser des enquêtes et études d’impact permettant de déclencher des demandes d’indemnisation pour les agriculteurs touchés. Les instructions des dossiers de demande d’aides font également partie des priorités de missions données aux agents par le bureau de la Chambre.

Une lisibilité administrative digne des brumes londoniennes

Amputés au niveau de leurs revenus à cause de l’explosion des charges et des retards de paiement de leurs aides, les éleveurs ont fait part de leur découragement, leur détresse et leur colère pendant les manifestations qui se sont déroulées en fin d’année 2023, un peu partout sur les territoires. Ce désarroi s’est ensuite aussi exprimé fin février 2024, lors de l’ouverture du dernier Salon International de l’Agriculture. Écœurés par les lourdeurs et les aberrations administratives ainsi que par les promesses faites à la suite des premières manifestations et non tenues par le gouvernement en place, les agriculteurs ont alors failli empêcher le Président Macron d’inaugurer le Salon… Puis, alors que la date promise pour clôturer le versement des aides en retard approchait à grands pas (15 juin) et que les résultats des élections européennes venaient d’être proclamés (le 9 juin), le Président de la République a annoncé dissoudre l’Assemblée Nationale. Une des conséquences fâcheuses de cette dissolution est que la loi d’orientation agricole qui était en discussion au Parlement est suspendue également. Qu’adviendra-t-il des réformes agricoles qui étaient en discussion dans le cadre de cette loi ? Dans quels délais et sous quelles conditions les débats pourront-ils reprendre à l’issue des élections législatives ? Les travaux en cours en matière de souveraineté alimentaire, le renouvellement des générations en agriculture, le revenu agricole, les produits phytosanitaires tous ces points qui étaient inscrits dans le projet de loi sont aujourd’hui à l’arrêt !
Comme vous pouvez le constater, dans ce contexte mouvant et dégradé, il n’est pas toujours facile de maintenir le cap ! À ce titre, pour apporter de la cohérence et de la lisibilité à nos actions, nous avons souhaité mettre en œuvre un fil rouge annuel devant guider la majorité des actions développées par les différents services. Ainsi en 2023, c’est le thème de l’autonomie des exploitations qui a été choisi et pour 2024, nous avons opté pour la thématique de l’organisation du travail. Le point d’orgue voulu de ces actions se trouve dans l’organisation d’une journée d’envergure départementale avec les « Rencontres de l’installation » le matin à destination des nouveaux installés et les « Rencontres professionnelles » l’après-midi pour tous les agriculteurs creusois.
Garder le cap, c’est donc ce qui a motivé l’ensemble de ma mandature et c’est ce que je me suis toujours efforcé de faire avec beaucoup d’ardeur et de convictions et, bien sûr, accompagné de l’ensemble des équipes d’élus et d’administratifs de l’institution. J’en profite pour les remercier de leur engagement sans faille, de la qualité de leur travail et de leur soutien à mes côtés.
Je vous livre maintenant le bilan, non exhaustif (car les productions des services de la Chambre d’agriculture sont nombreuses) mais assez significatif dans ses résultats pour vous faire une idée sur la quantité et qualité des travaux menés durant ces 5 années 2019-2023 (les chiffres 2024 n’étant pas encore arrêtés).

Favoriser l’installation et le renouvellement des générations

Chantier prioritaire s’il en est un, le renouvellement des générations en agriculture est un enjeu majeur pour notre profession et pour la pérennité économique de notre territoire. Avec plus de 50 % de chefs d’exploitation qui ont plus de 55 ans, le défi est de taille et les moyens se doivent d’être à la hauteur. Le Point Accueil Installation reçoit en moyenne 185 porteurs de projets par an. De 2019 à 2023, ce sont donc près de 1 000 rendez-vous qui ont été assurés, mais aussi 327 études économiques qui ont été réalisées et environ 300 installations accompagnées. Du côté de la transmission, ce sont 284 rendez-vous au Point Accueil Transmission qui ont été réalisés et près d’une centaine d’agriculteurs formés à la transmission. Fait notoire, en 2024, afin de donner une nouvelle impulsion, 3 vidéos d’exploitations à céder ont été réalisées et publiées sur les réseaux sociaux. Celles-ci ont généré à ce jour plus de 200 000 vues.

Assurer la transition agroécologique des exploitations

La Chambre d’agriculture s’est attachée durant cet exercice à être un acteur incontournable pour tout ce qui concerne les questions agroenvironnementales. Trop souvent, des décisions qui impactent l’agriculture sont prises dans des instances où ne siège quasi aucun représentant de l’agriculture, administratif ou élu. C’est pourquoi, la représentativité du secteur agricole a été un autre axe important du mandat. Participation aux réunions des agences de l’eau, à celles de l’administration, représentation importante auprès de la région pourtant très éloignée géographiquement, etc. Tous ces engagements ont permis de freiner certaines dispositions peu favorables, voire d’obtenir des aides dédiées (aides à l’abreuvement des animaux par exemple).
Dans le cadre de l’accompagnement des agriculteurs vers la transition agroenvironnementale, avec la réalisation de plus de 150 exploitations accompagnées pour la souscription des MAEC, 274 BSV, près de 300 projets abreuvement, environ 500 suivis ou instructions de dossiers HVE, plus de 2 000 analyses de sol effectuées, … les missions et les moyens déployés par la Chambre d’agriculture auprès des agriculteurs a prouvé toute son efficacité. Plus largement, toutes les expérimentations menées dans le cadre de l’adaptation au changement climatique ont permis la vulgarisation des pratiques et la mise en œuvre de solutions au plus près du terrain.

Accompagner la performance économique des exploitations

Par le biais de ses propositions en termes d’accompagnements juridiques, par sa réactivité en matière d’instruction de dossiers d’aides conjoncturelles ou structurelles, par sa recherche de sécurisation des revenus via des projets de diversification ou projet innovants, par le déploiement de nombreuses formations sur les territoires, par l’optimisation des déclarations PAC, etc., la Chambre d’agriculture assure un accompagnement et une proximité de tous les instants auprès des chefs d’exploitation. Ainsi, ce sont plus de 500 conseils qui ont été donnés en matière de PCAE / AREA et 278 dossiers qui ont été accompagnés. Le service juridique et le Guichet Unique ont traité près de 4 000 dossiers d’entreprises agricoles. Dans un autger registre, plus de 900 contrôles pulvérisateurs ont été effectués, 230 accompagnements de dossiers bâtiments ont été réalisés, plus de 5 000 agriculteurs ont été formés…

Affirmer et renforcer la présence de la Chambre d’agriculture sur les territoires

Avec 4 antennes composées de 8 GDA, la Chambre d’agriculture agit au plus près des besoins des agriculteurs. Alors que la mutualisation et le regroupement de moyens sont dans l’air du temps, les élus de la Chambre d’agriculture sont attachés à maintenir la proximité, voire à la renforcer. Dans le cadre de cette proximité, les Antennes Chambre d’agriculture ont réalisé plus de 8 000 déclarations PAC sur l’ensemble du département. Par ailleurs, alors que l’agriculture représente une activité économique et sociale importante en milieu rural, le secteur fait pourtant souvent office de parent pauvre de la vie communale. La Chambre d’agriculture s’est donc efforcée de se rapprocher des collectivités territoriales afin de faire valoir et défendre les intérêts des agriculteurs dans le cadre des différents dossiers dont elles ont la gestion. Elle a, par ailleurs développé une gamme de prestations qui leur sont dédiées, labellisées sous la marque Terralto. Plus de 200 avis réglementaires, permis de construire et CU ont été émis par la Chambre d’agriculture et 12 diagnostics agronomiques et fourragers à destination d’agriculteurs impactés par des projets ont également été réalisés.

Identifier et apporter des réponses aux problématiques et enjeux prioritaires en élevage

Alors qu’une diminution des cheptels s’exerce un peu partout en France, l’élevage qui est la production prédominante en Creuse suit la même courbe inquiétante. Face aux problématiques sanitaires, climatiques et économiques récurrentes, les éleveurs font souvent le choix de la décapitalisation. Mais une vache vendue, ce sont des produits futurs en moins sur l’exploitation et donc sur le long terme, une mise en danger du cheptel souche. Les élus de la Chambre d’agriculture sont attentifs à l’évolution de cette tendance et ont fait le choix de renforcer les services aux éleveurs. Ainsi la Chambre d’agriculture leur propose un panel de solution important : des conseils en autonomie fourragère en passant par un appui aux problématiques administratives, le renforcement de l’identification des animaux, le développement du numérique, la recherche de l’amélioration des conditions de travail de l’éleveur et du confort de ses animaux, la mise en place de formations multipartenariales, etc.
Le contrôle de performances permet aussi aux éleveurs adhérents d’avoir des conseils individualisés sur la gestion de leur cheptel. Plus de 200 éleveurs ovins et bovins sont adhérents en Creuse. Enfin, la Chambre d’agriculture participe activement à différents réseaux d’élevage et les collectes d’informations traitées permettent d’affiner son expertise sur différents sujets pour aboutir à un ensemble de conseils à la disposition des éleveurs (plaquettes, fiches techniques, webinaires, …).

Faire dialoguer agriculture et société

Parce qu’on vit dans un monde où l’on se comprend de moins en moins, il est urgent que l’agriculture se réapproprie sa communication. Pour mettre en pratique cette volonté exprimée par les élus, la Chambre d’agriculture s’attache à développer une communication positive envers le grand public. C’est un axe important car de plus en plus de collectifs de citoyens mal informés s’opposent à la mise en place de projets de développement agricole. Persuadés que c’est en expliquant mieux les pratiques à un public qui s’est très éloigné des réalités du métier, les élus de la Chambre d’agriculture ont choisi de déployer, depuis 2021, la marque #AimeTonAgri qui est utilisée également dans différents départements de la Nouvelle-Aquitaine. Par ailleurs, afin de mieux informer les nouveaux arrivants en Creuse, la Chambre d’agriculture a mis en place, en 2022, une Charte de bienvenue en campagne creusoise. Celle-ci a été élaborée et signée avec les représentants des consommateurs et des maires ruraux de Creuse. C’est un outil d’information sur les droits et obligations de chacun qui devrait permettre un meilleur dialogue dans nos campagnes.
Voici donc quelques éléments extraits du bilan des activités de votre Chambre d’agriculture. Tout, bien sûr n’est pas parfait mais quelles que soient les actions menées, elles sont toujours guidées par l’intérêt de chaque agricultrice et agriculteur du département. La Chambre d’agriculture est votre outil, n’hésitez pas à vous en servir !
Pascal Lerousseau, président de la Chambre d’agriculture de la Creuse

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