Un combat légitime pour un rééquilibrage en faveur des ovins
Claude Font président de la FDO apelle les éleveurs ovins à se mobiliser et à se rendre le jeudi 13 novembre prochain à Paris. Avec un troupeau de quelques 350 brebis sur le Champ de Mars, les éleveurs veulent se faire entendre à la veille de grandes décisions européennes. Cette manifestation clôture le Tour de France des Transhumances initié par le région Auvergne , tout comme les Étas généraux de la production ovine.
Dans un contexte de mobilisation générale dans toutes les productions, pourquoi organiser une manifestation des moutonniers le jeudi 13 novembre 2008 ?
Claude Font : «Si on ne s’occupe pas de notre production, personne ne le fera à notre place. Les revendications ne datent pas d’aujourd’hui. L’initiative des responsables ovins auvergnats en 2006 de créer les états généraux ovins avait déjà pour but d’alerter les pouvoirs publics. La production ovine a une spécificité et a toujours été la dernière de la classe en terme de revenu. Même les éleveurs techniquement bons ne s’en sortent plus malgré une bonne qualité des produits. Nous avions la problématique du revenu depuis de nombreuses années, nous avons, en plus, subi cette année la hausse des charges et le problème sanitaire de la FCO (infertilité, mortalité, baisse du nombre d’agneaux…).
Nous nous mobilisons également pour qu’il y ait une prise de conscience politique et professionnelle et pour montrer que la production ovine fait partie du paysage départemental. Nous ne pouvons nous satisfaire de la baisse du nombre d’éleveurs et de brebis chaque année. Cela met en danger les OP (NDLR : organisations de producteurs) qui doivent résister malgré ces baisses. Une trop forte diminution des effectifs ovins a des conséquences sur le territoire (aménagement du territoire, paysage et économie des territoires) mais aussi des conséquences à court et long terme sur les autres productions. On nous demande de nourrir la population et de maintenir le paysage mais tout cela a un coût».
Et pourquoi à Paris ?
C.F. : «Nous organisons la manifestation à Paris pour faire suite aux transhumances qui ont eu lieu dans différentes régions. Ces transhumances ont commencé en Auvergne le 1er septembre et ont continué à Toulouse, Valence, Poitiers, Marseille, etc. C’est un tour de France initié par l’Auvergne à l’image des états généraux qui se termine à Paris sur les Champs de Mars. Les éleveurs se retrouvent dans la Capitale car nous sommes à la veille de décisions Européennes».
Quelles sont les attentes des moutonniers ?
C.F. : «On est à l’heure des décisions. Nous savons que nous ne pouvons pas nous en sortir par une hausse du prix des agneaux. Les ovins ne demandent pas une grosse somme pour un rééquilibrage des soutiens et des revenus. Pour ajouter 27 € par brebis nous avons besoin d’un prélèvement de 2.5% sur les aides du premier pilier. Nous attendons donc les outils qui permettront ce rééquilibrage. Malheureusement, ce sont les productions animales, en général, qui souffrent et tout le monde s’appuie sur l’article 68 (NDLR : article qui permet une redistribution des aides du premier pilier) pour obtenir un soutien. La Commission Européenne n’autorise pour le moment qu’un taux de prélèvement de 10% avec une possibilité de recouplage de 2,5% maximum sur le premier pilier. Ce n’est pas suffisant pour servir tout le monde. Il faut que l’Europe fasse évoluer cet outil pour que toutes les productions soient servies.
En ce qui concerne 2009, plusieurs pistes sont à l’étude. Tout d’abord, une enveloppe de DPU dormants a été annoncée par M. Barnier comme une mesure prioritaire pour les ovins. Nous nous apercevons que ce ne sera pas suffisant. Nous savons également que les reliquats de la PAC pour 2008 sont importants. Ce sont près de 750 M € qui ne sont pas utilisés dans le cadre de la PAC. Il faut qu’une décision européenne soit prise rapidement pour aider la production ovine dès 2009».
Quel est le message que veulent faire passer les éleveurs ovins lors de cette manifestation ?
C.F. : «Nous avons accompagné le ministre depuis les états généraux où il s’était engagé à aider la production ovine. La France a pris la présidence de l’Union Européenne depuis le mois de juillet et nous voulons faire pression face à l’urgence de faire quelque chose pour la filière. Le ministre dit nous avoir compris, mais nous n’avons aucune action concrète. Après l’avoir accompagné, nous voulons mettre la pression pour qu’il prenne une décision. Nous sommes persuadés que nos revendications sont légitimes. L’enjeu est énorme, ça passe par la pérennité de la filière, l’emploi, le maintien des éleveurs ovins et des organisations qui gravitent autour de la filière mais également le maintien de la diversité du paysage agricole. Le ministre doit nous dire si, à l’avenir, il veut des moutons ou non…
Les demandes de la FNO
Le maintien d’une production ovine française performante ne pourra être assuré que par une juste rémunération de ses éleveurs et une équité dans le système de soutien entre productions.
Les éleveurs ovins attendent aujourd’hui des réponses concrètes à leurs demandes :
• Un plan d’urgence dès 2009
La situation actuelle des éleveurs ovins nécessite la mise en place immédiate de mesures de soutien à la trésorerie qui doivent se traduire par :
des moyens financiers à hauteur du ré-équilibrage de revenu entre ruminants, soit 160 millions d’euros ; un cadre optimal pour permettre de protéger efficacement les troupeaux contre la FCO par la vaccination et une indemnisation des éleveurs touchés par cette maladie à hauteur de leurs pertes ; l’exonération ou l’étalement des charges sociales ; le report d’annuités en fin de tableau (année blanche).
• Des mesures à le long terme dès 2010
Une ré-orientation des aides de la PAC pour : une équité de soutien pérenne entre UGB ovines et UGB bovines par une aide supplémentaire à la brebis de 30 € pour toutes les brebis du territoire = pré-requis vital ; un ré-équilibrage des revenus en faveur de l’élevage herbager grâce à une prime à l’herbe inscrite dans le 1er pilier (une fois l’équité de soutien UGB ovin/bovin obtenue).
Une meilleure répartition des marges tout au long de la filière.