Filière biologique : Quel avenir pour la filière biologique après la crise du marché ?
Ce mardi 22 avril, le colloque "Crise du marché de la Bio : les enseignements pour des filières biologiques fortes demain" s’est tenu au Lycée Louis Pasteur de Marmilhat, à Lempdes. Organisé par la FNAB et la FRAB AURA, l'événement a permis de dresser un état des lieux du secteur bio et de tracer des pistes d'avenir. Retour sur les grandes lignes de cette journée.
Ce mardi 22 avril, le colloque "Crise du marché de la Bio : les enseignements pour des filières biologiques fortes demain" s’est tenu au Lycée Louis Pasteur de Marmilhat, à Lempdes. Organisé par la FNAB et la FRAB AURA, l'événement a permis de dresser un état des lieux du secteur bio et de tracer des pistes d'avenir. Retour sur les grandes lignes de cette journée.


"Crise du marché de la bio : les enseignements pour des filières biologiques fortes demain"
Depuis 2021, le marché de l’agriculture biologique traverse une crise profonde, marquée par un retournement brutal de la consommation des ménages. Faute de relais de croissance suffisants, les débouchés se sont réduits, fragilisant l’ensemble de la filière.
Si certains signaux de reprise apparaissent depuis quelques mois, notamment sur certains segments, les professionnels du secteur insistent sur la nécessité de tirer les enseignements de cette crise. Pour Samuel Frois, chargé de mission développement économique à la Fédération Nationale d'Agriculture Biologique (FNAB), "la sortie de crise semble amorcée, mais l’avenir reste incertain dans un contexte international toujours instable. On n’est pas à l’abri de rebondissements."
L’objectif de ce colloque, organisé par la Fédération Régionale d'Agriculture Biologique FRAB AURA : renforcer les filières biologiques à long terme, garantir des prix rémunérateurs pour les producteurs et construire un modèle plus résilient.
La diversité agricole de la région AURA
La région Auvergne Rhône-Alpes (AURA) se distingue par la richesse de ses paysages – rivières, montagnes, plaines, zones urbaines – et par la diversité de son agriculture. Cette variété se reflète naturellement dans sa production biologique, riche en AOP et IGP, notamment en vins et fromages.
"La FRAB AURA a traversé certaines difficultés qui viennent entre autres de ça, de la complexité de toutes nos structures départementales mais c'est aussi une richesse puisqu'on en est sorti grandi ces derniers temps et ça nous a permi de mieux affronter l'avenir et toutes ses complexités de filière et d'agriculture biologique" a rappelé Samuel Frois de la FNAB.
Quelques données
En AURA, on compte :
- 8 400 fermes en agriculture biologique,
- 3 400 opérateurs économiques qui travaillent en bio,
- une Surface Agricole Utilisée (SAU) bio essentiellement représentée par les cultures végétales (légumes, fruits...),
- une légère croissance du marché bio régional : +0,3 % entre 2023 et 2024.
Décryptage de la crise et projections de la filière biologique
Jérémy Robiolle, expert du marché alimentaire chez Xerfi Specific, a proposé une analyse approfondie des causes de la crise et des perspectives d’avenir.
Cette analyse a pour but de "donner les clés de lecture de ce qu'il s'est passé, de ce qu'il va se passer. Aussi, on va essayer de se projeter pour savoir notamment si la crise de la bio qu'on a connu ces dernières années va se poursuivre ou est-ce qu'il va y avoir un rebond comme on le pressent."
Constats et chiffres
Entre 2020 et 2024, les ventes de produits bio ont chuté de 5 % en valeur tous circuits confondus, avec une baisse de 20 % en grande distribution. Les magasins spécialisés ont mieux résisté, et les circuits courts ont même progressé de 4 à 5 % par an.
Quelles sont les principales causes de la crise du bio ?
Parmi les principaux facteurs identifié responsables de cette crise du bio, Jérémy Robiolle explique :
En réalité, plus qu'une crise de la bio, ce à quoi on assiste à l'heure actuelle, c'est plutôt une une crise de la consommation alimentaire à domicile.
Plusieurs facteurs l’expliquent :
- une épargne post-Covid non réinjectée dans l’alimentaire,
- il y a une augmentation de la part des dépenses des ménages vers des dépenses non arbitrables (loyer, l'énergie, l'électricité, gaz, assurances...)
- il y a un report de la consommation des français vers une économie servicielle : dépenses d'abonnement (forfait téléphonique, Netflix...), hébergement-restauration et activités récréatives/loisirs.
Scénarios macroéconomiques à 2035-2040
À moyen terme, un redémarrage progressif de la consommation des ménages est attendu d’ici 2027, accompagné d’un retour des grandes surfaces à une stratégie plus offensive sur le bio.
Le vieillissement de la population pourrait être un moteur majeur du rebond, les plus de 65 ans étant aujourd’hui les plus grands consommateurs de bio. Jérémy Robiolle affirme :
Le facteur le plus déterminant d'un redémarage du marché est le vieillissement démographique de la population française.
En effet, les premiers adeptes des produits alimentaires issus d'agriculture biologioques sont les plus de 65 ans à 28,8% contre seulement 17 % pour la tranche des 25/34 ans. Un scénario optimiste envisage une croissance modérée de 2,5 à 3 % par an jusqu’en 2035, pour atteindre 6,5 % de parts de marché dans l’alimentaire en France.
Une table ronde pour consolider la filière
Le colloque s'est cloturé par une table ronde a réuni plusieurs acteurs de la filière biologique, parmi lesquels :
- Eric PIOLLE, Maire de Grenoble
- Frédéric FAURE, Vice-président - Biocoop
- Jean-Pierre BUCHE, Vice-Président - Billom Communauté
- Claire ROCK, Responsable des Achats - Sabarot
- Sébastien COURTOIS, Eleveur bio et président de Sodiaal Sud Est
- Nathanaël JACQUART, coprésident - Auvabio
- Jean Philppe QUERARD, Président fondateur - Foodbiome
Les échanges ont porté sur les moyens de consolider la filière, d’assurer des prix justes et d’amplifier les dynamiques collectives pour garantir la pérennité du modèle biologique.
Entre vigilance et volontarisme
Si la crise a fragilisé le secteur, elle a aussi permis une prise de conscience collective sur la nécessité de mieux structurer les filières bio et d’anticiper les chocs à venir. Les initiatives se multiplient, mais la question demeure : la reprise du marché sera-t-elle durable ?