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Quand Biose s’active pour développer un traitement anticancer

Santé - L’entreprise Biose, basée à Aurillac, est le premier sous-traitant pharmaceutique producteur de bactéries vivantes au monde, spécialisée dans les traitements du microbiome(1) et les probiotiques de nouvelle génération.

C’est écrit sur la page d’accueil de leur site : “Nous croyons vraiment que la santé est gérée par la collaboration bénéfique entre les cellules humaines et les microbes.” L’entreprise Biose, basée à Aurillac, mais également du côté de Boston aux États-Unis,  est un peu un ovni dans le paysage industriel cantalien car le plus grand nombre ne sait pas exactement ce que font les salariés dirigés par Adrien Nivoliez.
Pour autant, elle trouve toute sa place dans la cité géraldienne qui a fait le choix il y a quelques années déjà de devenir un spécialiste de tout ce qui touche à la bactérie. Mais Biose, c’est certainement un cran au-dessus avec une technicité et un savoir-faire uniques au monde et qui suscitent l’intérêt des plus grands groupes pharmaceutiques. À tel point que pour certains de ses clients, Biose est en train de développer un traitement anticancer avec tout l’intérêt d’associer une thérapie microbiologique à une thérapie chimique.

 Des bactéries pour améliorer les thérapies

“On fabrique des médicaments pour des entreprises un peu partout dans le monde”, présente Richard Ellis, responsable business et développement. Des biotechs(2) en Europe, mais également aux États-Unis, en Corée, en Israël... “notamment sur des traitements anticancers où le patient ne répond pas et où on utilise des bactéries d’origine humaine pour améliorer la performance des traitements d’immunothérapie, comme le Keytruda” fabriqué par Merck pour les adultes atteints d’un carcinome épidermoïde “et avec des résultats assez impressionnants puisque plutôt que d’avoir une réussite de 20 % sur la population concernée, on atteint entre 66 à 80 %”.
On parle là de biologie et non d’une molécule et “du coup, on a moins d’effets secondaires”, précise Claire Derlot, vice-présidente business et programme chez Biose avant d’éclaircir le propos : “Pour détruire ce qui ne va pas chez vous, on en arrive à détruire ce qui va bien chez vous. Là, on cible plus le point de thérapie, donc avec moins d’effets secondaires. Aujourd’hui, la thérapie du cancer par le LBP(3) prend toute sa place car à ce jour, tous les produits médicamenteux que vous prenez sont surtout issus de la chimie.”
Chez Biose, on s’intéresse avant tout à produire un vecteur biologique, une bactérie la plupart du temps. “Et la particularité de cette bactérie, c’est qu’on la vend de manière vivante, d’où les probiotiques dont les gens entendent de plus en plus parler, insiste Claire Derlot. On ingère des bactéries, mais elles s’appellent probiotiques car c’est préventif, c’est censé prévenir et vous garder en santé plus longtemps.”
Cette fois, Biose vise le thérapeutique, une bactérie vivante pour soigner. Et l’élaboration d’un médicament demande une dizaine d’années. “Pour nous, c’est pareil, sauf que l’on ne produit pas une molécule chimique, mais un agent biologique, par fermentation. Donc on a différents types de bactéries pour agir sur différents types de pathologies. Lorsqu’on parle de thérapies anticancéreuses, c’est en fait un ensemble de bactéries identifiées comme agissant sur tel cancer.”
Biose n’a cependant pas la prétention de créer un traitement pour une personne, mais plutôt un traitement pour une pathologie. Pour être encore plus clair, l’entreprise n’est pas non plus un faiseur de miracle, mais va créer, à partir de la demande des laboratoires pharmaceutiques, un ensemble “pour le plus grand nombre”. Mais rien n’empêche effectivement, demain, de personnaliser tout cela, “même si à l’heure actuelle, les thérapies sont avant tout chimiques”.

Bienvenue dans le monde du microbiote

“Nous ne sommes pas des sociétés qui faisons le développement des anticancéreux, prévient Adrien Nivoliez. Le monde du microbiote est un monde qui est en train de s’ouvrir sur des traitements anticancéreux et ce sera très certainement une première révolution de l’utilisation du microbiote à une vocation de santé.”
Le dirigeant aurillacois insiste sur ce point car “notre rôle est d’accompagner ces sociétés qui ont identifié ces bactéries pour les associer avec un anticancéreux”. Dans ce cadre, en répondant à la demande des laboratoires pharmaceutiques, Biose est le concepteur du médicament, “mais ce ne sera jamais Biose qui sera connu comme étant la société qui a mis à disposition un anticancéreux sur le marché. Ce sont nos clients qui sont dans ce profil- là. Notre cœur de métier, c’est d’être à disposition de sociétés innovantes pour assurer le développement clinique et industriel de leur médicament”.
Des champs d’ouverture “extraordinaires” pour des personnes atteintes de cancers ne répondant pas aux molécules anticancéreuses, soit “entre 50 et 70 % des gens, insiste Adrien Nivoliez. Notre objectif est de venir faire une modification de la configuration du microbiote par ces bactéries, pour rendre ces traitements plus efficaces et avec des effets secondaires moindres”.
Ces acteurs sont de plus en plus nombreux, et à travers les deux sites d’Aurillac et de Boston, “on propose des services de productions au monde entier, pour produire des bactéries thérapeutiques, complète Claire Derlot. Quand ils viennent, ils nous disent : “Dans mon labo, j’ai une bactérie efficace contre telle pathologie. Je ne sais que la produire en labo, mais je ne sais pas la produire à l’échelle industrielle”. C’est là qu’ils viennent nous voir, car en plus, ils n’ont pas d’agrément pharmaceutique”. 
Et Biose, en tant que site pharmaceutique industriel certifié, sait produire tout cela “et c’est là que notre métier démarre”, déploie la vice-présidente. Ensuite, des années de travail, plusieurs phases de tests et développements cliniques avant d’aboutir. Biose a lancé son activité LBP en 2017 et espère très prochainement accompagner le premier médicament anticancéreux vendu sur le marché. 

(1) L’équivalent de notre éco-système bactérien.
(2) Entreprises qui utilisent ou modifient des matériaux vivants pour créer des produits.
(3) Live biotherapeutic products, l’équivalent en français de produits thérapeutiques à partir de bactéries vivantes.

 

En chiffres
75 tonnes de substance médicamenteuse, 120 millions de gélules, plus de 30 lignes cliniques différentes et plus de 300 différentes souches en cours de développement, voilà un bref aperçu de l’activité industrielle d’une entreprise qui dégage près de 40 M€ de chiffre d’affaires et emploie près de 300 personnes.

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