Ne plus éclipser l’influence de la lune
La Chambre d’agriculture propose depuis deux ans des formations aux éleveurs sur l’incidence des cycles lunaires en agriculture. Un savoir oublié que réveille René Becker.
Il ne s’est jamais sans doute autant vendu de calendriers lunaires en jardinerie que ces dernières années. Un regain d’intérêt, de curiosité pour l’influence sur la nature de ce satellite naturel de la Terre que constate lui aussi René Becker, jadis éleveur bourguignon, aujourd’hui formateur en biodynamie. “Même si les agriculteurs ont moins le temps de faire des observations, il y a une curiosité, une envie de revisiter tout ce qu’ils ont entendu des parents, grands-parents”, témoigne René Becker qui a animé depuis 2015 des sessions de formation sur Saint-Flour, Aurillac, Murat, Mauriac... et qui revient cette année pour de nouvelles sessions.
Des trous dans l’héritage
Un attrait plus prégnant en terre cantalienne et auvergnate, note-t-il : “Les paysans ici sont encore très convaincus de l’influence de la lune...” mais avec des usages parfois discor- dants : “Quand je les fais parler en formation, ils reprennent des dictons qui varient d’un canton à l’autre : pour certains, il faut tarir le samedi soir, dans le canton d’à côté c’est le dimanche soir... Preuve qu’au fil des décennies, il y a eu de la perte en ligne !”, s’amuse celui qui est aussi président de l’association Terre de liens. Une influence de la lune qui, en aucun cas, ne doit rimer avec croyance, même si la prise en compte des cycles lunaires remonte aux prémices de l’agriculture : “Suivre les cycles lunaires, ce n’est pas de l’astrologie, ni une histoire de superstition. On fait des semis, des essais, on observe si ça marche ou pas, on note la date et donc le cycle de la lune, on reproduit sur des années...” Des années et décennies d’observations qui ont permis à certains auteurs, dont l’Allemande Maria Thun, une référence pour René Becker, de consigner dans un calendrier les positions de la lune et les jours plus favorables à telle ou telle pratique culturale ou d’élevage. “Ce n’est certes pas une science exacte, reconnaît ce dernier. Ce n’est pas parce que vous sèmerez au bon jour que vous multiplierez vos rendements. C’est un atout supplémentaire de même que l’est une bonne qualité de sol, une bonne variété de semence...”, précise le formateur qui rappelle, au passage, qu’il existe différents cycles lunaires (au-delà de la pleine et la nouvelle lune) de 28 jours. “Tous les mois, la lune s’éloigne de la Terre et ensuite s’en rapproche, c’est là que son influence est la plus forte.” Sur les végétaux comme sur les animaux. Les quelques jours qui précèdent la pleine lune sont ainsi les plus perturbants pour l’homme, les bovins et leurs parasites. “Il y a alors un pic d’intensité parasitaire, c’est pourquoi on recommande de déparasiter à ce moment-là.”
Jours avec et jours sans
Lors de la formation, René Becker expose d’abord les fondamentaux de l’activité lunaire, explique comment lire et décrypter un calendrier lunaire ; “mais je consacre l’après-midi aux exemples concrets”. Quand semer, implanter une prairie, récolter, fertiliser, épandre le lisier, mettre à l’herbe des animaux, déparasiter... : “On regarde dans le calendrier de l’année en cours les moments les plus propices tout en prévoyant “un plan B”, une autre fenêtre de tir, au cas où la météo ne soit pas favorable. Mais on relève aussi tous les jours très défavorables.” Sur le secteur de Mauriac, une seconde journée, d’approfondissement, a été souhaitée par le groupe d’éleveurs formés : “Entre les deux, certains ont fait des semis comparatifs et ont présenté leurs retours. D’autres n’ont pas encore eu le courage de le faire, mais en tout cas, tous sont ouverts et vont tenter chez eux l’expérience”, se félicite René Becker. Des expériences encore trop peu nombreuses en élevage : “Il y a, au final, très peu de travaux sur cette question. Michel Gros (un autre auteur de calendrier) s’est aventuré sur des dates liées aux animaux qui recoupent au final les données du GIE vétérinaire Zone verte. Dans 20 ans, on aura plus de matière, d’observations scientifiques”, espère René Becker, qui voit d’un très bon œil l’offre de formations des chambres d’agriculture, notamment celle du Cantal, s’ouvrir à des méthodes d’observation, telle Obsalim, à l’ostéopathie, à la phytothérapie... Des disciplines à ses yeux complémentaires, tout comme l’analyse des plantes bio-indicatrices auxquelles il forme aussi. “Des plantes qui nous disent des choses sur l’état du sol mais que peu d’agriculteurs connaissent.”
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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