"Mon objectif est d'apporter un regard féminin sur l'agriculture"
Sandrine Cottier est éleveuse en Gaec à 3 associés, à Vorey. Outre son travail auprès de son élevage de chèvres et de vaches laitières, son rôle de mère de famille, elle occupe de nombreuses responsabilités dans le monde agricole. À l'occasion de la journée de la femme, le 8 mars, portrait d'une jeune femme active dans ce monde très masculin…
Vous élevez des chèvres et des vaches laitières en Gaec avec votre mari et votre beau-frère à Vorey. Etre éleveur au féminin, qu’est ce que cela change ?
Sandrine Cottier : «Sur notre exploitation, je m’occupe beaucoup de l’élevage caprin, plus facile à conduire pour moi, et de la comptabilité du Gaec. Et parfois lorsque je sens que nous n’avons pas levé le nez de notre travail depuis trop longtemps, je rappelle à mes associés qu’il faut penser à freiner un peu et à prendre quelques vacances. C’est aussi mon rôle.
Lorsque je me trouve avec des personnes extérieures au milieu agricole, en particulier lorsque je vais chercher mes filles à l’école, peu de gens pensent que je suis agricultrice. Lorsque je leur parle de mon métier, ils se montrent très surpris car ils ont encore en tête une image ancienne de l’agricultrice. Et de mon côté, j’ai envie de véhiculer une image féminine de mon métier».
Quelles responsabilités occupez-vous ?
Sandrine Cottier : «Je suis présidente du service de remplacement depuis juillet 2008 et présidente du canton de Vorey pour les JA depuis 3 ans ; j’occupe aussi la responsabilité de vice-présidente des JA de Haute-Loire depuis 2006, l’année où s’est tenue la finale nationale de labour à Vergezac. À l’époque, j’avais manifesté mon souhait de participer à l’organisation de cet événement d’importance pour notre agriculture et notre département ; je suis alors devenue membre du bureau des JA puis vice-présidente. Au sein des JA, je suis la seule femme membre du bureau et cela se passe très bien. Ils ne sont pas «machos» et sont très respectueux ; je pense que je leur apporte une autre façon de voir les choses.
J’ai été très bien accueillie et acceptée par les JA de Vorey ; d’autant que je ne suis pas fille d’agriculteurs, c’est mon maître de stage Hervé Gisclon, éleveur à Rosières qui m’a permis d’entrer dans le réseau JA.
À travers ces 3 responsabilités, mon objectif est d’apporter un regard féminin sur l’agriculture. Au niveau du service de remplacement, j’évoque les problèmes d’organisation du travail lorsque l’agricultrice a des enfants ou encore lorsque ces derniers sont malades…
Dans vos responsabilités, est-ce un avantage ou un inconvénient d’être une femme ?
Sandrine Cottier : «En tant que femme, c’est un peu difficile de concilier exploitation, responsabilités et vie de famille. Car c’est facile de se faire remplacer sur le Gaec mais à la maison, c’est plus dur !
J’ai également le sentiment de ne pas avoir la carrure de certains responsables syndicaux ; ainsi, lorsque des actions syndicales sont organisées, en tant que femme cela me paraît plus difficile d’avoir les épaules aussi solides qu’un responsable syndical homme».
Que pensez-vous du statut de la femme dans le monde agricole ? Des évolutions sont-elles encore souhaitables ?
Sandrine Cottier : « Il y a eu des évolutions en particulier avec le statut de conjointe collaboratrice. Mais il reste encore à faire par exemple au niveau des EARL pour que l’exploitante soit reconnue comme une associée à part entière.
Le statut de la femme a également évolué avec la possibilité de prendre un congé maternité ; la même évolution serait souhaitable pour le congé parental qui n’est pas encore accessible aux exploitantes !
D’une façon générale, je pense que la femme est de mieux en mieux acceptée en tant qu’éleveur. Avant la femme était perçue comme une aide sur l’exploitation, alors qu’aujourd’hui elle est une éleveuse au même titre que les hommes.
Dans notre département et en France, plusieurs femmes ont prouvé qu’elles étaient capables de conduire seule une exploitation».
Agricultrice, un métier qui s’impose à petits pas…
La femme est-elle l’avenir de l’homme en agriculture?
Peut-être, mais alors à long terme. Certes l’emploi agricole féminin se transforme. Au point que l’on compte en 2007 plus de femmes exploitantes que de conjointes travaillant avec ou sans statut à la ferme. Une professionnalisation qui traduit surtout le choix des femmes d’agriculteurs de gagner leur vie en dehors de l’exploitation. Car les femmes n’occupent qu’un tiers des emplois dans les fermes, avec des responsabilités plus faibles que les hommes. Les exploitantes sont cependant présentes dans toutes les orientations agricoles.
Les femmes occupent 24 % des postes d’exploitants professionnels en 2007. Une proportion qui progresse doucement, puisqu’elles ne contribuaient que pour 22% à ces emplois en 2000. Il faut remonter aux décennies précédentes pour trouver trâce d’une rupture plus importante avec 12 % d’exploitantes professionnelles en 1988.
Source Agreste