Aller au contenu principal

Du Liban au Cézallier, une jeune couple s'installe dans le Cantal

Dans le petit village de Chanterelles dans le nord Cantal, un couple de Libanais vit dans l’attente de terminer ses études, avec pour cela la nécessité d’obtenir la nationalité française. L’espoir est de retourner au Liban.

Une femme et un homme marchent
Hala et Gergès ont trouvé dans le Cantal, plus qu’un moyen de poursuivre leurs études. C’est aussi un lieu de répis loin du Liban à nouveau en guerre.
© B.Parret

En janvier, Gabriel, prénom de son grand-père, ne verra pas le jour au pays du cèdre vert mais au pays des volcans et de la vache rouge. Hala et Gergès, ses parents, sont installés sur le Cézallier. N’ayant pas terminé leurs études de vétérinaires et compte-tenu de la situation au Proche-Orient, le jeune couple trentenaire devrait profiter encore de ce havre de paix. À Chanterelles, la population s’en réjouit d’autant plus n’ayant pas enregistré de naissance sur le territoire communal depuis quelques années.
Gergès Hanna est originaire de Biblos dans le nord du Liban, une région entre mer et montagne. Son père a vendu ses vaches pour développer sa laiterie et la production de fromages frais. Le lait est collecté dans des fermes de 4 à 45 vaches. Ce monde agricole a poussé Gergès à suivre des études de vétérinaire, un métier qui le passionne depuis tout jeune. Pour Cela, et parfaitement francophone comme sa compagne, Gergès est venu parfaire son cursus vétérinaire en 2018 à Toulouse. Un diplôme supérieur étant impossible au Liban. 
Hala Chahwane est originaire de Jounieh à trentre kilomètres au nord de Beyrouth, la capitale. Les deux jeunes gens se sont connus à l’école vétérinaire. Elle souhaite à l’avenir reprendre la laiterie familiale et proposer des fromages affinés comme ceux que l’on apprecie en France. Hala s’est alors inscrite dans une école laitière dans le Douds. Sa formation en licence pro «responsable d’atelier» en alternance l’a menée à se partager entre les études et le travail sur le terrain dans une ferme... à La Bourboule, dans le Puy-de-Dôme
 

Auprès des agriculteurs

J’adore mon travail qui me permet de rencontrer beaucoup de monde"


Ayant débuté ses études dans un pays hors Union Européenne, Gergès doit tout reprendre à zéro en France pour obtenir ses équivalences. Il doit aussi obtenir la nationalité française, une obligation pour certifier sa formation. Pour cela, il doit garantir de bénéficier d’un travail en CDI. C’est ainsi que les deux jeunes Libanais ont découvert et se sont installés dans le Cantal il y a trois ans. Hala est fromagère à la ferme des Deux Cheix, en face de chez eux, de l’autre côté de la vallée de la Rhue. Elle s’applique à la fabrication du saint-nectaire, deux fois par jour, un fromage qu’elle aime beaucoup. La pause en milieu de journée lui permet de rentrer chez-elle.
Par l’intermédiaire d’un ami étudiant à Toulouse, Gergès est employé par l’entreprise Copalis 15 basée à Riom-ès-Montagnes. Ne pouvant exercer dans une clinique vétérinaire privée, même sous statut d’apprentis, il est pareur. Il visite pour cela les fermes dans un rayon de 80 kilomètres autour de la cité riomoise et jusque dans la Corrèze et le Puy-de-Dôme.
«J’adore mon travail qui me permet de rencontrer beaucoup de monde, confie Gergès. Les clients deviennent vite des amis et je participe à soigner les animaux, ce que j’aime faire». Il aime aussi jouer au badminton ou pratiquer l’escalade durant ses temps libres. 


Le lien avec le pays

Nous sommes bien ici dans une nature comme nous aimons et aussi au milieu des vaches»


Hala apprécie les promenades autour de la maison en compagnie de la chienne. Elle aime aussi cuisiner. La cuisine, à partager avec les amis Cantaliens, est un lien fort avec le Liban. Pour cela, et par plaisir, le couple cultive ses légumes dans le petit potager mis à leur disposition. «Le taboulé avec du persil du jardin, c’est extra, sourit Hala. Parfois, j’appelle ma tante pour avoir une recette. Et, de poursuivre : « les gens ici sont très gentils avec nous et très heureux qu’il y ait bientôt un bébé dans la commune. Nous sommes bien ici dans une nature comme nous aimons et aussi au milieu des vaches».
Cependant, la nostalgie du pays n’ait jamais loin. Difficile de ne pas penser aux proches avec la guerre qui s’est à nouveau invitée et une situation économique de plus en plus détériorée aussi par l’explosion du port de Beyrouth privant la population de nombreux produits d’importation. «C’est impossible pour nous actuellement de retourner là-bas voir les nôtres», confient Hala et Gergès. Nous pensons beaucoup à eux car il n’y a pas d’aide. Il faut travailler pour survivre. Les coupures gênent la production. Il faut aller à Beyrouth pour vendre alors qu’il y a les bombardements. Chaque fois qu’un de nos amis se rend au Liban, nous en profitons pour faire passer des médicaments car il n’y a rien là-bas. Heureusement les gens sont très solidaires entre eux. Nous espérons que tout cela se termine au plus vite car le Liban est plongé dans une grande misère».        
En janvier, Gabriel sera le premier bébé de la famille. Mais aussi un petit Cantalien.

 

La terre meurtrie

Hala et Gergès gardent l’espoir de rentrer dans leur pays, dans un pays à nouveau en paix. 
Sous protectorat français dans le cadre de la Syrie Mandataire en 1922, le Liban actuel est un état indépendant du Proche Orient depuis 1943. Son nom signifie blanc, en référence à la neige des montagnes dominant la Méditerranée à plus de 3 000 mètres d’altitude. La population est de 5 millions d’habitants. Compte tenu de sa situation géographique le Liban est un carrefour commercial et culturel depuis l’époque phénicienne (1 200 à 300 av. J-C). Il s’est aussi construit sur le multiculturalisme entre orient et occident, et la diversité religieuse avec les catholiques maronites, les orthodoxes grecs et les musulmans qui contribue à l’organisation politique du pays. Après une forte période de prospérité et de développement entre 1950 et 1970, ce qui lui valait le surnom de Suisse du Proche-Orient, les tensions communautaristes ont engendré près de vingt années de guerre civile. Depuis, le pays a du mal à se relever, envahi en 1982 par son voisin israélien, par une profonde crise en 2008 et une crise économique depuis 2018 amplifiée en 2020 par la fermeture du port de Beyrouth. La livre libanaise a perdu 95% de sa valeur. 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Depuis quelques mois, l’attaque conduite par Israël contre le Hezbollah dans le sud du pays a déjà fait de nombreuses victimes et plonge un peu plus le Liban dans le marasme, alors que sa grande force était pourtant le multiculturalisme.

Les plus lus

Une femme et un homme marchent
Du Liban au Cézallier, une jeune couple s'installe dans le Cantal

Dans le petit village de Chanterelles dans le nord Cantal, un couple de Libanais vit dans l’attente de terminer ses études,…

Dorine Pouderoux
Dorine Pouderoux dans le rôle d'Esmeralda dans le "Bossu de Notre-Dame"

La jeune Murataise Dorine Pouderoux interprète Esmeralda dans “Le bossu de Notre-Dame” actuellement au théâtre de la…

Groupe de jeunes gens en visite à Rungis, revêtus de blouse de protection
Devenir agriculteur : bien plus qu’une question de production...

Dix futurs installés ont suivi la formation Devenir chef d'exploitation agricole des Jeunes agriculteurs du Cantal : dix jours…

David Chauve sur une estrade lors d'une manifestation agricole organisée sur la Place de Jaude à Clermont-Ferrand.
Pourquoi les agriculteurs manifestent-ils à nouveau ?

David Chauve, secrétaire général de la FRSEA Auvergne Rhône-Alpes, explique qu'entre mesures conjoncturelles et structurelles…

Tournée d'IA le dimanche : un accord trouvé entre la direction d'Altitude et les inséminateurs

Les tournées d'insémination pourraient reprendre le dimanche à compter du 24 novembre prochain, annonce la direction du groupe…

Revalorisation des pensions, retraite minimum à 85% du SMIC, équité des droits...Les retraités agricoles ne baissent pas les armes

Depuis l'annonce du gel de six mois de la revalorisation des retraites, les responsables de la section régionale des anciens…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 100€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir lait
Profitez de l’ensemble des cotations de la filière Réussir lait
Consultez les revues Réussir lait au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce aux newsletters de la filière laitière