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Les producteurs de lait se préparent à l'après-quotas

Lors de son 65e congrès qui s’est déroulé les 24 et 25 mars, la FNPL a présenté son projet encore en construction sur le «syndicalisme du futur», appelé «FNPL 2015». L'objectif est de développé le "leadership" du syndicat. Un pouvoir syndical qui risque d'être malmené dans le dossier de la contractualisation.

Face à un « monde laitier nouveau », la FNPL (Fédération nationale des producteurs de lait) réunie au Mans pour son 65e congrès, les 24 et 25 mars, est « persuadée qu’il y a encore des aspects sur lesquels on peut se battre ». C’est ce qu’a expliqué Henri Brichart, le président du syndicat. Réélu lors de cette assemblée générale élective, il a vanté les mérites d’un syndicalisme responsable et « conscient que la donne a fondamentalement changé ». « Il ne faut pas laisser rêver les producteurs de lait », a ajouté Jean-Michel Lemétayer, le président de la FNSEA, sur la même longueur d’onde à ce sujet.
La FNPL a lancé une réflexion nationale « FNPL 2015 » pour construire le syndicalisme du futur. « Il s’agit de rebâtir le syndicalisme laitier de demain », a déclaré Henri Brichart, pour développer le « leadership » du syndicat. Les objectifs de ce travail prospectif, qui n’est pas finalisé, sont notamment de bâtir un programme politique et de refonder les valeurs de la FNPL. Une position syndicale volontairement positive, voire optimiste. Henri Brichart dans son discours de clôture espère même voir « se créer un nouveau relationnel entre les producteurs et les entreprises ». « C’est l’élément fondamental », veut-il croire. Et c’est justement là la difficulté.

Trouver un nouveau système

La raison : une échéance de court terme qui vient parasiter le dossier de la gestion de la fin des quotas laitiers. Il s’agit de la fixation du prix du lait payé aux producteurs au deuxième trimestre 2009. En clair, il reste environ un mois à l’interprofession pour inventer un nouveau système.
« Nous savons tous que les discussions sur la fixation du prix du lait seront difficiles », a même évoqué le ministre de l’Agriculture, Michel Barnier, dans son intervention le 25 mars. Afin de jouer son rôle de « facilitateur » dans ces discussions, le ministre rappelle qu’il a « sécurisé le cadre d’intervention de l’interprofession laitière » mis à mal par l’injonction de la répression des fraudes de stopper toute recommandation nationale sur le prix du lait. Olivier Picot, le président de l’Atla (Association de la transformation laitière), prédit des jours « complexes ». « Les jours qui viennent sont graves », a-t-il ajouté. « Nous sommes face à une vraie difficulté sur la formation des prix et à une vraie difficulté sur la méthode », a-t-il expliqué, faisant allusion au rôle de l’interprofession.

Prix du lait : « on bute »

« Sur les prix et les indicateurs, on bute », a résumé Régis Chevallier, vice-président de la FNPL. Henri Brichart dans son discours de clôture, a prévenu : « Il y a des limites que nous ne franchirons pas ». « Les discussions sur le prix du lait, extrêmement difficiles, seront un vrai révélateur de la volonté des uns et des autres », souligne le syndicaliste, résolument optimiste. « Si les producteurs de lait ne sont pas aveugles » concernant la réalité des marchés fortement déprimés au niveau des produits industriels (beurre et poudre), le président de la FNPL appelle les entreprises en contrepartie à donner des « perspectives » aux éleveurs, à tenir leur « engagement » toute en tenant compte « de l’économie de nos exploitations ».

« Sortir de nos fermes »

Jean-Michel Lemétayer, le président de la FNSEA et ancien président de la FNPL, a insisté encore plus. « La situation devient intenable pour les producteurs », a-t-il expliqué, réitérant à destination des entreprises son appel « à la sagesse ». Fustigeant l’« alignement sur le moins disant », il condamne par avance les entreprises « qui peuvent » payer un prix du lait convenable mais préfèrent « s’abriter derrière celles qui ne peuvent plus ».  « Les producteurs de lait sauront se mobiliser », prévient-il. « Il va bien falloir sortir de nos fermes », lance-t-il, particulièrement remonté sur le « triple non » de la commissaire Mariann Fischer Boel au sujet de la remise en cause de l’augmentation du 1 % des quotas des pays de l’UE. Il est ulcéré et ne s’en cache pas. « Les quotas laitiers sont faits pour être ajustés », martèle-t-il. Dans cette logique, Michel Barnier a fait l’annonce du gel temporaire de la distribution d’1 % du quota national pour la campagne 2009/2010. Philippe Mangin, le président de Coop de France, évoque « une période grave » pour le secteur laitier. Sans mâcher ses mots, il prévient : « Avec un prix de 210 euros/1000 litres, on arrête son exploitation laitière et on ne reprend pas son activité ». « Il y a des menaces de cessation de production laitière dans des bassins entiers », dit-il encore.

« Le pouvoir des quotas »

Comme si cela ne suffisait pas, la perspective d’un abandon des quotas laitiers en 2015 perturbe aussi la filière. Habituée jusqu’ici à négocier des prix, elle va devoir parler volume. « Les quotas nous donnaient à nous autres producteurs un pouvoir », analyse Bruno Ledru, des Jeunes agriculteurs. En 2015, ce « pouvoir » prendra fin. Le jeune syndicaliste ne se fait guère d’illusion : « Si on attend la nécessaire restructuration des entreprises, on sera tous morts avant. » « Dès maintenant, nous devons parler prix et volume », explique Henri Brichart. Et, le lieu idoine pour en discuter est l’interprofession : « Un lieu magique où travaillent des gens que tout oppose » selon sa jolie formule. Sauf que cette discussion risque elle aussi de tourner au rapport de forces.

Un syndicalisme « incontournable »

La question d’une « contractualisation plus formalisée » devient plus pressante au fur et à mesure que la filière se rapproche de la date fatidique de la fin des quotas. « Nous sommes prêts, pour progresser rapidement sur le sujet. Nous sommes non seulement prêts, mais nous voulons être incontournables », ajoute le président de la FNPL. Et d’insister sur la nécessité de « ne pas tarder à en discuter avec les entreprises ». Sinon, « cela se fera sans le syndicalisme ». Alors que les producteurs réfléchissent à un « contrat type » évalué au sein de l’interprofession, « certaines entreprises ont déjà leur contrat maison », souligne Régis Chevallier qui dit « stop ». « On court à l’intégration ! », a-t-il prévenu. Selon le président de la FNPL, « le sujet ne doit pas devenir tabou ».

Contrat : pas de « costume unique »

Représentant les industriels, Olivier Picot a le mérite d’être clair. Il a affirmé publiquement ne pas vouloir « de costume unique » à savoir de « contrat type », même s’il conçoit « que l’interprofession puisse être saisie ». Ce genre de positionnement n’augure pas d’un rôle renforcé de l’interprofession déjà chahutée il y a un an par la répression des fraudes. Après avoir été interdite de recommandation nationale sur le prix du lait, on peut se demander ce qui va lui rester. « La fin des quotas ne doit pas se faire dans la pagaille », a prévenu Jean-Michel Lemétayer. « Il faut la faire sous l’interprofession pour qu’il y ait encore une politique collective de la filière », affirme-t-il. Au chapitre de la contractualisation, les entreprises – qu’elles soient privées ou coopératives – semblent avoir pris une longueur d’avance sur les producteurs. Ce qui est logique. Elles ont tout à y gagner. Dans le cas de certaines coopératives, les contrats avec leurs producteurs, d’une durée de 5 ans, les obligent à rémunérer l’ensemble du lait produit. Avec ces nouveaux contrats marquant la fin des quotas, il s’agira aussi d’être en accord sur les volumes produits et surtout sur leur valorisation.

Prix, maîtrise et contractualisation…  les priorités du Massif central

Présidente de la section laitière du Cantal, Chantal Cor a pris la parole au nom de la région, en estimant, que deux leçons principales devaient être tirée de l’année laitière 2008 :
« d’abord sur la gestion des volumes, nous devons toujours gérer les volumes de production avec sagesse et vision à moyen terme, et enfin sur les reports de hausse de prix auprès des entreprises, nous devons demander des écrits mentionnant les montants et la date des retours auprès des producteurs ». Sur le prix du lait pour le second semestre 2009, le Massif central défend la position suivante : « Nous pensons que stratégiquement pour éviter de faire plonger le prix nous devons demander aux entreprises de reporter, en partie, la baisse du second trimestre sur la fin 2009 ou le début 2010 ; les producteurs n’ont-ils pas fait en 2008 des efforts de trésorerie ? En 2009, c’est au tour des entreprises de faire cet effort sous peine de voir fortement chuter la production laitière. Une meilleure prise en compte de la valorisation des PGC doit aussi faire partie de nos revendications ».
Valorisation
Et pour le Massif central, un prix du lait rémunérateur passe inévitablement par une maîtrise des volumes de production, même si cette notion de « maîtrise » semble aller à contre-courant des velléités libérales de la Commission européenne, qui a annoncé la disparition des quotas pour 2015.
La FNPL a d’ores et déjà planché sur cette question de la fin des quotas, sujet qui a fait l’objet d’un vaste débat lors du congrès. Pour les responsables agricoles du Massif central, l’après quota, devra prendre la forme d’une contractualisation interprofessionnelle.
Sur la PAC, les éleveurs laitiers en particulier ceux du Massif central, reconnaissent les efforts faits en leur faveur, à travers l’herbe et l’aide laitière en zone de montagne. Les éleveurs du Massif central, comme l’ensemble de la FNPL, se sont toutefois positionnés contre un prélèvement des entreprises sur l’aide au lait de montagne. Enfin, sur le dossier des AOC, la région Massif central souhaite que la FNPL aide les éleveurs dans l’application de l’accord sur la valorisation des AOC fromagères, qui a été signé dernièrement. C’est aussi aux côtés de la FNPL, que la section régionale laitière du Massif central veut engager un travail sur la valorisation du lait de montagne.

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